L'expert en climat et ressources en eau, Houcine Rhili, est intervenu lundi 5 mai 2025 aux côtés de Hatem Ben Amara sur les ondes de Jawhara FM, pour livrer un état des lieux contrasté de la situation hydrique du pays. Houcine Rhili a assuré que si les dernières pluies ont permis d'améliorer sensiblement le niveau des barrages. Toutefois, les contraintes techniques, les retards d'investissement et la dépendance énergétique pèsent encore lourdement sur le secteur de l'eau. « Pour la première fois depuis plus de trois ans, nous avons franchi la barre des 900 millions de mètres cubes d'eau dans les barrages », a-t-il indiqué. À la date du 2 mai, les réserves atteignaient 914 millions de mètres cubes, soit un taux de remplissage de 38,6 %, dépassant pour la première fois la moyenne des trois dernières années, estimée à 870 millions de m³. « Ce n'est pas un bond spectaculaire, mais c'est une évolution rassurante », a-t-il précisé. Les précipitations abondantes de ces derniers mois, notamment sur le Sahel, le Cap Bon et le Sud-Est, ont joué un rôle clé. « Dans certaines régions, on a enregistré jusqu'à 160 % des précipitations normales », a expliqué Houcine Rhili. Ce surplus a non seulement augmenté les réserves hydriques, mais devrait également bénéficier aux cultures pluviales. Selon l'expert, cela augure d'un bon rendement agricole cette année, ce qui pourrait même soutenir la croissance économique, malgré d'autres indicateurs en baisse. Cette amélioration permettrait d'aborder l'été avec « moins de pression » sur l'approvisionnement en eau potable et pour l'irrigation, et la situation devrait être meilleure cette année. Cependant, l'expert a souligné que de nombreuses interruptions d'eau ne sont pas directement liées au manque de ressources, mais à des défaillances structurelles : travaux de maintenance mal planifiés, pannes, problèmes d'électricité, etc. « Il faut absolument que la Sonede tire les leçons des années précédentes et évite de programmer les travaux de maintenance au moment de la pointe estivale », a-t-il insisté. Interrogé sur le recours à la désalinisation, Houcine Rhili s'est montré prudent : « Ce n'est pas la solution miracle. L'eau dessalée coûte cher et consomme énormément d'énergie. » À titre d'exemple, le mètre cube coûte 3,5 dinars à Sfax. Pour lui, avant de généraliser cette technique, il faudrait améliorer la maintenance des réseaux existants, investir dans la réutilisation des eaux usées et développer les barrages dans les zones aujourd'hui négligées. Il a également pointé les retards dans la mise en service de la station de dessalement de Sousse, initialement prévue pour décembre dernier : « Nous n'avons encore rien vu. Même les essais techniques n'ont pas commencé. » Enfin, Houcine Rhili a plaidé pour une refonte en profondeur de la politique de l'eau : diversification des sources, investissements publics massifs, planification à long terme face au changement climatique. « La gestion de l'eau ne peut plus reposer sur l'urgence permanente. Il faut anticiper. »