Tout change dans le métier. Désormais, il est établi que pour être un bon journaliste, il faut savoir faire usage de ses godasses. A la poubelle, plumes, stylos et claviers. Chers confrères, si vous aspirez à la postérité, ne regardez pas plus loin que le bout de vos pieds. Vous y trouverez des babouches, criez : "A bas Bush", lancez-les et vous voici à la Une. C'est ce qu'on appelle couvrir un événement organisé en grandes pompes. Et la couverture fut excellente. Une paire de chaussures et on a réussi à séduire tout un public. Pour un coup de maître, c'en est un. Nullement évident de satisfaire autant de monde avec si peu de moyens, surtout qu'on a changé son arme à la dernière minute. Hubert Beuve-Méry, Françoise Giroud, Joseph Pulitzer et Hédi Lâabidi peuvent se retourner dans leur tombe. ****** La crise est là. L'année 2009 risque d'être dure. Voire très dure. Nos unes (notamment de la presse arabophone) sont consacrées aux chaussures. C'est plus porteur que de parler de crise. Passons. Un plan d'action est nécessaire et inévitable pour faire face à cette crise. A la lumière de ce qu'a déclaré le Premier ministre, lors de sa rencontre informelle avec la presse samedi dernier, ce plan d'action est là et le gouvernement table, pour 2009, sur une croissance de 5% ! Alors que plusieurs pays européens sont déjà entrés en récession (ou enregistrent une croissance inférieure à 1%), la petite Tunisie se targue d'avoir réalisé 5% de croissance en 2008 et ambitionne d'en faire autant en 2009. Pour atteindre cet objectif et réussir à faire de cette crise un terreau d'opportunités, il suffit de voir plus loin que le bout de ses chaussures. Pas évident quand tout un peuple se retrouve. ****** Le prix du pétrole a continué à chuter. Les pays de l'OPEP ont paniqué et se sont réunis pour décider de réduire leur production. La production fut réduite, mais les prix n'ont pas grimpé pour autant. Ce qu'il faudrait pour augmenter les prix, c'est une bonne guerre, comme seul Bush sait en faire. Les pays pétroliers le savent. Ce n'est d'ailleurs pas pour rien que certains d'entre eux ont financé une partie des guerres bushistes. Certains n'ont pas compris et ont cru bien faire en s'attaquant au Bush le "bienfaiteur" avec des chaussures. La prison les aidera à mieux comprendre. Et qu'on ne parle surtout plus de liberté d'expression ! Nul n'a le droit de s'exprimer avec des chaussures. ****** Un ex diplomate tunisien a été condamné la semaine dernière par la justice française. Par contumace et sans preuve aucune. Agences de presse et médias hexagonaux se sont empressés de relayer l'information. On appelle ça liberté d'expression. La même semaine, la même justice française a relaxé deux policiers à l'origine d'une interpellation musclée du jeune tuniso-français de 22 ans, Abdelhakim Ajimi. C'était, rappelez-vous, en mai dernier à Grasse. Selon le rapport d'autopsie, Ajimi est mort par « asphyxie mécanique liée à un phénomène de compression thoracique et à un mécanisme de compression du cou ». On ne peut plus clair ! La justice française voit les choses autrement et décide de ne pas mettre en examen les deux policiers, considérés désormais comme des témoins assistés. Point de bavure policière ! Cette histoire, presse et médias français ont préféré ne pas en parler. On appelle ça, la liberté de ne pas s'exprimer. Ou plutôt... quand on ne voit pas plus loin que ses chaussures ! N.B.