En ces temps où les vents de liberté commencent à souffler après l'avènement de la révolution et l'installation de la deuxième République, certaines lois sont considérées par les experts juridiques et, plus particulièrement, par les organismes de la société civile, comme étant liberticides et contradictoires avec le climat de démocratie et le souffle de liberté qu'on veut instaurer dans le pays. Cela a commencé, depuis quelque temps déjà, à propos du fameux article 52 relatif à la consommation des stupéfiants. Des campagnes ont été menées tous azimuts par des juristes, des responsables politiques et même par des dirigeants de partis qui en avaient parlé lors de leur campagne électorale. Mais il n'y a pas que l'article 52 sur les stupéfiants. D'autres lois sur l'homosexualité, l'adultère, le concubinage et la prostitution sont qualifiées par les militants pour la liberté, comme étant, effectivement, liberticides.
Pour avoir une meilleure idée sur ces dispositions juridiques, sans porter des jugements sur leur teneur, nous avons collecté une synthèse de ces différentes lois afin d'en avoir une vue d'ensemble.
La consommation de Cannabis
Un an de prison ferme et 1.000 dinars d'amende est la peine minimale fixée par la loi n°92-52 du 18 mai 1992, connue sous le nom de "loi 52", relative aux stupéfiants. Cette peine est préconisée par la jurisprudence. Article 4: Sera puni de l'emprisonnement d'un à cinq ans et d'une amende de mille à cinq mille dinars, tout consommateur ou détenteur à usage de consommation personnelle de plantes ou de matières stupéfiantes, hors les cas autorisés par la loi. La tentative est punissable. Article 8: Sera puni de l'emprisonnement de six mois à trois ans et d'une amende de mille à cinq mille dinars, quiconque fréquente sciemment un lieu affecté et aménagé pour l'usage des stupéfiants et dans lequel il en est fait usage. Pour ces lois, les réactions et les témoignages ont été nombreux et unanimes, ou presque, comme indiqué, pour les considérer comme contre-productives. En effet celui qui passe un an pour avoir « fumé un joint », aura eu l'occasion de côtoyer des gens « endurcis » et les risques de le voir récidiver sont réelles.
L'homosexualité
Le code pénal tunisien prévoit, dans son article 230, une peine de 3 ans de prison pour les personnes jugées "coupables" de pratiques homosexuelles. Dans le même ordre d'idées, l'article 230. parle de la sodomie, et stipule qu'elle est passible d'une peine d'emprisonnement allant jusqu'à trois ans. Il s'agit d'un article vieux de plus de 100 ans qui n'a jamais été amendé !
Pour ces cas, avoir des témoignages n'est pas chose aisée pour les raisons que tout le monde connaît. Ainsi, nous avons opté pour la discrétion en procédant à des contacts via les réseaux sociaux, et ce à titre anonyme. Cette approche nous a permis d'avoir l'avis de personnes homosexuelles, et ce par le biais du réseau « KELMTY » se présentant comme un groupe d'activistes pour les droits et l'égalité de la communauté LGBT. Voici ce qu'ils pensent desdites lois : « Notre avis est clair, c'est un texte de loi injuste, ambigu, strictement homophobe et totalement contradictoire avec les valeurs de liberté et de démocratie qui sont le fondement de la deuxième République. Nous et la totalité de la communauté LGBT ainsi que toute autre personne qui croit en l'égalité des droits et la liberté, nous demandons son abrogation... Malheureusement, faute de moyens et de sécurité, nous ne sommes pas encore une association formelle, notre action est, jusqu'à présent, au stade virtuel, mais nous comptons, bien sûr, évoluer grâce à une éventuelle collaboration avec d'autres institutions de la société civile (organisations, associations, etc.) afin de récolter le maximum de soutien pour notre cause… »
L'adultère
L'article 236 (nouveau). prévoit que l'adultère du mari ou de la femme est puni d'un emprisonnement de cinq années et d'une amende de 500 dinars. Toutefois l'accusé(e) ne peut être poursuivi(e) qu'à la demande de l'autre conjoint qui reste maître d'arrêter les poursuites ou l'effet de la condamnation sachant que le complice est puni des mêmes peines que la femme ou le mari coupable.
Le concubinage
La loi n° 57-3 du 1er août 1957, réglementant l'état civil, stipule, dans son article 36, que l'union qui n'est pas conclue conformément à l'article est nulle. En outre, les deux époux sont passibles d'une peine de trois mois d'emprisonnement. Les époux, dont l'union a été déclarée nulle et qui continuent ou reprennent la vie commune, sont passibles d'une peine de six mois d'emprisonnement.
Sans entrer dans les commentaires et les avis subjectifs, un constat s'impose : ces lois sont fortement privatives de liberté et, comparativement à ce qui se passe sous d'autres cieux dans des pays dont nous voulons atteindre les niveaux de progrès de développement, de liberté et de démocratie, la Tunisie aura sûrement des pas de géant à accomplir. La tâche ne s'annonce pas de tout repos dans la mesure où en plus de la froideur des textes qu'il faudrait revoir et réviser, il va falloir combattre des mentalités souvent difficiles, voire impossibles à manier.