Le sit-in du Bardo dure maintenant depuis des nuits et la mobilisation va crescendo. L'opposition ne semble pas perdre son souffle et la contestation s'amplifie avec une vague impression que la Tunisie est en train d'emboîter le pas au modèle égyptien, en matière de récupération politique du moins. Car, qu'on le veuille ou non, la politisation du mouvement de contestation et du rassemblement du Bardo est une réalité qui saute aux yeux. Rappelons-nous la téméraire incursion, dans la nuit de mardi à mercredi, de Nidaa Tounes qui a dépêché ses pro de la politique ayant senti une conjoncture très favorable. Une prière de l'absent, tout d'abord, en mémoire des soldats tombés à Chaambi où l'on a relevé Mohsen Marzouk en première ligne avant qu'il prenne le micro pour galvaniser les foules. Cette scène n'a pas échappé aux analystes qui y voient quelque similitude avec le ralliement spectaculaire du Cheikh d'Al Azhar au général Al Sissi, idée qui pourrait trouver confirmation avec la proposition faite par Touhami Abdouli de confier la présidence de la république au général Rachid Ammar. L'on rappellera, également, l'offensive médiatique de BCE, le soir même sur Nessma TV où il n'exclut nullement une rencontre avec Ghannouchi et ne rejette pas une éventuelle réconciliation de son parti avec Ennahdha. Omar s'habou, quant à lui, succède à BCE sur le même plateau, pour vanter les vertus de BCE et de ses thèses. Le leader de Nidaa Tounes confirme les tentatives de récupération du rassemblement du Bardo en rencontrant pour la première fois Hamma Hammami. Il est certain qu'un tabou semble être tombé entre Nidaa Tounes et la gauche radicale. Sur le même terrain, les contremanifestants, constitués essentiellement de membres des LPR clament leurs griefs à l'encontre de Nidaa Tounes allant jusqu'à accuser BCE d'être derrière les assassinats politiques. Une bipolarisation de fait, sur cette arène du Bardo, qui semble rappeler le scénario égyptien dans un climat sécuritaire néfaste. Tandis que, par ailleurs, Ennahdha semble se réduire à de nouvelles et d'importantes concessions, appelant, en nuançant sa position, à un gouvernement d'union nationale, se démarquant ainsi des demandes de l'opposition d'un gouvernement de salut national. Car, pour Ennahdha, il n'est pas question d'annoncer une démission collective qui serait perçue comme un aveu tacite d'incapacité et de responsabilité dans les derniers événements.