«Que ceux que ce projet intéresse le prennent». M. Boujemaa Yahyaoui conclut ainsi son réquisitoire contre la deuxième usine d'engrais chimiques M'dhilla 2- que le Groupe Chimique Tunisien est en train de construire dans sa région, Gafsa. Prudent, le député de ce gouvernorat entame son attaque sur la pointe des pieds. «Il y a des problèmes en matière de développement qu'il est grand temps de régler», lance l'élu de ce gouvernorat du sud-ouest à l'adresse du ministre du Développement et de la Coopération internationale, invité jeudi 4 février 2010 de la Chambre des députés pour un débat sur le développement. M. Yahyaoui abat ensuite ses cartes et interroge: «Où en est le projet de deuxième usine chimique à Mdhilla ?». Le député enchaîne, plus direct, en se demandant si les autorités en avaient bien étudié «les retombées sur la santé» des habitants de la région. Avant d'enfoncer le clou en invitant le gouvernement à «approfondir l'étude» de ce dossier et à «bien choisir son lieu d'implantation». Fruit d'un partenariat entre le Groupe Chimique Tunisien avec Gujarat State Fertilizers and Chemicals et Coromandel Fertilizers Limited, deux sociétés indiennes spécialisées dans les engrais, la nouvelle usine doit, avec ses 400 employés, produire, à partir de 2011, 360.000 tonnes de triple superphosphate par an destinées à l'exportation en Inde. Un tant soit peu provocateur, Boujemaa Yahyaoui affirme qu'«il n'a pas échappé aux habitants de la région que ce projet a été déplacé de Sfax à M'dhilla (dans le gouvernorat de Gafsa, ndlr)». Et que cela «réduit à néant les perspectives de développement de la région». Après avoir écouté sans broncher l'attaque en règle du député, le ministre du Développement et de la Coopération internationale prend la parole et répond, calmement. Il rappelle, d'abord, que le développement a pour finalité de mettre en valeur les ressources de chaque région. Et dans le cas de Gafsa, le phosphate est la plus importante d'entre elles. Se disant d'accord avec le député sur le fait que «l'exploitation de cette ressource doit se faire dans le respect des normes» environnementales, M. Mohamed Nouri Jouini «rassure le député : toutes les conditions et les technologies sont réunies» pour que cela soit fait. Aujourd'hui, «il n'y a plus aucun problème sous cet angle», observe-t-il. De plus, l'industrie chimique «n'est pas la seule polluante. Le textile, l'agroalimentaire et d'autres secteurs le sont aussi, si l'on ne met pas en place les solutions adéquates», précise M. Nouri Jouini. Or, «le projet de M'dhilla, dont les travaux s'achèveront en avril 2010 et qui va préserver la capacité du Groupe Chimique à exporter, est réalisé dans le respect de l'environnement», insiste le ministre du Développement et de la Coopération internationale, à l'adresse des habitants de Gafsa. «En Tunisie, où l'on investit 1,4% du PIB dans la protection de l'environnement, on ne réalise pas un seul projet de développement sans être en conformité avec les règles dans ce domaine», tranche le ministre.