« Avoir plusieurs priorités c'est ne pas en avoir du tout ! » a souligné, l'économiste et ancien ministre des Finances dans le gouvernement de Mehdi Jomâa, Hakim Ben Hammouda, dans une déclaration accordée ce jeudi 31 mai 2018, à Business News. M. Ben Hammouda a estimé, commentant le communiqué publié hier par le FMI, que le gouvernement doit sortir d'une « attitude où la principale préoccupation est le financement du déficit, qui l'oblige à accepter des décisions qui ne sont pas cohérentes avec ses propres priorités qui sont la relance de la croissance et de l'investissement ». « Il ressort de ce communiqué trois points essentiels. D'abord une analyse de la situation économique avec un focus sur les performances en termes de croissance et la relative amélioration de la balance commerciale. Ensuite, le FMI a fixé les priorités pour les prochains mois, citant les plus grands défis que sont l'inflation, l'équilibre budgétaire et la hausse du prix de l'énergie au niveau international et estimant que le gouvernement devra avoir pour priorité de recourir à des décisions incisives dans ces domaines. Décisions qui paraissent comme des conditionnalités pour l'octroi de la prochaine tranche du crédit » a-t-il ajouté.
Hakim Ben Hammouda a expliqué que l'action envisagée par le FMI, en ce qui concerne l'inflation, doit venir de la politique monétaire. « Nous devrons donc nous attendre à une hausse vigoureuse des taux d'intérêt » a précisé l'économiste. « Le FMI propose également la baisse de la masse salariale dans la fonction publique, à l'heure où le gouvernement s'est engagé, depuis décembre 2017, à ouvrir les négociations sociales avec l'UGTT. Un ajustement, qui impliquera une hausse substantielle, des prix du carburant et l'adoption de la réforme des caisses sociales. Des mesures qui font penser à des conditions » a-t-il souligné. « Je trouve qu'il est étonnant, alors que la Tunisie a du mal à reprendre ses dynamiques de croissance et d'investissement, alors que l'investissement a connu une baisse des plus importantes, soit 31%, pendant les quatre premiers mois de 2018, que ce point ne figure pas dans les priorités du FMI » a confié M. Ben Hammouda. « A cette situation de déficit structurel important, le FMI semble privilégier une réponse macroéconomique qui vise la réduction des grands déséquilibres. Cette réponse ne peut que susciter des inquiétudes dans la mesure où elle est capable de tuer dans l'œuf le début d'effervescence économique que nous avons connu au premier trimestre de 2018 » a-t-il poursuivi. Et d'ajouter « en économie comme ailleurs, avoir plusieurs priorités c'est ne pas en avoir, et aujourd'hui, pour moi, la plus grande des priorités doit être la relance de l'investissement et de la croissance ».