La statue équestre du Zaïm, Habib Bourguiba, domine, de nouveau, l'avenue qui porte son nom. Déboulonnée, en 1988 par Zine el Abidine Ben Ali, soit un an seulement après sa prise du pouvoir suite à ce qu'on appelle un « coup d'Etat médical », la fameuse statue reprend sa place à l'Avenue, en plein cœur de la capitale Tunis, où elle trône fièrement. Avant de reprendre sa place, ce deuxième retour du Combattant suprême au cœur de la capitale, 28 ans après en avoir été chassé, revêt une aura symbolique et une grande victoire pour le Bourguibisme. Cela a suscité la controverse et la polémique, montées de toutes pièces par certains démagogues, dont notamment, les Mohamed Abbou, Samir Ben Amor, Yassine Ayari et, bien évidemment, le plus folklorique, Hachemi Hamdi qui a remué ciel et terre pour s'y opposer.
Mais rien n'y fit. La volonté des partisans pour l'installation de la statue a fini par l'emporter. Ceci, après quelques moments de flottements et de doutes qui se sont vite dissipés, surtout avec la mobilisation forte et spontanée qui a vu le jour, notamment à travers les réseaux sociaux.
Et devant ce mouvement de masse, les opposants ne pouvaient que s'avouer vaincus, non sans promettre de prendre leur revanche après …2019. Le bouillant Hachemi Hamdi a promis de revenir « après l'élection présidentielle de 2019 » qu'il a promis de remporter. « J'enlèverai, avec mes propres mains, cette statue que je ne supporte pas de voir », a-t-il dit en substance. « Et je ferai du 28 mai une Journée d'opposition à Bourguiba et au bourguibisme ». Plus encore, il a annoncé la création d'une association dénommée « Article 12 » ayant pour objectif « la réparation de tous les dommages causés par Bourguiba », selon ses propres termes lors d'une déclaration accordée à la Radio Jawhara, samedi 28 mai 2016.
Si les opposants au retour de la statue n'ont pas d'argumentation valable pour défendre leur position, les partisans font prévaloir un retour à la normale dans le sens où elle évoque un pan très important de l'histoire de la Tunisie. Le 1er Juin 1955 ayant été le prélude à l'Indépendance du pays le 20 mars 1956. Déjà que son enlèvement en 1988, sur ordre de Ben Ali, constituait une grave erreur et un déni de l'histoire du mouvement de libération nationale à la limite d'un crime envers la mémoire de la Tunisie.
En effet, qui ne se rappelle pas parmi les citoyens ayant vécu ledit événement en 1955 ou ayant lu ses détails, ce retour triomphal du Zaïm par voie maritime, à la mère patrie au port de La Goulette où il eut droit à un accueil, à la fois, chaleureux et spontané, avant de monter sur un cheval pour faire le trajet jusqu'à l'Avenue ayant pris, par la suite, son nom. D'où la haute symbolique de cette célèbre statue équestre et dont le retour, aujourd'hui même, soit un 1er Juin, n'est que justice rendue au Combattant suprême, sachant qu'en principe et sauf avis contraire, elle côtoiera l'Horloge, érigée sous l'ère Ben Ali, malgré son aspect lugubre et hideux. Un qualificatif que nombreux connaisseurs s'accordent à lui coller.
Mais les historiens sont d'avis qu'il ne faut jamais effacer l'histoire quelque soit l'évaluation qu'on en fait, dans la mesure où aucune période ou étape ne peut être considérée comme étant entièrement négative ou parfaitement positive. Autrement dit, toute réalisation sera évaluée, en temps opportun, par les spécialistes, mais jamais supprimée? Car il s'agira de l'histoire que personne n'a le droit d'abolir ou de modifier. Ce serait alors un crime perpétré contre la mémoire du peuple et de la nation.
Il faut dire qu'il est des dates qui ne s'oublient jamais et qui marquent le destin du pays et sa grande histoire dans la mesure où elles constituent un tournant dans la vie. Or, le 1er juin 1955 en est une. Elle a été l'œuvre de Bourguiba qui a réussi, là, un haut fait de l'Histoire et mérité qu'il y entre à l'instar d'autres qui l'ont précédé dont citera, notamment, les Elyssa, Jugurtha, Hannibal, Ibn Khaldoun et, sûrement, bien d'autres.
Et c'est bien aujourd'hui, que la statue équestre de Habib Bourguiba fut officiellement inaugurée à l'avenue qui porte le nom du combattant suprême, par le président de la République, Béji Caïd Essebsi. Une date qui n'a pas été choisie arbitrairement, mais en faisant référence au 1er juin 1955, date du retour d'exil de Habib Bourguiba.
La cérémonie d'inauguration a été faite en présence du chef du gouvernement, Habib Essid et de Mohamed Ennaceur, président de l'Assemblée des représentants du peuple. Plusieurs autres officiels étaient, également présents, ainsi que des membres de la famille de Bourguiba. « Contrairement à ce que pensent plusieurs, le retour de la statue de Bourguiba à cette date précise n'est nullement une consécration du culte de la personnalité. Il s'agit d'une date historique qui symbolise l'unité et la solidarité du peuple tunisien. Et aujourd'hui, la Tunisie, a plus que jamais besoin d'une solide unité nationale. Bourguiba est le symbole de l'indépendance, de la liberté et de la fierté », affirme le président de la République en marge de cette cérémonie.
Malgré toutes les tentatives et les cris au scandale contre le retour de la statue équestre de Bourguiba, elle a pu retrouver, enfin, sa place initiale. Il s'agit d'un épisode important de l'histoire de la Tunisie ayant marqué plusieurs personnes pendant des décennies. Et bien que l'histoire ne se répète jamais, elle nous permet d'éviter de reproduire les erreurs du passé et nous fournit des exemples d'hommes illustres, qui doivent constituer pour nous autant de modèles à suivre pour nous conduire au mieux.