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Fitch Ratings : les experts unanimes, il n'y a pas lieu de crier victoire
Publié dans Business News le 17 - 09 - 2024

Fitch Ratings a relevé, le 16 septembre 2024, la note de défaut émetteur (IDR) à long terme en devises étrangères de la Tunisie à "CCC+", contre "CCC-" auparavant. Cette décision a suscité diverses réactions. Les soutiens du pouvoir en place l'ont qualifié d'accomplissements et de signe démontrant que la Tunisie était sur le bon chemin. Or, il semblerait que les experts en économie aient un tout autre avis.

L'annonce a fait grand bruit surtout chez les partisans du régime. Pourtant, quelques mois auparavant, lorsque la note de la Tunisie avait été revue à la baisse, ces personnes n'ont pas hésité à dénoncer un complot. Reprenant la phrase présidentielle au sens péjoratif « Ommek Sanefa », ces disciples du processus du 25-Juillet avaient répété qu'ils ne reconnaissaient pas les agences de notation.
Ainsi, les expressions de joie et les fanfaronnades constatées après la nouvelle notation ont de quoi étonner. Des centaines de publications ont présenté la chose comme une réalisation économique de premier ordre. La récupération politique dans le contexte de la campagne présidentielle n'a pas attendu, faisant du candidat-président un sauveur de l'économie nationale. Les analyses tronquées et les approximations ont rapidement envahi la toile faisant croire à l'opinion publique qu'un grand accomplissement a été réalisé.
Si dans l'absolu, on ne peut que se réjouir que son pays ait enregistré une évolution, les faits sont là pour démontrer une autre réalité. Après cette vague d'enthousiasme, les experts ont tenté de démystifier certains points.

L'économiste et analyste financier Moez Hadidane a indiqué que malgré la révision à la hausse de la notation de souveraineté de la Tunisie par l'agence Fitch Ratings, le pays faisait encore partie de ceux appartenant à la catégorie « CCC », soit les pays à risque élevé.
Moez Hadidane a expliqué que la révision de la note de la Tunisie de CCC- à CCC+ était liée à plusieurs facteurs, dont l'obtention de certains appuis budgétaires et la stabilisation des réserves en devises. Il a expliqué que certaines institutions financières ne comptaient pas appuyer financièrement la Tunisie, mais avaient changé, par la suite, de position.
« La Tunisie a reçu des promesses de financement à hauteur de 8,2 milliards de dollars durant les huit premiers mois de l'année… L'agence prévoit un financement supplémentaire de 600 millions de dollars supplémentaires pour un financement total de 3,4 milliards de dollars pour le reste de l'année », a-t-il ajouté.
Moez Hadidane a rappelé que la notation de souveraineté demeurait insatisfaisante, mais que son amélioration était un bon signe. Ceci signifie que l'agence Fitch Ratings a constaté une amélioration de la situation en Tunisie. Selon lui, le pays remonte la pente, néanmoins, il reste au fond du creux. Il a, également, précisé que la révision de la notation de la Tunisie n'avait pas d'impact à l'échelle interne.

Le professeur universitaire et ancien conseiller économique à la présidence du gouvernement, Ridha Chkoundali a, de son côté, rappelé que ces notations étaient destinées avant tout aux institutions financières, aux prêteurs et aux investisseurs étrangers. Il a considéré que l'amélioration de la notation était un bon signe tout en rappelant que la Tunisie faisait encore partie de la liste des pays classés dans la catégorie « CCC ».
« Ainsi, nous ne pouvons pas, avec l'amélioration de la notation, nous orienter vers le marché financier international », a-t-il écrit sur son profil Facebook à la date du 17 septembre 2024.
Selon Ridha Chkoundali, le passage de « CCC- » à « CCC+ » résultait de l'amélioration des réserves en devises, du respect par la Tunisie de ses engagements étrangers et de l'amélioration de la balance commerciale. Il a salué le gouvernement pour ces réalisations, mais a évoqué le coût économique des mesures ayant permis cela. Il a évoqué une pénurie touchant les produits de base et les médicaments, une récession économique, une hausse des prix et une propagation du chômage.
Ridha Chkoundali a expliqué que l'amélioration de la balance commerciale par la baisse des importations de matières premières causant ainsi une perturbation de la production. Ceci empêcherait l'amélioration du taux de croissance économique et la lutte contre l'inflation et le chômage.
« Le citoyen tunisien est celui qui paie la facture… Ce qui importe pour les institutions étrangères, dont l'agence Fitch Ratings, est la capacité à rembourser. Ces institutions œuvrent pour le service des prêteurs, notamment du secteur privé, et ne se soucient pas de l'impact sur le citoyen tunisien… En août, ces agences ont émis une notation concernant les banques tunisiennes en raison des revenus importants enregistrés durant les dernières années… Nos banques prêtent essentiellement à l'Etat avec zéro risque au lieu de prêter aux institutions économiques (et prendre des risques) et ont amélioré leur notation au détriment de l'économie réelle », a-t-il ajouté.
Ridha Chkoundali a affirmé que qualifier l'amélioration de la notation de la Tunisie reprenait, en réalité, le discours et les attentes du Fonds monétaire international (FMI). Il a considéré que les autorités nationales devaient, donc, s'orienter vers le FMI pour obtenir des prêts au lieu de se contenter de répondre à ses attentes. Il a appelé à l'adoption d'un discours orienté vers le citoyen tunisien se souciant avant tout de la préservation de son emploi, de l'amélioration de son pouvoir d'achat et de la garantie d'un un avenir stable pour ses enfants. « Il ne s'intéresse pas à l'amélioration des équilibres internes ou externes ni à la capacité de l'Etat à rembourser ses dettes… Lorsque les indicateurs de l'économie réelle, tels que la croissance économique, le contrôle des prix et la création d'emplois, s'amélioreront, tous les indicateurs financiers mentionnés par l'agence pour améliorer la notation de la Tunisie suivront cette tendance également », a-t-il conclu.

Quant à l'ancien député et expert-comptable, Hichem Ajbouni, il a assuré qu'il n'y avait pas une grande différence entre les notations « CCC- » et « CCC+ ». La Tunisie demeure dans la catégorie des pays à haut risque de défaut de paiement. Ceci rend la possibilité d'emprunter sur le marché international quasi-impossible. Il a rappelé que le taux de croissance enregistré en 2023 était proche du 0% et que l'Etat comptait contracter un prêt auprès de l'Afreximbank avec un taux d'intérêt de plus de 10%.
« Le déficit budgétaire en 2023 était égal à 12,3 milliards de dinars. En 2024, il s'agit de 11,5 milliards de dinars. Il s'agit d'un déficit important et nécessitant d'importants emprunts. En 2024, le total des prêts représente 36% du budget. Il s'agit d'un chiffre record… En 2023, le taux d'épargne représentait de 8,4% du PIB et l'investissement à hauteur de 16% du PIB. Ces faibles chiffres expliquent le faible taux de croissance… Même la baisse du déficit commercial résulte a eu lieu, en grande partie, au détriment des marchandises destinées à l'investissement et des matières premières et semi-industrielles… La relance de l'économie est tributaire de l'investissement lié à la consommation et à l'export », a-t-il écrit sur son profil Facebook.
Hichem Ajbouni a assuré que la légère amélioration de la notation de l'agence Fitch Ratings de la Tunisie résultait de la stabilité des réserves en devises permettant à la Tunisie d'honorer ses engagements étrangers. Ces réserves ont été consolidées grâce aux revenus record des exportations d'huile d'olive et du tourisme. Il a, également, mentionné la hausse des transferts des Tunisiens à l'étranger visant, d'après lui, à soutenir leurs familles présentes en Tunisie. L'ancien député a considéré qu'honorer ses engagements étrangers n'était pas un accomplissement.

Le docteur en sciences économiques, enseignant-chercheur à l'Université de Carthage et expert, Aram Belhadj s'est, également, intéressé à la nouvelle notation de la Tunisie. Il a, lui aussi, expliqué que le passage de la notation de la Tunisie de « CCC- » à « CCC+ » était lié à la stabilité des réserves en devises. Il a considéré que la Tunisie pourra honorer ses engagements au titre des années 2024 et 2025 et qu'elle continuera à bénéficier d'un soutien étranger malgré l'absence d'un accord avec le FMI.
« Je pense que les banques (notamment publiques) ont la possibilité de répondre aux besoins de l'Etat en matière de financement… Il y aura une baisse graduelle du déficit budgétaire, notamment en vue du maintien de la baisse de la masse salariale et de la rationalisation des dépenses… Il n'y aura pas de mouvements sociaux et le président sortant réussira à se faire réélire… Pourquoi avons-nous été maintenus dans la catégorie "CCC" ? Parce que les besoins de financement sont encore importants et qu'il y a encore des difficultés d'accès au marché financier international… Parce que le déficit budgétaire reste considérablement important », a-t-il écrit sur son profil Facebook.
Aram Belhadj a estimé que la Tunisie fera appel à un financement direct du budget par la Banque centrale de Tunisie. Il a évoqué le poids de la dette publique. Il a, également, considéré que l'Etat était fragile, que la stabilité politique n'était pas garantie et que la Tunisie faisait encore face à de la corruption.

Pour conclure, il semble que tous les experts soient d'accord au sujet de trois principaux éléments. En premier lieu, la note de Fitch Ratings ne signifie pas que la situation du citoyen tunisien s'est améliorée. En deuxième lieu, la note est passée de « CCC- » à « CCC+ » en raison de la stabilité des réserves en devises et de la baisse des exportations. En troisième lieu, la Tunisie n'a toujours pas entamé les mesures nécessaires à la relance de l'économie et de l'investissement.


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