Kofi Annan a dit : « La seule voie qui offre quelque espoir d'un avenir meilleur pour toute l'humanité est celle de la coopération et du partenariat.» Peut-on alors croire qu'un avenir meilleur pour l'économie tunisienne se profilerait dans l'alliance avec des partenaires de la communauté internationale ? Parce que depuis la révolution du 14 janvier, la Tunisie s'est trouvé un joli cercle d'amis : tous veulent lui tendre la perche, car les dégâts, notamment, d'ordre économique, sont énormes et pernicieux. Ces mains tendues constituent, nous en convenons, devraient être saisies sans trop tarder. Seulement voilà, une question nous taraudera toujours l'esprit : quel réel intérêt y a-t-il derrière cette troublante générosité ? Outre la nécessité d'encourager ledit partenariat au niveau bilatéral et multilatéral, il est primordial d'avoir des relations de confiance avec la Banque Mondiale et le Fonds mondial internationale (FMI), deux principales institutions financières incontournables qui jouent un rôle central dans le processus de soutien et de revitalisation du tissu économique des pays du monde entier, même les plus développés d'entre eux. Pays vedette sur la scène politique internationale, la Tunisie doit réussir, également et surtout, sur le plan économique, d'où l'intérêt particulier qui lui est accordé par les experts le FMI. C'est donc à cet effet que la Banque Centrale de Tunisie (BCT), représenté par son gouverneur, Chedly Ayari, a organisé, mercredi 14 novembre 2012 à son siège et conjointement avec le FMI, représenté par David Lipton premier directeur adjoint, une conférence, au cours de laquelle il était question d'un tour d'horizon des perspectives de la croissance de l'économie mondiale, de la région MENA (Moyen-Orient et Afrique du Nord) et, bien entendu, de la Tunisie. Chedly Ayari, s'exprimant sur la relation bilatérale engageant la Tunisie et le FMI, a précisé que : « le partenariat est aujourd'hui plus puissant que jamais ». Cet « aveu » a été appuyé par David Lipton qui a tenu à souligner à ce propos : « bien que nous n'ayons pas de solutions prêtes pour remédier aux nombreux problèmes entravant la bonne marche de économie tunisienne, durant cette phase de transition, nous devons, tout de même, travailler de concert avec plusieurs autres partenaires pour y faire face. » La franchise de M. Lipton est, sans aucun doute, à saluer dans le sens où s'il y a bien un point fiévreux accablant l'économie nationale et tout le pays, c'est justement ce manque voire l'absence de solutions concrètes et prêtes à être appliquées. Car les leçons en matière de politique économique et de processus de restructuration, notamment, sont classées pêle-mêle et se trouvent encore au stade de la théorie, certes bien belle et jolie, mais sans la moindre utilité ou efficacité. En revanche, David Lipton a déclaré que le FMI est prêt a s'engager envers la Tunisie sur le plan d'assistance financière afin de satisfaire les besoins de haute priorité afin de conforter les marges de manœuvre nécessaires. L'objectif étant d'éviter les ricochets d'une dégradation de la conjoncture internationale. Et, selon M. Lipton, cela dépendra du gouvernement qui devrait donner son aval aux opérateurs de l'institution, dans ce sens. A ce titre, ces derniers sont, actuellement, en pleins pourparlers avec les autorités compétentes tunisiennes à travers les visites périodiques, les missions d'assistance techniques concernant les questions financières et budgétaires, ainsi que les travaux d'actualisation de l'évaluation du secteur financier, la Banque Mondiale ayant, même, pris part à cette collaboration. Affichant une bonne volonté de bien faire et un optimisme à envier, Chedly Ayari, évoquant la conjoncture économique nationale, a souligné que « 22 mois après le déclenchement de la révolution, le processus d'évolution de l'économie tunisienne, tout en étant vacillant, demeure prometteur ». En effet, tout porte à croire que ce processus est en train de dépasser le stade de la récession et ce, à l'issue de l'identification de la batterie des risques baissiers. Aussi, importe-il de mettre l'accent sur la nécessité d'appliquer des réformes, devenues indispensables, à savoir : une manœuvre substantielle qui permettra l'affranchissement des difficultés et obstacles entravant le processus de relance. Ce dernier, pourrait, selon le gouverneur de la Banque Centrale de Tunisie, être redynamisé grâce au développement du partenariat public/privé. Par ailleurs, David Lipton a mis en vedette l'engagement de réformes propres qui seront à même de promouvoir une croissance consistante capable de contribuer à la création de milliers d'emplois pour absorber un chômage chronique. Et pour rejoindre le raisonnement de M. Ayari, M. Lipton met les insiste sur l'apport du secteur privé affirmant qu'il est inéluctable qu'il retrouve son dynamisme, rehausse le niveau de sa productivité et investisse davantage. Aussi, est-il impératif, selon le responsable du FMI, de conforter l'intégration commerciale, d'améliorer le fonctionnement du marché du travail, de mettre au point des conditions optimales et équitables pour l'ensemble des investisseurs avec un climat d'affaires sain, tout en simplifiant l'accès au financement, et ce, eu égard au rôle du secteur privé dans l'alimentation d'une croissance énergique, durable et génératrice d'emplois. Et à David Lipton de mettre un bémol à cet élan frisant l'optimisme béat en mettant l'accent sur les difficultés rencontrées par la croissance économique à travers le monde avec des prévisions à tendance baissière, engendrée par la perturbation de la situation fiscale aux Etats-Unis d'Amérique et la crise de la Zone Euro. S'ajoute à cela, l'envolée des prix internationaux des denrées alimentaires ainsi que ceux du pétrole, sans omettre le conflit en Syrie qui fait planer des incertitudes qui pèsent, déjà, sur l'avenir politique, économique et social dans la région MENA et, par voie de conséquence, sur celui de la Tunisie. A noter, par ailleurs, que la rencontre Banque Centrale- FMI a eu le mérite de lever le voile sur les intentions d'assistance et de partenariat de l'institution de Washington et sur les besoins urgents de l'économie nationale. Toutefois, ce qui fait inquiéter les spécialistes est que l'on demeure encore au stade des constats alarmistes ; que l'on dépeigne encore un profil neurasthénique du paysage économique de la Tunisie. Il est évident que l'économie nationale se trouve toujours dans la zone de tempête, mais maintenant que les ennuis sont identifiés, que les propositions sont formulées et que les opérateurs sont disposés à mettre la main à la pâte, on se demande pourquoi les différentes parties prenantes ne se mettent pas à l'œuvre afin de sortir, enfin, de l'auberge, tant qu'il est encore temps.