La Tunisie commémore demain 9 avril la journée des martyrs. Une date qui fait référence aux événements sanglants du 9 avril 1938 lorsque des dizaines de Tunisiens avaient été lâchement tués par les armes de l'occupant. Ce jour-là, des milliers de Tunisiens avaient bravé les mitrailleuses françaises en descendant manifester dans les rues. Ils avaient défilé courageusement devant les policiers, les gendarmes et les zouaves du protectorat français réclamant haut et fort un parlement tunisien. Des décennies plus tard, la Tunisie donne à nouveau des martyrs. Le combat contre les ennemis de la liberté se poursuit, mais autrement. Notre adversaire n'est plus, en effet, le soldat français aux cheveux bruns et à la peau claire. Aujourd'hui, l'ennemi porte une barbe, s'habille à l'afghane et prône un islam violent, étranger à celui de nos aïeux.
Ce nouvel ennemi s'appelle le terrorisme. Il s'en prend à la République et à ses valeurs. Il méprise la démocratie et annonce la guerre à l'Etat. Il prêche la haine des militaires et de la police. Il les traite de « taghouts » (NDLR : tyrans, ennemis d'Allah), de mécréants et de renégats. Ils les attaque partout, dans les villes, dans les montagnes, sur les routes et même dans leurs casernes.
La guerre contre les terroristes a débuté, de fait, le 18 mai 2011 à Rouhia. Il s'agit, en effet, des premiers affrontements entre l'armée et les forces de l'ordre d'une part et les groupes jihadistes d'autre part. Au bilan de l'opération, deux terroristes tués, deux blessés, un civil et un militaire, et deux morts dans les rangs de l'armée : Le colonel Tahar Ayari et le caporal-chef Walid Hajji.
Depuis, les attaques se succèdent dans un crescendo effréné. Le 10 décembre 2012, une unité sécuritaire échange des coups de feu avec un groupe terroriste près de Bouchebka dans la délégation de Fériana. L'adjudant à la Garde nationale Anis Jelassi, grièvement touché par balles, trouve la mort lors de ces affrontements. Ce fut le premier martyr de la Garde nationale tué par des terroristes.
Le 29 juillet 2013, une patrouille militaire fut attaquée par surprise au mois de Ramadan, quelques temps avant la rupture du jeûne, par des terroristes dans la zone Boulâaba au mont Châambi. Le coup était dur et horrible. Huit soldats sont morts dont cinq avaient été égorgés et mutilés. Une opération qui démontre la sauvagerie de l'ennemi et sa brutalité.
Quelques mois après, six gardes nationaux se font tuer, le 23 octobre 2013, à Sidi Ali Ben Aoun. Les six hommes s'apprêtaient, ce jour-là, à effectuer une descente dans une maison où d'importantes quantités d'armes et d'explosifs étaient dissimulées. Arrivant sur les lieux, ils avaient essuyé les rafales des terroristes qui étaient terrés dans des tranchées creusées autour de l'habitation. Il s'agit du capitaine, Imed Hizi, du premier lieutenant, Socrate Cherni, des sergents-chefs Mohamed Marzouki, Anis Salhi, Taher Chebbi et du sergent Ridha Nasri.
Le même jour, au soir, des individus cagoulés, dans une voiture, attaquent avec des armes à feu une patrouille de sécurité à Menzel Bourguiba. L'attaque s'était soldée par la mort de Mohamed Toujani, agent de la Garde nationale.
Le 16 février 2014, un groupe de cinq terroristes tend une embuscade à une patrouille de la Garde nationale à Ouled Manaâ. L'attaque a fait trois martyrs et trois blessés parmi les forces de sécurité.
A la fin mai de la même année, des membres de l'AQMI prennent d'assaut la résidence du ministre de l'Intérieur de l'époque, Lotfi Ben Jeddou, à Kasserine. Quatre policiers ont été tués et un autre blessé dans l'attaque.
Un an après l'embuscade sauvage du ramadan 2013, les terroristes récidivent à la même date, jour pour jour. Armés de mitrailleuses et de lance-roquettes, ils ont attaqué, en deux groupes distincts, deux points de contrôle militaire situés à Henchir El-Talla à Kasserine. S'élevant à 14 morts et 20 blessés, il s'agit du bilan le plus meurtrier pour les forces nationales dans la guerre contre le terrorisme. Un deuil national a été décrété dans le pays pour trois jours à la suite de cette attaque.
Le 5 novembre 2014, un bus militaire se fait attaquer, sur la route, à Nebbeur, entre Jendouba et Le Kef. Cinq soldats ont péri et dix autres ont été blessés. « Deux individus armés se sont approchés du bus et ont tiré. Trois éléments d'escorte qui se trouvaient à bord du véhicule ont riposté, les empêchant d'achever leur opération » indique le porte-parole du ministère de la Défense dans une déclaration décrivant les faits.
La guerre n'est pas finie. Hier, cinq soldats sont tombés en martyrs au mont Mghila, à Sbeïtla, après avoir été attaqués par un groupe de 30 à 35 terroristes. Parmi les neuf blessés des forces nationales, figure Montassar Chourabi, cousin du martyr Anis Jlassi. Peu de temps avant son entrée au bloc pour se faire opérer, Montassar, allongé sur un brancard, levait son bras arborant le signe de la victoire et criant « Vive la Tunisie ! ». Un message fort de patriotisme, mais aussi de défi que le brave soldat a adressé aux traitres retranchés dans les grottes.
La guerre contre le terrorisme a fait des dizaines de morts parmi nos soldats, gardes nationaux et policiers. Le dernier bilan fait état de soixante-quatorze tués et de 191 blessés contre 66 terroristes tués. Le bilan est, certes, lourd et douloureux, mais la volonté et la détermination des forces nationales à vaincre le terrorisme nous rassure quant aux batailles restantes.