La traçabilité, passeport obligatoire pour l'UE dès le 1er janvier 2007 Par Moncef MAHROUG
A quelques jours de l'entrée en vigueur de la réglementation sur la tracabilité, imposant à tout exportateur de produits agricoles vers l'Union européenne d'attester celle de ses produits, la Chambre syndicale nationale de Conseillers Agricoles a présenté, vendredi 15 octobre 2006, un documentaire de 15 minutes sur l'Euro Retail Produce Good Agriculture Practices (EurepGAP), une norme européenne non-obligatoire légalement, mais dont le respect est de plus en plus exigé par les sociétés européennes de la grande distribution. En 2005, un exportateur tunisien a réussi à décrocher un juteux contrat en vue d'écouler 15.000 tonnes d'huile d'olives conditionnée sur le marché européen. Toutefois, la transaction n'a pu être réalisée, car, après analyse dans un laboratoire européen, il s'est avéré que l'huile exportée contenait des résidus de pesticides. Et il a donc fallu rapatrier la cargaison en Tunisie. Cette mésaventure, dont se souvient M. Férid Tounsi, président directeur général du Centre de Promotion des Exportations (Cepex), risque d'arriver à d'autres exportateurs tunisiens sur le marché européen, puisque les Européens deviennent de plus en plus exigeants en matière de sécurité alimentaire, et multiplient les certifications exigées à l'entrée. A partir du 1er janvier 2007, aucun produit agricole ne pourra être écoulé sur le marché européen si l'exportateur concerné n'est pas en mesure d'en attester la traçabilité. Mais une autre norme est en train de devenir incontournable, même si elle n'est pas obligatoire : l'Euro Retail Produce Good Agriculture Practices ou EurepGAP- dont une vingtaine de sociétés européennes de la grande distribution exigent depuis 1997 le respect par leurs fournisseurs, suite à la série de crises alimentaires des années 90 qui ont rendu le consommateur européen très soucieux de la sécurité de son alimentation. En près de dix ans, près de 70.000 producteurs d'une soixantaine de pays se sont fait certifier EurepGAP. A ce jour, seuls 10 tunisiens le sont. Une situation que la Chambre syndicale nationale de Conseillers Agricoles juge «préoccupante, car il est probable que l'exportation sur les pays de l'Union européenne soit compromise du fait des exigences en matière de certifications, désormais seul moyen d'accéder aux circuits de la grande distribution qui représente 80% du commerce alimentaire». Pour sensibiliser les opérateurs à ce risque et les inciter à se donner les moyens d'y faire face -et, accessoirement, «montrer les compétences des conseillers agricoles», note M. Walid Gaddas, président de la Chambre syndicale nationale de Conseillers Agricoles-, cette structure a fait réaliser par l'agence Multicom Services, une agence de conseil en communication, dirigée par M. Wahid Khadhraoui -et en collaboration avec le Cepex, l'Agence de Promotion des Investissements Agricoles, le laboratoire Bayer CropScience, et Sygenta- un documentaire de 15 minutes sur «EurepGAP, passeport pour l'exportation», présenté vendredi 15 décembre 2006, à la Maison de l'Exportateur. Un film dans lequel le président directeur général du Cepex voit la traduction de «l'effort d'adaptation à la demande internationale». Se faisant l'avocat des conseillers en exportation, M. Férid Tounsi a invité les entreprises tunisiennes à «croire en leurs compétences», à l'instar de l'administration. Et comme pour donner l'exemple, le patron du Cepex a annoncé que les interventions du Fonds de Promotion des Exportations (Foprodex) seront adaptées de manière «à encourager les entreprises à utiliser les services des conseillers» en exportation. Considérant la séance de projection du documentaire comme une opportunité pour les agriculteurs «de rencontrer les conseillers agricoles, une corporation nouvelle», M. Mohamed Gharbi, p-dg de l'APIA, a rappelé que «la modernisation de l'agriculture et l'amélioration du revenu de l'agriculteur constituent une préoccupation de l'Etat». Avant de reconnaître que «la qualité» -«un corollaire de la modernisation»- «est un mot nouveau» chez nous «de plus en plus usité parce qu'il n'y a pas de possibilité de commercialisation sans qualité». Visiblement bien familiarisé avec cette problématique, M. Youssef Kachouti, vice-président de l'Union Tunisienne de l'Agriculture et de la Pêche (UTAP), a constaté que «cette question a été discutée en de multiples occasions», et que la date d'entrée en vigueur des contrôles sur la traçabilité à l'entrée du marché européen se rapprochant petit-à-petit, «les choses se corsent». Mais, précise M. Kachouti, «cette exigence est importante pour l'exportation, mais également pour le marché intérieur». Et il faudra au préalable «clarifier certaines choses» en suspend, afin de «renforcer notre travail de sensibilisation».