Les Tunisiens manquent peut-être d'endurance, laissant toujours derrière leurs grandes réalisations le goût de l'inachevé, mais cela ne sera certainement pas le cas pour l'Association Almadanya dont le rayonnement des actes achevés a, en relativement peu de temps, survolé nos frontières pour atteindre les murs du Palais royal alaouite. Lotfi Maktouf, président d'Almadanya, a été sollicité pour la signature d'une convention avec la BMCE (Banque du Maroc pour le commerce extérieur) pour l'échange et la coopération entre les deux institutions dans les domaines de la promotion de l'éducation en milieu rural et la protection de l'environnement. Ce qui fut fait et devait être fêté samedi 31 mai à Tunis en marge de la visite de sa majesté le Roi Mohamed VI en Tunisie. Un contretemps a empêché Othman Benjelloun, président de la BMCE d'assister à la cérémonie organisée à l'occasion de la signature de la convention. C'est Jalloul Ayed, ancien administrateur directeur général du Groupe BMCE, qui était là et qui a exprimé sa fierté de voir pareil partenariat voir le jour: «4% des bénéfices bruts de la BMCE vont au mécénat dans les zones rurales», a tenu à préciser Jalloul Ayed. La Fondation BMCE pour l'éducation et l'environnement a été créée en 1995 avec deux priorités essentielles: la promotion de l'éducation en milieu rural à travers la mise en place du Programme Medersat.com et la protection de l'environnement. Pour Lotfi Maktouf, fondateur d'Almadanya, qui a, lui, commencé par mettre en place tout un réseau de transport des élèves vers leurs écoles et leurs collèges dans les zones rurales enclavées, «ce rapprochement entre deux acteurs principaux de la société civile en Tunisie et au Maroc dont les principes sont fondés sur les valeurs de modernité, de tolérance, d'ouverture et de solidarité, est la plus grande preuve de la nécessité d'une plus grande participation de la société civile dans les efforts de développement dans des pays comme les nôtres. C'est aussi une nécessité dans la mesure où l'Etat ne peut plus assumer à lui seul les charges de plus en plus importantes de populations composées en grande partie de jeunes et dont les besoins et les exigences alourdissent les budgets de nos gouvernements respectifs. Nous ne pouvons que rendre hommage à M. Benjelloun. Son courage, sa vision et son engagement demeurent une source dinspiration pour nous tous. Qui aurait volontairement dédié, comme l'a fait la BMCE, 4% de ses profits avant impôts au soutien de l'éducation et de l'environnement depuis près de 20 ans?». Le rapprochement entre deux pays ne se fait pas que par les canaux diplomatiques ou d'Etat à Etat. Le rôle assumé et assuré par les organisations de la société civile acquiert une importance croissante dans le domaine socioéconomique. Almadanya, qui a uvré depuis plus d'une année à la plantation de plus de 100.000 arbres suite à un accord passé avec la direction générale des forets «DGF» et visant la plantation à terme d'un million d'arbres, compte passer à la vitesse supérieure en finançant des TPE et en lançant un fonds pour les microcrédits. Elle espère aussi engager ses partenaires marocains dans ses projets. La Convention entre les parties tunisienne et marocaine couvre la mise en place d'un système d'échange et de consultation avec la création d'un comité permanent d'échanges et de suivi co-présidé par la présidente de la Fondation BMCE BANK, Dr Leïla Mezian Benjelloun et Lotfi Maktouf. Elle annonce le parrainage par les deux Fondations d'un prix international sacrant toute initiative citoyenne originale visant l'amélioration de l'accès à l'enseignement primaire en milieu rural. Le comité de coordination créé en vertu de la Convention aura pour mission d'en fixer les contours et le format. Le prix sera ouvert à toute association tunisienne et marocaine. Le clou de la Convention est fort heureusement, communication directe oblige, le lancement mutuel d'une radio rurale avec en toile de fond la problématique de l'éducation en phase préscolaire et scolaire et l'environnement. Les programmes seront animés par des membres des deux fondations et diffusés en arabe, amazighe et français. La radio sera apolitique, digitale, et transmise sur les mêmes fréquences en vertu des lois et règlements en vigueur au Royaume du Maroc et en République tunisienne. Miriem Bensalah-Chaqroun, présidente de la CGEM (Patronat marocain) invitée en compagnie de Wided Bouchamaoui, présidente de l'UTICA, a exprimé sa grande joie de se trouver en Tunisie dans la délégation royale: «Ce qui nous a le plus impressionnés lors de notre visite, ce sont les actions concrètes qui en ont découlé. Avec ma consur Madame Bouchamaoui, nous avons réalisé que nous pouvions passer des mots aux actes. La délégation d'hommes et de femmes d'affaires que j'ai eue l'honneur de conduire ici en Tunisie a pu réaliser des contacts fructueux avec les opérateurs privés tunisiens. Nous sommes là depuis mercredi, c'est une longue visite qui nous rassure et nous réconforte quant à la qualité des rapports entre nos deux pays. Pour nous, en tant que patronats, les exemples de la BMCE et d'Almadanya doivent être suivis par beaucoup d'autres. Le développement du tissu de la société civile en Tunisie est un modèle pour d'autres pays y compris le nôtre. Nous réalisons à quel point le rôle qu'elle joue est indispensable aussi bien pour des populations en détresse que pour épauler l'Etat dans ses efforts de développement». Le Patronat tunisien ne sera pas en reste en matière de mécénat. Sa présidente, Wided Bouchamaoui, a d'ores et déjà tout mis en place pour la fondation UTICA car: «Les opérateurs privés qui participent d'ores et déjà à nombre d'uvres caritatives doivent conjuguer leurs efforts pour servir leurs pays grâce aux moyens dont ils disposent en unissant leurs actions et en uvrant à l'amélioration de la qualité de vie des populations en détresse. Nous jouerons comme il se doit notre rôle pour soutenir notre peuple et notre pays tout comme nous appuierons les efforts des acteurs tunisiens de la société civile. Le partenariat de Lotfi Maktouf avec une fondation aussi prestigieuse que celle de la BMCE est un motif de fierté pour nous». Lotfi Maktouf, qui ne doit ses nombreuses réussites qu'à son propre mérite, est un ambitieux qui se donne les moyens de ses ambitions. Ainsi, il compte, avec la Fondation BMCE BANK, consolider sa présence à l'international et donner une meilleure image de la société civile dans les pays de l'espace maghrébin. «Souvent le travail et les efforts de la société civile sont mal appréciés et catalogués soit comme prolongement politique, ou comme l'expression d'un certain opportunisme. Les accomplissements respectifs des deux fondations démontrent la réalité et l'efficience de l'engagement citoyen en Tunisie et au Maroc». William Faulkner, romancier américain, disait «Les mots sont comme les glands... Chacun d'eux ne donne pas un chêne, mais si vous en plantez un nombre suffisant, vous obtiendrez sûrement un chêne tôt ou tard». Ce que font aujourd'hui des fondations comme celles de la BMCE ou Almadanya sont plus que des mots, ce sont des actes et des réalisations que l'on voit, que l'on perçoit et dont on récolte les fruits en rallumant l'espoir dans les regards des enfants, en redonnant du rêve à ceux qui l'on perdu et en comptant les réussites de ceux qui pensaient être les oubliés de la société.