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Le piège de l'antiparlementarisme - La grande tromperie du nationalisme plébiscitaire
Publié dans Business News le 22 - 12 - 2021

*Professeur Hospitalo-Universitaire à la Faculté de Médecine de Tunis
*Ancien Professeur associé Faculté de Médecine de Montpellier

"Qu'est-ce qu'on irait mettre à la place du régime parlementaire si honni et si vilipendé? L'autocratie ? L'oligarchie ? La dictature ? N'est-il pas plus rationnel de chercher, avant toute autre tentative, à améliorer paisiblement l'instrument qui nous régit ? » Le National, 3/2/1929
Le 9 avril 1938, conduits par Mongi Slim et Ali Belhouane les manifestants scandaient, parlement tunisien, les forces de l'ordre de l'occupant ont tiré dans la foule faisant plusieurs morts. Cinq jours après l'indépendance soit le 25 mars 1956 a été mise en place l'assemblée constituante qui sera remplacée en 57 par l'assemblée nationale. Considérée, souvent à tort, comme une simple chambre d'enregistrement, l'assemblée nationale a toujours été, du moins dans la forme, respectée par la dictature.

L'unanimisme et la discipline imposés par le parti unique ont été remplacés, lors de la dernière décennie, aussi bien dans la version ANC que ARP, par une pagaille indescriptible. Tous les travers possibles et imaginables que peut avoir une assemblée du peuple ont été observés. Absentéisme, violence politique certes verbale et symbolique dans la plupart des cas, mais aussi parfois physique, malhonnêteté intellectuelle et matérielle de certains élus, tourisme parlementaire, bref des images relayées par la télévision, dégradantes, écœurantes de la vie parlementaire. Les dérives de cette assemblée ont détruit la confiance des citoyens dans cette forme d'organisation des pouvoirs. Le rejet par l'immense majorité des citoyens des personnes et de l'institution est incontestable. Plus graves sont les conséquences sur le débat sur la souveraineté populaire et sa traduction constitutionnelle. Il est totalement biaisé par ce rejet parfaitement compréhensible mais tellement destructeur. Par ailleurs l'instrumentalisation par la présidence des dysfonctionnements à des fins personnelles n'est pas à mon sens suffisamment soulignée.

C'est donc sans surprise et dans une quasi-unanimité que toute la classe politique tunisienne ou presque a approuvé les mesures prises le 25 juillet 2021 par le président de la république. Cinq mois plus tard beaucoup réalisent enfin que c'était une erreur.
Parce qu'il est d'une importance exceptionnelle le débat sur les formes de gouvernance en Tunisie mériterait plus de profondeur et plus de sérénité.
Les abus sont réels et actés mais…ceux qui veulent bien se donner la peine de regarder autour d'eux, toutes ou presque les institutions parlementaires à travers le monde ont connu ou connaissent encore, certes à des degrés divers, ce type de dérives, fallait-il pour autant les mettre au pas ? N'est-ce pas à ce prix qu'on peut atteindre la maturité ? N'est-ce pas la moins mauvaise des solutions ? Encore récemment en Turquie, en Ukraine, au Népal, en Corée du Sud, en Géorgie, à Taïwan les images de bagarres généralisées au parlement ont fait le tour du monde. Plus loin dans le temps on peut retrouver des dérives bien pires dans l'histoire des parlements et de tous les pays. La symbolique est grande, ainsi le 23 février 1981 en Espagne des officiers de l'armée prennent d'assaut le parlement, pour imposer une ligne politique. Le 06 janvier 2021 les partisans de Trump donnent l'assaut du Capitole…les exemples sont nombreux mais la finalité est toujours la même.

On peut tourner autour du pot indéfiniment mais s'en prendre à la représentation nationale répond toujours à une volonté de mettre en place un régime autoritaire. De fait, quels que soient les griefs que l'on a contre l'institution parlementaire, s'en prendre à elle a toujours été un signe avant-coureur d'un dangereux recul de la démocratie.
L'antiparlementarisme est une vieille rengaine. Il se nourrit d'arguments faciles et souvent vrais. C'est une institution qui coûte cher au pays et qui ne produit pas grand-chose, qui est source de blocages, c'est un repère d'opportunistes corrompus et ce ne sont ici que quelques ingrédients du discours anti parlementariste.

Derrière cette façade se dissimulent les nostalgiques d'un régime présidentiel fort. Ceux pour qui le rêve de l'homme providentiel, du sauveur est toujours vivace. Combien de fois avons-nous entendu ces dernières années les appels pour la mise en place d'une « dictature juste » ? Un oxymore. La nature a horreur du vide. La radicalité des discours d'une partie s'est construite sur les décombres des partis progressistes et des démocrates libéraux. C'est aussi une réalité, ces partis ont été décrédibilisés auprès de l'opinion publique par des égos en perdition.
Rassembler la nation autour d'un chef honnête et droit qui sera à l'écoute du peuple et qui parlera en son nom, qui sauvera le pays et patati et patata voilà la dangereuse illusion.
Au diable la constitution de 2014, au diable les institutions, haro sur les procédures, ce qu'il faut au pays c'est des prises de décisions rapides et concrètes ; Il faut mettre à l'écart les politiciens professionnels, place aux technocrates à qui doivent traduire les décisions du chef en projets applicables. Simplissime. C'est trop simple pour être vrai. Malheureusement pris entre les mâchoires de l'anarchie, des dérives parlementaires, de la crise économique et de la pandémie, même les plus modérés se sont laissé entraîner dans cette aventure réactionnaire.
Réactionnaire elle l'est car elle se nourrit de tous les ingrédients du discours réactionnaire. Tous pourris, on vous ment, on complote, on vous vole vos richesses, sans leur avidité et la corruption vous vivez dans un paradis. Vous, le peuple n'avez aucune part de responsabilité, vous êtes simplement victimes des puissants. Opposer les honnêtes citoyens honnêtes de préférence pauvres et peu éduqués aux citoyens corrompus en général riches et habitant les beaux quartiers trouve toujours un écho. Je vais rétablir l'ordre et la discipline, je vais épurer les institutions et la société de la vermine. Je parle au nom du peuple et je suis la seule source de légitimité politique. Toutes les formes de représentation élue de délégation de souveraineté individuelle, autre que la mienne, sont remises en question.
Le projet d'une nation prospère, juste et pure grâce à une nouvelle génération d'hommes et de femmes que la politique n'a pas encore « salis » autoriserait toutes les transgressions.

Le chef, le leader, celui qui conduit le changement s'acharne à discréditer les autres qui ne pensent pas comme lui. Il le fera au nom de l'absolue primauté de la nation, qui, parce qu'elle est en danger, doit prôner sur toutes autres considérations. Il critique les institutions qu'il accuse de dysfonctionner, d'être inadaptées pour faire face aux défis que doit affronter la nation. On s'invente des ennemis.
Automatiquement l'autre, l'étranger devient un danger, en même temps les opposants deviennent des ennemis de l'intérieur. On divise ainsi la société et on s'enferme dans une bulle de valeurs destructrices. Un cercle vicieux. Cette forme de nationalisme révolutionnaire a fait tant de mal à l'humanité. On s'approprie l'élan révolutionnaire pour mieux l'étouffer.
En réalité comme le disait Jules Guesde « Révolutionnaire est l'action parlementaire, si pacifique soit-elle, lorsqu'elle bat, du haut de la tribune de la Chambre, le rappel des mécontents de l'atelier, du champ et du comptoir, et lorsqu'elle accule la société capitaliste au refus ou à l'impuissance de leur donner satisfaction. Antirévolutionnaire, réactionnaire au premier chef serait, en revanche, l'émeute, malgré son caractère d'illégalité et de violence, parce qu'en fournissant au capital moribond la saignée populaire dont il a besoin pour se survivre, elle reculerait l'heure de la délivrance. » « Parlementarisme et révolution », Le Socialiste, 10 novembre 1894. Le parlement et non la rue est par essence la plus haute expression de la démocratie représentative.
L'ARP doit redevenir un instrument de gestion pacifiée des différences exprimées dans notre communauté. C'est en son sein que la nation règle nos différends et s'impose des normes de vie communes. Cela doit être ainsi en démocratie. La mission de la plus haute autorité n'est pas de nommer des délégués, des gouverneurs ou des PDG ou d'exercer je ne sais quel pouvoir mais d'œuvre pour renforcer les institutions, apaiser les tensions. Avoir le souci de traduire à chaque instant, par tous les actes de la vie quotidienne les principes républicains est la noblesse de sa mission. C'est la seule façon de redonner confiance aux tunisiens dans leurs institutions politiques et de bâtir un Etat solide. Le reste n'est qu'enfumage et manipulations.
"Those who cannot remember the past are condemned to repeat it" G. Santayana


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