Par M'hamed JAIBI Les affrontements auxquels nous assistons ces jours-ci, suite aux manifestations et actes de violence menés, dans certaines régions, par des groupes déterminés, constituent une déviation notoire par rapport à la Révolution tunisienne et ses objectifs originels, et représentent un nouveau processus pouvant conduire à l'anarchie et au nihilisme. Si ce n'est au retour de la dictature. Des aspirations légitimes Les commentateurs politiques tiennent à se convaincre, pour la plupart, que les «protestataires» sont porteurs de «revendications légitimes» que la Révolution a promis de satisfaire, mais la réalité des faits montre bien que les activistes qui «mobilisent» ces jeunes, sur le terrain et sur les réseaux sociaux, sont des petits groupes organisés qui savent ce qu'ils font. Même si beaucoup parmi les embrigadés sont sincères, croyant que cette expression violente de leurs aspirations mènera au changement de leur situation et de celle de leur région. Une situation alarmante A Douz, un couvre-feu a été décrété, suite à des violences inouïes et à l'incendie du siège du district de la sûreté, d'un poste de la Garde nationale et de deux voitures de police. Les forces de l'ordre ont dû se retirer de la ville, cédant la place à l'armée nationale qui s'est, ainsi, déployée dans les principales rues pour rétablir l'ordre. Dans plus d'une région, la situation devient alarmante, les gens perdent espoir et la paix civile est de plus en plus sérieusement menacée. Car le pays sort à peine d'une laborieuse transition démocratique et s'accroche à une délicate approche consensuelle appuyée par une forte majorité plurielle au parlement fraîchement élu. Et rien ne vient. Or les protestataires qui décrédibilisent le processus, soit n'ont aucun programme de rechange, soit seraient soutenus par des courants politiques qui étaient au pouvoir et ont été désavoués par les électeurs. Les objectifs économiques et sociaux attendent Il est tout à fait vrai que les objectifs économiques et sociaux de la révolution n'ont pas été concrétisés, que l'économie est en panne, que l'investissement recule et que le chômage avance. Mais le peuple s'exprime désormais, revendique, surveille... Et, par le biais de ses élus à l'Assemblée et à la présidence de la République, il décide. Et il lui est possible d'imposer une réconciliation active qui sache mettre un terme ferme au doute et à la déstabilisation. Qui rétablisse la confiance et la foi en l'avenir. Une vaste réconciliation nationale Une telle réconciliation est possible. Mais elle exige la meilleure bonne volonté de tous les acteurs politiques, sociaux et associatifs, et l'implication des médias et du citoyen. Le complexe de la Révolution et du «qu'en-dira-t-on ?» révolutionnaire doit être enfin écarté pour regarder la vérité en face. Notre pays a des problèmes sérieux, vit une crise profonde... mais n'a pas de solutions miracle. Et, ce qui doit être nouveau, n'est plus prêt à écouter les oiseaux de mauvais augure répéter à tue-tête et à l'infini tout ce qui ne va pas. Encore moins, crier des «revendications légitimes» pour brûler des postes de police et lancer des cocktails Molotov. Au nez des terroristes qui guettent !