La gouvernance d'entreprise est un thème à la mode. Une notion qui a émergé suite à de retentissants scandales financiers qui on eu lieu aux Etats-Unis. Parmi lesquels les «affaires» Enron (2001), et WorldCom qui ont défrayé la chronique à cause notamment des pertes colossales engendrées. Plus près de nous, l'histoire de Batam a marqué durablement les esprits, et a contribué à faire connaître le Webmanagercenter. La gouvernance d'entreprise se doit donc de rassurer actionnaires et employés, parfois malmenés par la gestion défaillante et même frauduleuse de certains grands managers. Des outils ont fini par être mis en place par les institutions, pour éviter les dérives. Des chercheurs, d'abord américains mais aussi européens, et même tunisiens se sont penchés sur le sujet. L'Institut de Recherche sur le Maghreb Contemporain (IRMC), aux analyses parfois controversées, s'y est mis dès 2003, avec force tables rondes à l'appui, avec un chercheur tunisien, Karim Ben Kahla en l'occurrence, en coordinateur.
Le Maroc, lui, s'est même doté d'un «Code de bonne gouvernance de l'entreprise», sous l'impulsion discrète de la Banque mondiale. La Tunisie ne pouvait rester (et heureusement) indéfiniment à l'abri de la tendance.
Pour ce seul mois d'avril, on assistera ainsi à au moins deux conférences qui traiteront toutes de ce sujet. L'Association des Tunisiens des grandes écoles organisera ainsi un séminaire les 11 et 12 avril, à Hammamet sur le thème « La gouvernance Financière des entreprises de l'économie mondiale». Les 14 et 15 avril, ce sera au tour de l'Institut arabe des chefs d'entreprise (IACE), à Tunis, de lancer la discussion au sujet du «rôle des journalistes dans la gouvernance d'entreprises».
Et pour le coup, les journalistes et le travail qu'ils accomplissent seront ainsi sur la sellette. Et pour cause ! Le lecteur ne saisit peut-être pas toute l'étendue de la tâche préalable à la rédaction des papiers qui lui parviennent. L'information en général, et en particulier quand elle touche au monde de l'entreprise, est particulièrement difficile à obtenir dans notre pays. Les hommes d'affaires sont généralement très réticents à parler chiffres d'affaires et résultats financiers.
Quand une entreprise tunisienne scelle des accords avec une société internationale, ou décide d'investir dans un pays étranger, il suffit souvent de quelques heures pour que l'information soit rendue publique. Elle fera ainsi rapidement le tour du monde, via internet, pour parvenir finalement à être diffusée sur un portail tunisien. A contrario, on aurait toutes les peines du monde à dénicher des informations de la même entreprise, quand une affaire est strictement tuniso-tunisienne. Au niveau international, même dans des pays très proches comme le Maroc ou l'Algérie, la presse économique accède en effet beaucoup plus facilement aux informations.
Or, gouvernance rime avant tout avec transparence. Et la presse est donc bien au centre de ces enjeux. Il ne s'agit pas de divulguer au grand public des secrets industriels, encore moins de torpiller les projets d'une entreprise en renseignant les concurrents. La presse économique n'est pas une officine de renseignements. Son rôle est juste d'aider les décideurs à sentir les tendances, et à mieux évaluer le contexte général dans lequel ils évoluent. Une presse économique de qualité peut donc rendre de grands services aux capitaines d'industries. A condition qu'on lui en donne les moyens, et que les décideurs jouent le jeu.
En dernière analyse, l'état de la presse économique et financière ne fera que refléter la santé des entreprises d'un pays, et plus généralement de son économie. Quelques pincées de gouvernance, ne serait-ce que dans le monde souvent opaque de nos entreprises, feraient donc le plus grand bien.