Lors du deuxième panel des journées de l'entreprise, organisé par l'IACE le 11 & 12 décembre 2009 au port el Kantaoui, M. Jean louis Guigou (Délégué Général de l'Institut de Prospection Economique du Monde Méditerranéen, IPEMED) a présenté une intervention intitulée « L'après-crise : Quel rôle pour l'Etat et l'entreprise ». Audinet publie cette intervention en intégralité : « Malgré les apparences, la séparation entre les Etats et les entreprises demeure profondément factice. De tout temps, les Etats et les entreprises notamment ont eu des relations étroites et d'influences réciproques pour définir un environnement stable et des règles du jeu. Mais les temps ont changé : désormais, les Etats et les entreprises, qu'elles que soient grandes ou PME, sont de plus en plus liés et plus personne ne s'en cache. C'est ainsi que, depuis la chute du mur de Berlin (1989), « la guerre économique » mondiale et l'émergence des pays émergents (BRIC), les Etats et les entreprises se retrouvent complices pour améliorer l'attractivité du territoire, attirer les IDE, développer des pôles de compétitivité, produire des économies externes, associer la recherche et l'innovation dans des partenariats avec les entreprises, développer les PPP… Le point de vue que je défends, c'est que : • L'après-crise apporte la dénomination de la nécessité d'une coopération étroite entre l'Etat et entreprises pour ré-réguler l'économie, • Cette ré-régulation est performante dans des grandes régions nord/sud qui valorisent la proximité, la complémentarité et la solidarité. La crise apporte la démonstration que même les plus grands Etats ne peuvent plus, seuls, assurer la régulation de l'économie de leur pays : Les grands Etats sont désormais contraints à concevoir et mettre en œuvre les nouvelles régulations à une échelle internationale. Même le royaume unis ne pourra sans doute plus mener de politique monétaire indépendante et devra rejoindre l'Euro. Après deux décennies de dérégulation financière, le besoin de ré-régulation devient une évidence. Mais on ne reviendra plus en arrière c'est-à-dire à l'échelle d'un pays isolé. Le temps est en train de finir où un Etat pouvait, tout seul, réguler et encadrer le développement de son économie nationale. L'intérêt des régulations intergouvernementales régionales Ce mouvement de ré-régulation est simultané avec un autre mouvement : celui de la régionalisation de la mondialisation, c'est-à-dire de l'émergence d'un monde multipolaire. Se mettent en place de grands espaces régionaux nord/sud, capables de contribuer à fournir un cadre stable et prévisible aux entreprises. Ce que l'Europe a commencé à faire (difficilement et avec la résistance des Etats) elle doit le poursuivre à l'échelle d'une région élargie. Ce que les Etats de la rive sud n'ont pas voulu faire (passer à une collaboration transnationale active et à des transferts partiels de souveraineté), ils doivent le faire dans l'urgence sinon ce seront « des confettis » ballotés dans la mondialisation. Ainsi se structurent trois grands pôles régionaux : • Le pôle américain (Amérique de Nord – ALENA- avec extension vers l'Amérique du sud), • Le pôle asiatique (ASEAN « plus trois » : chine, japon, Corée de sud) incluant l'Australie et la Nouvelle Zélande • La môle méditerranéen en attendant peut-être un pôle euro-africain car l'union africaine progresse à grand pas Ces grandes régions NORD/SUD valorisent la proximité, la complémentarité et la solidarité. Ce mouvement de régulation / régionalisation définit un rôle tout nouveau aux Etats et aux entreprises : concentration, consultation, coopération. Ce mouvement est en marche, il est historique. Il convient d'anticiper et de l'accompagner, car comme disait Fernand Braudel « si j'étais chef d'un grand Etat, je travaillerais peu, je regarderais évoluer les choses et je féliciterais celles qui vont dans le bon sens.» Pour conclure, IPEMED a anticipé le nécessaire « avenir commun » entre les deux rives de la méditerranée. Notre objectif c'est de faciliter le rapprochement par l'économie. Récemment, autour du conseil de surveillance d'IPEMED, présidé par Gérard Mestrallet avec M. Aziz Miled et René Carron nommés comme vice présidents, nous avons créé l'EMCC (Entrepreneurship Mediterranean Competitiveness Council), qui a pour objectif de rassembler les 80 meilleures entreprises des deux rives et de faire du lobbying auprès des chefs d'Etats pour que ce mouvement de régulation/régionalisation soit accéléré. »