Depuis deux mois et demi, le Tout-Tunis économico-politique ne parle que de cela. Et depuis deux mois et demi, le Tout-Tunis économico-politique n'attend que cela. Le Tout-Tunis économico-politique parle à mezza voce et quand on lui demande à haute voix ce qu'il attend, le Tout-Tunis économico-politique répond qu'il continue à travailler normalement, nie catégoriquement que tout est en stand by et affirme qu'il n'attend absolument rien. Personne n'a publiquement « osé » rompre le silence et dire tout haut ce que le Tout-Tunis économico-politique prononce tout bas. Personne n'a osé rompre le silence, à l'exception d'un seul : Assabah, le quotidien arabophone de Mohamed Sakher El Materi. A deux reprises, via la plume de son rédacteur en chef, Sabri Braham, Assabah a invité, mardi et samedi derniers le Tout-Tunis économico-politique, à continuer à travailler et à ne pas attendre ce remaniement qui tarde à venir. Le mot est dit, le message est transmis. Sabri Braham n'est plus ce journaliste francophone que ses confrères (et ses amis) connaissent, mais le rédacteur en chef du premier quotidien arabophone du pays. Et ce premier quotidien arabophone du pays, avec sa nouvelle maquette toute moderne, n'appartient pas à n'importe qui, mais à un jeune homme d'affaires, gendre du Président de la République, membre du comité central du RCD, le plus grand parti de la Tunisie, et député élu du peuple. Le mot est dit, le message est transmis, que le Tout-Tunis économico-politique continue à travailler ! C'est Assabah qui le dit. Il y a un point commun qui relie 100% des Tunisiens. Ce n'est ni le sentiment d'arabité, ni l'islam, mais le respect du père. Dans nos traditions méditerranéennes millénaires ancestrales, le père occupe une très grande place dans la famille. Enfants, nous lui obéissions aveuglément. Adolescents, pour les plus philosophes d'entre-nous, nous essayions de le "tuer". Adultes nous lui vouons le plus grand des respects osant, rarement, lui dire non et remettre en doute ses choix. Ses désirs sont des ordres et ses conseils sont des directives. C'est toute une culture que certains d'entre-nous essaient (à tort ou à raison, mais toujours en vain) de remettre en question. Dans une nation comme la nôtre, indépendante depuis 54 ans, le chef de l'Etat a toujours occupé la place du père. On peut user de tous les discours modernistes et démocratiques que l'on veut, l'inconscient populaire considère le chef de l'Etat comme le Chef avant et d'abord. C'est tout un esprit que certains d'entre-nous essaient de combattre, à tort ou à raison, mais toujours en vain. L'idée a toujours été présente dans l'inconscient populaire. Et si le Chef ne dit rien, c'est que tout se poursuit comme avant. Jusqu'à quand ? Jusqu'à nouvel ordre. Sauf qu'il y a un mais qui n'est stipulé ni par les lois, ni par la Constitution. Ce mais est stipulé par les traditions et les us de la politique. Et ces us veulent qu'un remaniement ait lieu au lendemain d'une élection, surtout lorsqu'il y a parmi les membres du gouvernement un ministre par intérim qu'on aimerait bien voir confirmé. Or, dans le cas présent, la tradition n'a pas été observée (ou plutôt pas encore) ce qui a alimenté toutes sortes de rumeurs et de surenchères chez le Tout-Tunis économico-politique. Que répondre face à cela ? Rien, à part que le chef de l'Etat continue à faire confiance aux membres actuels de son gouvernement et ne joue pas aux simples mouvements de chaises. Rien, à part que la tradition d'une nation ne saurait primer sur ses intérêts supérieurs dont le timing est imposé par la crise économique mondiale et la conjoncture nationale et internationale. Ailleurs, le chef de l'Etat pense prioritairement aux intérêts de son parti et à sa réélection. Chez nous, à l'instar du père qui ne pense qu'aux intérêts de ses enfants, la tradition veut que le Chef ne pense qu'aux intérêts de sa nation. On le saura désormais, un remaniement n'obéit pas à un calendrier électoral, mais à un timing et des considérations bien supérieures qu'une simple tradition. Ce remaniement viendra. Quand ? Dans les prochaines heures, dans les prochains jours, dans les prochaines semaines, il viendra ! Il viendra quand il le faudra et non quand le calendrier l'imposera ! Au Tout-Tunis économico-politique, qui n'a pas ou ne veut pas saisir cette réalité, Assabah est venu la lui rappeler. Dont acte.