« Nicolas Sarkozy est un visionnaire ». Nadine Morano, ministre française chargée de l'Apprentissage et de la Formation professionnelle et surnommé par certains en France « la castafiore de Sarkozy» ou encore « la pasionaria sarkozyste » n'a pas manqué à sa réputation lors du déjeuner de presse organisé mardi 24 mai 2011 à la résidence de l'ambassadeur de France en Tunisie. Dixième ministre français en visite officielle depuis la révolution du 14 janvier, Nadine Morano a défendu âprement son président. Elle ne s'est pas contentée de rappeler, comme ses collègues du gouvernement, les rapports étroits, les intérêts qui unissent les deux pays, mais a, également, insisté sur la feuille de route dessinée et impulsée par le président français lui-même pour permettre à la Tunisie de réussir sa transition démocratique. La ministre est revenue sur l'objet de sa présence à savoir le dispositif de financement de la formation professionnelle pour de jeunes tunisiens issus de régions défavorisées, ses rencontres avec son vis-à-vis tunisien, les membres du gouvernement transitoire, les représentants de la société civile. Elle a évoqué, également, le problème des migrants clandestins dont 3000 ont, déjà, été reconduits en Tunisie, la présence de la Tunisie au G8, la saison touristique et l'avenir de ce secteur. L'ile de Lampedusa a accaparé l'intérêt des médias occultant les vrais problèmes auxquels font face les Tunisiens et les enjeux réels (renforcement de la société civile, des contre-pouvoirs…). Mais ce qu'a apporté concrètement l'affaire Lampedusa c'est le malaise de certains et leur aspiration à une vie meilleure, une vie meilleure utopique si on se trouve obligé de quitter son pays, considère Nadine Morano. D'où toutes les actions et les mesures entreprises par le gouvernement français, sous l'impulsion de Nicolas Sarkozy, rappelle-t-elle encore une fois. Des mesures concrètes, estime-t-elle, appelant à un suivi transparent des chantiers en cours. Une mesure concrète tel le déblocage de 350 millions d'euros par l'AFD et dont 185 millions d'euros ont déjà été décaissés. L'affaire Alliot-Marie et le manque de réactivité de la diplomatie française au moment où la tension était à son comble, est revenue, encore une fois, sur le tapis. Les propos de Michèle Alliot-Marie ont été dénaturés, des déclarations dont le but était de sauver des vies et non de soutenir le régime en place, se défend Mme Morano. Je défendrais Michèle Alliot-Marie « becs et ongles », enchaine-t-elle. 300 morts selon certaines estimations est le bilan de la révolution tunisienne alors que la France subit constamment des mouvements de contestations dont certains très délicats tel celui contre CPE sans faire de victimes. Le savoir-faire sécuritaire français c'est ça, explique la ministre, et la France est disposée à mettre son expertise pour permettre à la police tunisienne de changer ses approches, une demande très largement ressentie lors de ses rencontres avec des Tunisiens, précise-t-elle. Les rapports entre la France et le régime de Ben Ali n'étaient pas au beau fixe contrairement aux apparences. Ben Ali a toujours fait preuve de méfiance envers la France, a tenu à préciser Boris Boillon. « Et s'il existait des Wikileaks à la française, tout le monde se serait aperçu que l'évaluation de la situation faite par les diplomates français était plus sévère que celle de leurs homologues américains, notre système marche, on s'est pas fait wikileasé, ajoute ironiquement l'ambassadeur. «On s'est fait berner oui, on a été surpris par l'enchaînement rapide des événements » concède-t-elle, mais comme tout le monde et on en a profité pour tirer les conséquences qui s'imposent : « désormais on ne peut plus tout faire en considérant l'unique spectre de la stabilité », conclut Boris Boillon. Radhouane Somai