Interpellé sur la position officielle de la France au sujet du projet de la norme européenne «made in» qui impose aux produits textiles importés en Europe le marquage du pays d'origine, M. Serge Degallaix, ambassadeur de France en Tunisie, a indiqué que, «dans cette affaire, les intérêts des Tunisiens et des Français sont partagés. Les entreprises textiles des deux pays sont interpénétrées. La Tunisie est le 3ème fournisseur en habillement de la France et son 4ème client en textile. La France est le 1er marché de la Tunisie en habillement et son 2ème fournisseur. Conséquence : tout ce qui pourrait affecter l'intérêt de la Tunisie affecterait celui de la France». Le diplomate français, qui intervenait, lundi 16 juin 2008, à l'occasion d'une conférence de presse sur la participation de la France en tant qu'invitée d'honneur au salon Texmed 2008, a rappelé que la France compte, à elle seule, environ 400 entreprises off shore opérant dans le secteur textile.
Décryptage : par delà les nuances, il semble que la position de la France sur le «made in» ait bel et bien changé. Elle est de loin en net recul par rapport à celles d'autres pays de l'Union partisans de l'adoption du made in.
Lancée par l'Italie, la norme «made in» aux relents protectionnistes peut avoir des effets négatifs pour les nombreux industriels européens, détenteurs de marque et ayant développé des stratégies de partenariat avec la rive sud de la Méditerranée, c'est-à-dire la quasi-totalité des entreprises européennes du secteur textile-habillement.
Cette disposition risque de compromettre les implantations en Tunisie de griffes célèbres telles que Lacoste, Benetton, Aubade et autres .
Idem pour les centrales d'achat et hypermarchés qui s'approvisionnent en produits textiles dans les pays du sud de la Méditerranée en produits textiles à des prix compétitifs avant de leur greffer leurs enseignes. Ces géants de la grande distribution risquent également d'être lésés.
La menace est sérieuse. Selon la publication spécialisée Textile Business News, le Parlement européen vient de voter une résolution sommant le Conseil européen d'élaborer une réglementation imposant le marquage de l'origine sur tous les produits textiles importés dans l'UE, à l'exception de la Turquie, la Norvège et l'Islande.
Pire, le pays initiateur de cette norme, en l'occurrence l'Italie, est passé déjà à l'action. Il y a exactement quelques semaines, un juge de Livourne a acquitté un entrepreneur accusé d'avoir introduit sur le marché italien des produits industriels avec le marquage inapproprié «made in Italia».
Il s'agit du textilien Renzo Guazzini qui avait mis sur des vêtements d'hommes, réalisés par des stylistes-modélistes italiens, mais confectionnés en Tunisie, l'étiquette «made in Italy».
Un détail qui ne manque pas d'enjeux. Le textilien italien a été dénoncé par la garde de finance qui a également saisi la marchandise importée de Tunisie.
Le juge, qui a accueilli les thèses des défenseurs de Guazzini, a estimé qu'il a été suffisant que le tissu et le modèle soient italiens pour pouvoir apposer l'étiquette «made in Italy».
Cet incident, même s'il est isolé, remet sur la table la problématique de la fameuse norme européenne «made in».