Hatem Kotrane: Le Code de protection de l'enfant 30 ans et après?    COP 30: un lieu de rivalité et de collaboration    Match EST vs CA : où regarder le derby tunisien du dimanche 09 novembre 2025?    La Fête de l'arbre: Un investissement stratégique dans la durabilité de la vie sur terre    Nouvelles directives de Washington : votre état de santé pourrait vous priver du visa américain    Enseignement en Tunisie: une seule séance?    Kais Saied charge l'ingénieur Ali Ben Hammoud de trouver des solutions à la crise environnementale de Gabès    Le moringa: Un arbre parfait pour la nutrition, la santé et l'environnement    Météo : fortes pluies et vents puissants attendus sur plusieurs régions    Ras Jedir : près de 1,5 million de dinars en devises saisis dans une tentative de contrebande    Justice tunisienne : 1 600 millions pour lancer les bracelets électroniques    Budget économique 2026: Cinq grands choix nationaux    Louis Schweitzer, ancien PDG de Renault, est mort à 83 ans    Les hormones: ces messagères invisibles qui orientent nos jugements intellectuels à notre insu    Tunisie : Le budget de la Culture progresse de 8 % en 2026    L'Université de la Manouba organise la 12è édition du symposium interdisciplinaire "Nature/Culture"    Qui est Ghazala Hashmi, la musulmane qui défie l'Amérique ?    Qui est le nouvel ambassadeur de Palestine en Tunisie, Rami Farouk Qaddoumi    216 Capital investit dans Deplike : la startup à l'origine de l'app Chordie AI ou le Duolingo pour guitare    Météo en Tunisie : pluies éparses, températures en baisse    Secousse tellurique en Tunisie enregistrée à Goubellat, gouvernorat de Béja    Slaheddine Belaïd : Comment faire oublier Bourguiba    Derby de la capitale : l'Espérance exige des arbitres étrangers pour éviter la polémique    Networking Event – Green Forward : Promouvoir une économie vert et circulaire en Méditerranée    L'innovation durable d'Epson au service de la région META-CWA    Avec Kia, roulez plus, dépensez moins    Météo en Tunisie : ciel nuageux, pluies attendues fin de journée au nord    Syrine Chaalala et Mohamed Gastli propulsent la Tunisie au cœur de la révolution des protéines d'insecte    Suspension du Bureau tunisien de l'OMCT pour un mois : les activités à l'arrêt    Le Prix Goncourt 2025 remporté par Laurent Mauvignier pour son roman La Maison vide    Je n'étais plus la Ministre du Bonheur'' : la confession bouleversante d'Ons Jabeur''    Les billets du Derby désormais disponibles au Guichet    La Tunisie prépare une réduction du nombre d'établissements publics pour plus d'efficacité    Voyager en Tunisie, trésors archéologiques et douceur de vivre : un héritage fascinant à découvrir selon GEO    Zohran Mamdani crée la surprise et s'empare de la mairie de New York    Elyes Ghariani: Comment la résolution sur le Sahara occidental peut débloquer l'avenir de la région    Mondher Khaled: Le paradigme de la post-vérité sous la présidence de Donald Trump    Congrès mondial de la JCI : la Poste Tunisienne émet un timbre poste à l'occasion    Attirant plus de 250 000 visiteurs par an, la bibliothèque régionale d'Ariana fait peau neuve    Le CSS ramène un point du Bardo : Un énorme sentiment de gâchis    Ligue 1 – 11e Journée – EST-CAB (2-0) : L'Espérance domine et gagne    New York en alerte : décès de deux personnes suite à de fortes précipitations    Taekwondo : la Tunisie s'impose parmi les quatre meilleures nations    Lettre manuscrite de l'Emir du Koweït au président Kaïs Saïed    Le "Djerba Music Land" en lice pour les Heavent Festival Awards 2025: Une reconnaissance internationale pour le festival emblématique de l'île des rêves    Match Espérance de Tunis vs Club Bizertin : où regarder le match de la ligue 1 tunisienne du 30 octobre    Kharjet Sidi Ali Azzouz : bientôt inscrite au patrimoine culturel immatériel    Ciné Jamil El Menzah 6 ferme définitivement ses portes    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Lu pour vous«Les creux tièdes»: Un regard sans complaisance sur les immigrés
Publié dans La Presse de Tunisie le 06 - 05 - 2019

Habib Selmi nous immerge dans la condition d'immigré, du côté de «l'autre» immigration que vivent, non pas ceux que leurs talents placent aux premières loges de ce que l'avenir promet de meilleur, mais ceux qui peinent à tout juste survivre. C'est par le truchement du parcours de trois immigrés typiques qu'il propose ainsi une antithèse des Success-Stories qui prêchent le rêve des grandes conquêtes pour leur substituer les simples espoirs de la masse : une source de revenu, un foyer (une Hofra (un creux) comme l'appelle l'auteur), une vie convenable.
Il ne parvient pas à trouver le sommeil dans cette chambre sordide louée quelque part en France et où il n'a d'autre compagnon que son vieil agenda truffé de noms et de coordonnées.
Rêves de retour triomphal au pays
Parmi eux se détachent trois noms : Adel Talbi, El Haj, Souad Gharsallah. Le premier a déserté le café où il a ses habitudes et est retourné au pays, le second a fui les amitiés inutiles et se terre chez lui, la troisième ne donne plus de ses nouvelles. Le reste de l'agenda est dominé par des noms de femmes, des relations éphémères qui en disent beaucoup sur la solitude du narrateur. Son insomnie persiste et il feuillette le carnet, d'abord, sans le lire, s'attardant seulement sur les contours des formes de l'écriture et sur les petits dessins qu'il gribouille parfois.
Il s'ennuie de plus en plus, scrute les recoins de la chambre, se regarde dans le miroir… avant de reprendre le carnet pour se mettre, cette fois à lire. Les souvenirs affluent. Il se rappelle le café où il rencontre souvent Adel Talbi. C'est là qu'il a également fait connaissance avec El Haj : un retraité avec lequel il va tisser une amitié solide malgré la différence d'âge et dont le seul rêve est de rentrer à son village natal, «El Ala» en Tunisie où on lui construit une petite villa avec l'argent qu'il envoie chaque mois.
La lecture du narrateur le mène, encore une fois, à Adel Talbi, ce gardien de nuit étrange qui ne poursuit l'inscription à ses études que pour s'assurer d'avoir les documents perpétuant sa résidence en France. Ils se rappelle qu'ils se sont rencontrés dans l'avion qui les ramenait en Tunisie et que Talbi s'était alors fait appréhender par les policiers de l'aéroport de Tunis, mais que l'arrestation s'était vite révélée une erreur sur la personne et qu'il avait été relâché.
Le narrateur s'étonne que, malgré tout ce qui les sépare, Adel Talbi et El Haj aient tous deux ont en commun des rêves de retour triomphal au pays qui justifient tout ce qu'ils peuvent vivre de terrible dans ces lieux si éloignés de chez eux, où personne ne les connaît.
Le pouvoir d'émouvoir et de dérider
Des rêves qu'ils partagent, sans le savoir, avec un autre personnage de tête dans l'agenda du narrateur ; un personnage qui semble tirer plus qu'eux du fait qu'il n'y ait personne qui les connaisse en ces lieux où se déroulent les événements du roman. Un personnage dont le nom est écrit en rouge avec un trait imprécis et hésitant comme celui d'un enfant mais qui l'emplit tout de suite d'émotion et de souvenirs torturés. Car Souad Gharsallah a beau susciter toutes sortes de bruits plus ou moins fondés allant jusqu'à la décrire comme une fille de joie, il n'en reste pas moins vrai qu'elle est la seule femme à avoir vraiment réussi à attiser son désir. Il est clair qu'il est un peu amoureux d'elle ; un peu parce qu'il ne semble pas totalement indépendant dans ce choix quasi noué malgré lui. De fait, il s'est tout de suite senti complètement désarmé dès la première fois où il l'a rencontrée dans un café. Une beauté retentissante, certes, mais ce n'est pas le plus important ; ce qui l'est, c'est qu'elle est son «genre» avec sa beauté incontestable et son corps singulièrement voluptueux. Elle a un tel pouvoir sur lui qu'elle est pratiquement la seule à pouvoir le dérider en toutes circonstances, spécialement quand il est démoralisé par ses trop longues quêtes de décrocher un emploi. Ils finissent même par vivre ensemble.
La destruction systématique d'un mythe
Avec elle, c'est pourtant de l'éphémère comme avec les autres. C'est tout ce que peut lui permettre le narrateur. Pas par manque d'humanité ou par excès de décence. Peut-être par trop d'humanité car il se rend vite à cette évidence que chacun d'entre eux, lui inclus, est bien trop faible pour avoir la force d'en porter un autre, trop démuni pour peser sur le cours des choses, pour aider… Car, si tous les personnages brossés par Habib Selmi ont besoin d'une chose commune, c'est bien d'aide !
En choisissant des personnages paumés, l'auteur tente une énième visite du thème de l'immigration sans aucune complaisance car ce roman est une destruction systématique du mythe d'une immigration capable d'influer sur les destins pour les sustenter et les élever. En vérité, Habib Selmi ne fait qu'exposer des faiblesses personnelles qui ne s'améliorent pas au contact de l'autre. Et les personnages sont ainsi acculés à végéter, faute de mieux, et à prendre leur mal en patience ; juste comme le font leurs familles, là-bas dans le pays.
L'ouvrage
«Les creux tièdes», 202p., mouture arabe
Par Habib Selmi
Editions Sud, 2019
Disponible à la Librairie Al Kitab, Tunis.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.