Webmanagercenter : Comment vous est venue l'idée de monter votre propre entreprise ? Ines Teminmi : J'ai eu la chance de participer à un programme de Business Women Exchange financé par les USA et le Center for Applied Training (C.A.T.) -installé et géré par une femme- de Tunis. Ce qui m'a permis de visiter des usines de recyclage de déchets électroniques dans l'Etat de Desmoines aux Etats-Unis. Les usines étaient bien propres et je me suis dit "Pourquoi pas nous, on doit faire la même chose en Tunisie ?". Pourquoi dans un secteur aussi innovant ? Le reconditionnement et le recyclage des ordinateurs sont une urgence. Le reconditionnement des ordinateurs, devenus obsolètes pour certains, peuvent servir à d'autres. A ce titre, un programme présidentiel est mis en place pour reconditionner proprement les ordinateurs et gérer ensuite leurs déchets. C'est un double impact, lutter contre la fracture numérique en vulgarisant l'accès aux nouvelles technologies de l'informatique et gérer la gestion des déchets. Gérer la gestion des déchets est capitale pour préserver notre environnement. Y a-t-il eu des moments de doutes ? De doutes, je ne sais pas. Une fois la machine est lancée, on ne peut plus revenir en arrière. Ce sont surtout des moments de peur, que l'on affronte quand des imprévus surviennent, et que la trajectoire s'en trouve modifiée. Il faut vaincre le stress et trouver une solution. Lors des démarches, entre autres administratives, quel accueil recevait ce projet ? L'administration est une grande machine. Il est difficile parfois de trouver le bon interlocuteur. Quelque fois, un fonctionnaire se trouve dans l'incapacité de vous aider car ce n'est simplement pas la personne qu'il faut. Il va de soit que lorsque vous trouvez la personne juste, cela va vite et du coup, c'est le moral qui remonte. L'accueil pour ce projet a été superbe. Les uns me souhaitant «bon courage», les autres me disant «dans quoi tu te jettes?». Je me souviens d'une anecdote à ce sujet. Le directeur d'une société de recyclage de déchets électronique aux USA et celui d'une société tunisienne m'ont demandée : "Vous êtes une femme, pourquoi choisir le secteur de la gestion des déchets ? C'est un travail d'homme !". Ma réponse a été claire : Depuis la nuit des temps, la femme s'est occupée du nettoyage, maintenant que c'est rémunérateur, cela devient un travail d'homme ! Avez-vous peur de l'échec ? Cette activité est lucrative en Europe. En Tunisie c'est un nouveau concept. Il faut, c'est vrai, de la persévérance mais aussi un fonds de roulement. Le temps que les affaires bougent, il faut du temps et donc tenir financièrement. J'explique ma stratégie de travail et discute beaucoup avec mon banquier, les organismes sociaux et fiscaux Qu'est-ce que vous considérez comme votre plus grande réussite ? C'est un bien grand mot. Chaque jour, mois et année, je lutte cherchant à développer et à innover. Je vous dirais que mes objectifs de réussite sont d'équilibrer ma vie familiale et professionnelle, mettre en place ce même genre de programmes «Reconditionnement et Gestion des déchets d'ordinateurs» dans d'autres pays d'Afrique et aussi avoir une équipe de travail solide qui repose sur l'honnêteté, le professionnalisme, et le partage. Quelles sont les armes féminines qui aident à la réussite ? Nous avons grandi avec des «tu ne peux pas le faire parce que tu es une fille», d'une part, et des «si tu y crois tu peux le faire». Il faut choisir. J'ai appris, comme d'autres femmes, qu'il est important d'abattre les barrières et de relever les défis. Avec le statut de la femme dans notre pays, les femmes marchent la tête haute. Cela réconforte et aide dans nos vies professionnelles et familiales. La femme est une maman qui protège et gère sa petite famille. Ses enfants sont ses priorités. Je pense qu'elle fonctionne avec le même comportement s'agissant de son travail. Comment êtes-vous perçue par votre entourage ? Une sur pour certaines, un pilier pour d'autres et une maman câline pour ma fille. Quelle est votre devise ? Tout ce qui ne te tue pas te rend encore plus fort. Lire aussi : - Femmes et entrepreneuriat : ce que femme veut,... - Parcours de femmes, parcours d'exceptions - Paroles de femmes entrepreneures - Tunisiennes et politique : la parité n'est pas pour demain - Faiza Kéfi : «Les femmes, une force dynamique pour le progrès que personne ne pourra arrêter» - Aida Bellagaha Gmach: «Le Rocher bleu est un défi. Mon combat est de préserver notre patrimoine» - Leila Mabrouk Khaïat : La force tranquille - Raoudha Ben Saber : L'adversité rend plus fort