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Mais bien sûr que Kaïs Saïed dit la vérité
Publié dans Business News le 15 - 02 - 2023

Le président Kaïs Saïed a donné un début de réponse à la vague d'arrestations observées depuis le week-end dernier. Il s'agirait, notamment, d'un complot visant l'Etat et son assassinat. Comme il n'en est pas à sa première déclaration du genre et comme il n'a étayé aucun fait tangible, il serait difficile pour une personne dotée de raison d'y adhérer.

C'est désormais devenu une habitude, le président de la République a sa propre méthode pour envoyer des messages à son peuple. Au discours solennel et aux interviews journalistiques classiques dans les pays développés (et même despotiques), Kaïs Saïed préfère les monologues devant des responsables muets et les bains de foule.
C'est ainsi qu'il a répondu à la polémique actuelle suite aux multiples arrestations observées depuis le samedi 11 février et ce à travers trois sorties, médiatisées à travers la page Facebook de la présidence. Un monologue de sept minutes avec la ministre du Commerce, un bain de foule au marché Bab El Fellah, quartier populaire de Tunis et un monologue de 18 minutes devant les plus hauts cadres sécuritaires au siège du ministère de l'Intérieur et en l'absence du ministre.
La rencontre avec la ministre a été diffusée à 16h43, le bain de foule à Bab El Fellah a eu lieu pendant qu'il faisait jour, mais la vidéo très soigneusement montée n'a été publiée qu'à 20h46, alors que la rencontre au ministère de l'Intérieur a eu lieu à 21 heures et a été diffusée à 22h58.
Devant la ministre du Commerce et les foules qui l'acclamaient à Bab El Fellah, le président a beaucoup insisté sur les circuits de distribution qui affament le peuple et sont responsables des pénuries et de la cherté des prix. Il a déclaré que seulement 5% des marchandises transitent par les voies officielles du marché de gros, ce qui explique, d'après lui, les gros problèmes actuels que rencontre la population.
Devant les hauts cadres sécuritaires, il a donné plusieurs détails concernant les arrestations en cours. Il est question, d'après lui, d'un complot visant l'Etat et son propre assassinat. Il était remonté contre le parquet qui a préféré surseoir aux arrestations du week-end, les renvoyant à lundi. « On leur dit qu'il y a un complot contre l'Etat et ils disent qu'il faut attendre lundi ! ».

Si l'on devait sonder la population au lendemain de ces trois sorties présidentielles, on parierait que la popularité de Kaïs Saïed grimerait en flèche. Les chalands de Bab El Fellah lançaient en masse des vivats et des slogans hostiles aux nantis. « Coupez leur la tête, monsieur le président, ils nous affament, nous sommes de pauvres gens, aidez-nous, on est avec vous, le peuple est avec vous, nous vous attendons, nous sommes patients parce que vous nous avez appris la patience ».
Loin de Bab El Fellah, dans les cafés de la capitale et sur les réseaux sociaux, les réactions sont quasi unanimes, le président est fortement soutenu. Ici et là on répète qu'il a raison de s'attaquer aux mafias, aux lobbys et aux nantis qui se sont enrichis sur le dos du peuple durant des décennies.
À vrai dire, Kaïs Saïed sait trouver les mots adéquats pour se faire acclamer par les foules. Il est aussi un as du clivage. Il n'y a pas une sortie médiatique où il ne parle pas de circuits d'affamements du peuple et de corrompus qui ont volé l'argent de ce peuple. Il laisse croire aux gens que la Tunisie est riche, mais fortement gangrenée. Il se positionne en sauveur qui va rétablir la justice et redonner au peuple ses trésors volés. Hier, devant les hauts cadres sécuritaires, il s'est élevé contre ceux qui vont dans les restaurants chics et les hôtels cinq étoiles pour se réunir et manger à coups de millions, pendant qu'une médecin bac+11 ne gagne que 1800 dinars par mois.
Le discours de clivage et de conspiration fait mouche et plait au petit peuple. C'est plus facile à croire que les explications complexes des experts et de l'élite. « Ils se disent experts, mais ils ne sont experts en rien », a déclaré hier le président.
Son clivage ne touche pas uniquement les riches et les pauvres, il touche aussi les structures de la justice et son fonctionnement. En épinglant le parquet, il laisse entendre que celui-ci ne travaille pas pour la bonne justice et continue à travailler pour la mafia. Il a aussi épinglé le respect des procédures qui, si on comprend bien ce qu'il dit, sont secondaires par rapport aux faits et qu'elles doivent être là pour servir les justiciables et non pour se dérober de la justice. Ici aussi, le président fait mouche et réussit à convaincre aussi bien les petites gens que des personnes en apparence sensées avec des statuts sociaux élevés.

Que le président gagne en popularité après certaines de ses sorties médiatiques et/ou ses bains de foule, ceci est un fait indéniable. C'était a priori le cas de ses sorties du mardi 14 février.
N'empêche, Kaïs Saïed a beau gagner en popularité, auprès de la masse populaire, il ne gagne pas en crédibilité si on analyse de près ses propos. Le populisme est souvent gagnant, mais toujours pour une période limitée dans le temps. La vérité finit toujours par remonter à la surface.
Parmi les points évoqués par le président et où il lui est difficile d'être crédible, la question des pénuries de sucre et de café. Il a beau convaincre la foule devant lui, il est important de noter que l'importation de ces deux denrées est exclusive à l'Etat. S'il y a une faillite quelque part, ce n'est pas la faute aux mafias, mais à ses propres services. En réalité, si l'Etat a des problèmes d'importation de sucre, de médicaments et de café, c'est parce que tout simplement il n'a pas d'argent. Bien sûr, le président a occulté ce détail.
S'agissant des circuits de distribution qui affament le peuple, le président omet un détail important dont il est directement responsable. Il a pondu un décret-loi qui punit jusqu'à vingt ans de prison les spéculateurs et a ordonné des descentes dans les entrepôts. Ceci a causé une énorme perturbation dans les circuits de distribution et plusieurs grossistes refusent désormais de stocker des marchandises pour réguler le marché, de crainte d'être considérés comme spéculateurs.

S'agissant des arrestations du week-end, le président mélange sciemment les torchons et les serviettes. Les arrestations n'ont rien à voir les unes avec les autres. Quel est le rapport de Noureddine Boutar, interrogé sur la ligne éditoriale de sa radio Mosaïque, avec le complot visant son assassinat ? Idem pour les deux magistrats Béchir Akremi et Taïeb Rached arrêtés un dimanche soir ?
À propos de l'hypothétique tentative d'assassinat de l'hypothétique complot contre l'Etat, Kaïs Saïed semble épingler les deux lobbyistes notoires Kamel Letaïef et Khayam Turki. On voudrait bien le croire, mais il faut qu'il présente au public des faits tangibles pour étayer ses propos. Quelle est la nature de ce complot ou de ce projet d'assassinat, ont-ils recruté des snipers ou des mercenaires, ont-ils préparé un putsch avec la complicité de hauts cadres sécuritaires et/ou de l'armée ?
Outre l'absence de ces faits tangibles, on doit écouter la version des deux parties avant de se faire une idée. Or MM. Letaïef et Turki sont empêchés, jusqu'à aujourd'hui, de tout contact avec le monde extérieur, y compris leurs avocats. Leurs droits de se défendre sont bafoués, sous prétexte qu'ils sont traduits sur la base de la loi anti-terroriste. À défaut de pouvoir entendre les deux parties, il est difficile de croire une seule version.
Après avoir bafoué la question du respect des procédures, le président de la République a bafoué, hier, un autre principe fondamental de la justice, celui de la présomption d'innocence. En entrant au ministère de l'Intérieur, il a déclaré que les personnes arrêtées le week-end sont des terroristes et des criminels.
Qu'un citoyen lambda dise cela, ça passe, mais quelqu'un mû par les principes de justice ne dirait jamais ça. Encore moins un juriste, encore moins un enseignant de droit, encore moins un président de la République. La présomption d'innocence prévaut sur tout ! Les personnes arrêtées ce week-end sont suspectes, prévenues, mais en aucun cas terroristes et criminelles.

En violant des principes de droit et en s'érigeant à la place des juges, Kaïs Saïed se discrédite. Pas auprès de la masse populaire, soit, mais il se discrédite au moins devant ceux qui croient en une justice indépendante et aveugle.
Dernier point à noter et qui discrédite le président, la question du complot contre l'Etat. Tout comme la question de son assassinat, ce n'est pas la première fois qu'il dise ça. De l'enveloppe et le pain empoisonnés au tunnel de la Marsa, il n'y a jamais eu de suite à ces histoires de complot. « À trop crier au loup, on finit par ne plus y croire », dit le dicton.
Parmi les personnes arrêtées, il y a plusieurs qui font de la politique et qui sont ouvertement opposées au président. Or s'opposer au président et travailler à sa succession n'a rien d'un complot contre l'Etat, quoiqu'il pense et qu'il dise. Le chef de l'Etat se prend pour l'Etat lui-même et ceci est une véritable intoxication. Elle marchera un temps auprès d'un large pan du peuple, mais elle ne pourra pas marcher tout le temps. Tôt ou tard, ceux qui l'acclamaient hier viendront lui demander des comptes.


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