Le chef du gouvernement, Mehdi Jomâa, est revenu, dans une interview accordée à la TAP mercredi et publiée jeudi 4 septembre 2014, sur plusieurs sujets importants notamment le terrorisme, la sécurité, le syndicat des forces de l'ordre et leurs interventions sur les médias, la neutralité des administrations et des mosquées, l'affaire du renouvellement des permis pétroliers, l'économie et les perspectives du pays. Concernant le dossier de lutte contre le terrorisme, bien que les menaces perdurent, M. Jomâa a mis en relief les efforts des forces de sécurité et de l'armée, soulignant qu'il y a eu 1500 arrestations pendant les 45 derniers jours et que les équipements nécessaires pour la lutte contre le terrorisme sont enfin disponibles et que d'autres sont en route, grâce à la coopération de pays frères et amis. Le chef du gouvernement a rappelé que la guerre contre le terrorisme est une guerre longue et dure qui nécessite la présence d'une doctrine forte et l'acceptation de l'idée de sacrifice. Interrogé sur son opinion face aux critiques de certains, notamment les syndicats des forces de sécurité, des stratégies suivies pour la lutte contre le terrorisme, Mehdi Jomâa a rétorqué que les syndicats ne sont pas créés ni pour critiquer les stratégies sécuritaires dans les médias ni pour divulguer des secrets sécuritaires. Il s'est dit étonné par le comportement de certains syndicalistes qui profitent des médias pour diffuser les secrets sécuritaires et critiquer la méthode de travail des ministères de l'Intérieur ou de la Défense nationale. «Le droit syndical est garanti et les critiques sont tolérées dès qu'elles sont constructives et ne sortent pas hors des murs du ministère», a-t-il noté. M. Jomâa a critiqué les accusations évoquant l'existence d'un système de sécurité parallèle, en soutenant que ces dires ne sont pas bénéfiques mais enveniment la situation, la compliquent, provoquent la sédition et déstabilisent la sécurité du pays, soulignant la nécessité de préserver l'institution sécuritaire. Concernant les manquements qu'on lui reproche dans le dossier de la révision des nominations dans les administrations et les mosquées, le chef du gouvernement a indiqué qu'il n'y prête pas attention et que son gouvernement fait tout pour appliquer la feuille de route, selon les moyens dont-il dispose. «On ne peut pas attendre d'un gouvernement installé depuis 9 mois de traiter du jour au lendemain des problématiques compliquées qui perdurent depuis 3 ans», a-t-il expliqué. Mehdi Jomâa a appelé les politiciens à se sacrifier pour le projet national et à s'éloigner des considérations personnelles et partisanes. Pour lui, le futur de la Tunisie réside dans le consensus, exprimant l'espoir que cela se fonde sur les compétences nationales qui peuvent être les piliers de ce projet. «Nous croyons que la démocratie est fondée sur les partis politiques mais ces derniers doivent apporter un plus et faire leurs preuves, notamment en s'appuyant sur des compétences (…). La Tunisie peut accueillir tout le monde et la politique d'exclusion a prouvé qu'elle était vaine», a soutenu le chef du gouvernement. Concernant le congrès international "investir en Tunisie, Start-up démocratie", M. Jomâa a indiqué que l'objectif principal de cet événement est de rétablir la confiance des investisseurs en la Tunisie en tant que destination prometteuse pour les investissements. Autre point abordé par le chef du gouvernement, il a décidé «de désigner un ministre en tant qu'interlocuteur unique pour chaque gouverneur, en vue de dépasser les difficultés entravant la réalisation des projets dans les régions (…) Chaque ministre travaillera de manière transversale avec tous les autres ministères, pour le déblocage de ces projets. L'objectif escompté est de décentraliser le pouvoir de décision concernant ces projets». Enfin et concernant l'affaire du renouvellement des permis pétroliers, Mehdi Jomâa a déclaré qu'il faut «accélérer l'adoption des lois relatives au secteur énergétique, notamment, celles ayant trait aux permis de recherche des hydrocarbures et à leur prolongation». Il a souligné, dans ce contexte, qu'il faut «tenir ce dossier à l'écart des surenchères politiques et des tiraillements partisans, et tenir compte du seul intérêt national». «Personne n'a le droit de bloquer sous aucun prétexte, les permis pétroliers», a-t-il affirmé, indiquant que «la Tunisie ne peut tolérer la poursuite d'un tel blocage, alors qu'elle est en train de lutter contre la menace terroriste, ce qui nécessite la sécurisation des sources d'approvisionnement», ajoutant que «La non adoption des lois concernant le secteur énergétique, ne sert pas l'intérêt du pays, mais envoie plutôt des signaux négatifs aux investisseurs étrangers et notamment à ceux qui opèrent en Tunisie, surtout si on les accuse de corruption et les qualifie de vampires» M. Jomâa a précisé que ces blocages ont coûté très cher à la Tunisie puisqu'ils ont entraîné une aggravation du déficit, de la balance énergétique, due à la baisse des exportations du pétrole brut (-11%) et la hausse des importations de gaz naturel (+66,9%). En effet, la production de pétrole brut et de gaz naturel a chuté de 15%, ce qui a contribué à une récession des industries non manufacturières (-5,8%), entraînant une régression du taux de croissance à 2% durant le premier trimestre 2014 et à 2,1 % au premier semestre 2014. «Un taux en deçà des espoirs», a-t-il estimé. Autre point, le chef du gouvernement considère que le secteur de l'énergie «est bien réglementé et régi par des lois évoluées organisant les opérations de production, de recherche et d'exploration des hydrocarbures». Il a évoqué, sur un autre plan, les larges perspectives que pourrait ouvrir la loi sur la production de l'électricité à partir des énergies renouvelables, en matière d'impulsion de l'activité économique, à travers le développement de nouveaux créneaux d'investissement et partant, la promotion de l'emploi et de la croissance. Il a précisé que des financements d'une valeur de 100 millions de dinars seront alloués au fonds de transition énergétique, pour inciter les jeunes promoteurs à réaliser des projets dans les énergies renouvelables. S'agissant du projet de prospection du gaz de schiste, Mehdi Jomâa a affirmé que la Tunisie a opté pour ce projet dans sa première phase, à savoir l'étape d'évaluation des ressources. Il a insisté, à ce sujet, sur la nécessité d'adopter «une démarche scientifique qui prend en considération tous les points de vue, concernant ce projet», relevant que toute décision dans ce domaine sera prise loin des tiraillements et en prenant uniquement en considération l'intérêt national. A lire également : Mehdi Jomâa refuse l'idée de sa reconduction à la tête du gouvernement