L'ancien ministre Faouzi Ben Abderrahman a réagi, samedi 6 septembre 2025, à la polémique suscitée par une proposition de loi déposée au Sénat américain concernant la situation en Tunisie. Dans un long statut publié sur les réseaux sociaux, il a tenu à relativiser la portée de cette initiative, qu'il qualifie de « tempête dans une tasse de thé ». Selon Ben Abderrahman, quatre sénateurs, issus du camp minoritaire, ont présenté depuis le 26 juin 2025 une résolution (n°310) à la commission des relations étrangères du Sénat. Intitulée « Reconnaître le leadership de la Tunisie dans le printemps arabe et exprimer son soutien à l'attachement aux principes et traditions démocratiques », cette résolution reprend en grande partie un texte similaire (n°260) déjà déposé en juin 2023, sans avoir été adopté. « Ses chances de passer sont infimes, à peine 4 % selon des sites spécialisés comme Govtrack.us », souligne-t-il, précisant que la nature du texte, l'identité de ses porteurs et le contexte politique américain jouent tous contre son adoption. Même en cas d'adoption hypothétique, l'ancien ministre rappelle que le président américain dispose de la latitude de ne pas valider la résolution, sauf si elle recueille une majorité des deux tiers au Sénat. Une éventualité qu'il juge « impossible dans la conjoncture actuelle », à moins d'une volonté politique explicite de la Maison Blanche et d'un soutien bipartisan, ce qui est loin d'être le cas.
Faouzi Ben Abderrahman a également profité de son intervention pour pointer du doigt ce qu'il appelle « l'attitude constante des Etats-Unis à s'arroger le droit de juger la situation interne d'autres pays, en se posant en gendarme du monde ». Une posture qui, selon lui, s'accompagne d'un mépris récurrent pour la légalité internationale et les institutions onusiennes. L'ancien ministre a par ailleurs rappelé une contradiction : « On ne peut pas applaudir quand les membres du Congrès se lèvent pour ovationner le peuple tunisien en janvier 2011, puis rejeter toute critique aujourd'hui sous prétexte d'ingérence ». Pour lui, l'éloge comme le reproche constituent deux formes d'ingérence et doivent être traités avec la même cohérence.
Au-delà de la polémique, Faouzi Ben Abderrahman estime que le problème majeur n'est pas ce qui se passe à Washington mais bien à Tunis. Il invite à poser les vraies questions : « Pourquoi avoir accepté si facilement le recul démocratique ? Pourquoi tolérer une Constitution rédigée par une seule personne ? Pourquoi brader les libertés fondamentales et soumettre la justice ? Pourquoi renouer avec la peur et l'extorsion politique ? » Pour lui, « la véritable souveraineté consiste à ouvrir un débat franc entre Tunisiens, sans diabolisation, autour des enjeux démocratiques ». Et de conclure : « Quand le front intérieur est uni, même dans la différence, aucune puissance étrangère n'ose critiquer ou dénigrer ».