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Publié dans La Presse de Tunisie le 24 - 09 - 2019

L'activité agricole ne fait plus rêver les jeunes exploitants comme autrefois. Ils ne veulent pas emprunter le chemin de leurs aînés car ce métier « ne paie plus et ne fait plus vivre ». Il y a un vieillissement de la population agricole où l'âge moyen de l'agriculteur se situe à 60 ans.
« L'avenir des jeunes agriculteurs est compromis. Ils se détournent du secteur agricole qui n'attire plus !». Telle est l'affirmation tonitruante d'un syndicaliste qui annonçait la couleur, vendredi dernier, en marge d'un débat sur la crise de l'agriculture. Ils en appellent au gouvernement afin de clarifier sa position quant à l'avenir de l'agriculture et sa vision stratégique. L'effondrement du secteur agricole qui vit une crise profonde est proche, de l'aveu du Synagri, force syndicale des agriculteurs tunisiens.
Le syndicat lance un cri d'alarme à même de sensibiliser les candidats aux élections législatives. Il appelle toutes les listes, de tous bords politiques, à se pencher plus amplement sur l'agriculture tunisienne dans leur programme. « Ce n'est pas la première fois que nous tirons la sonnette d'alarme. Mais malheureusement, nous ne sommes pas écoutés », déplore Karim Daoud.
Surendettés, les petits agriculteurs ne font plus recette
Selon lui, le secteur agricole est en perte de vitesse depuis une dizaine d'années, provoquant l'appauvrissement de nombreux agriculteurs. Il y a péril en la demeure si rien n'est fait pour bousculer l'ordre des choses. Depuis qu'on enregistre des augmentations successives des aliments ou des intrants qui ont atteint 50% des coûts de production, les petits agriculteurs ne voient plus le bout du tunnel car ils ne font plus recette.
Il y a en outre de nombreux problèmes qui ont été relevés par les forces syndicales de l'agriculture tunisienne dont celui de la marge bénéficiaire du producteur ou de l'éleveur qui se réduit comme peau de chagrin. M Karim Daoud, président du syndicat des agriculteurs de Tunisie (Synagri), annonce à l'assistance en préambule : « Le ministère du Commerce assume une part de responsabilité dans l'effondrement du secteur agricole à cause de ses agissements qui vont à l'encontre des intérêts des agriculteurs tunisiens».
Les paysans souffrent depuis des décennies, en particulier après la révolution, de l'effondrement de la plupart des systèmes agricoles. Les manifestations les plus importantes de la crise se traduisent par des difficultés de financement et des problèmes liés aux circuits de distribution et au coût élevé de nombreux produits agricoles à la consommation. La Tunisie n'a jamais connu une situation aussi problématique depuis le début des réformes agraires, qui ont contribué à la diminution de la part de la contribution du secteur agricole au produit intérieur brut et à la création de richesses nationales. Il est passé de 18% à 10% du PIB entre 2018 et 2019, et ce, malgré les efforts du Synagri.
Entre 2014 et 2017, le PIB national tiré de l'agriculture a connu une croissance notable grâce à l'exportation d'olives, de fruits, des produits de la mer et bien plus encore. Les syndicalistes affirment toutefois que dans l'ensemble, depuis une dizaine d'années, toutes les mesures prises par l'Etat desservent les intérêts des agriculteurs. Le futur président de la République devra répondre aux besoins des agriculteurs. Un syndicaliste insiste sur le rôle que peuvent jouer les ambassades des pays étrangers en Tunisie dans la coopération et l'investissement en faveur de l'agriculture pour dépasser la problématique de la sécurité alimentaire qui hante tous les esprits.
Karim Daoud a fait une synthèse sur ce qu'il y a à entreprendre dans l'agriculture tunisienne en pointant du doigt les défaillances : « Nous avons organisé cette conférence de presse à un moment particulier de l'histoire de la Tunisie qui coïncide avec les élections présidentielle et législatives. Depuis une dizaine d'années, il y a une absence totale de politique agricole qui prend en considération les spécificités et le futur de l'agriculteur. La situation est dramatique avec un risque d'impasse pour l'agriculture car il y a des problèmes dans la production laitière et céréalière. Le futur de l'agriculture est dans l'impasse.
On constate qu'il y a des filières qui sont démantelées et que les coûts de production augmentent sans cesse. Le financement de l'agriculture se pratique à des taux usuriers. On ne peut pas dire qu'on a un taux de TMM +3% comme en Europe avec 1,5 ou 2% car il est à 7 ou 10% en Tunisie ! Les agriculteurs travaillent pour rembourser leurs crédits. Il y a un vieillissement de la population agricole. L'âge moyen de l'agriculteur se situe à 60 ans». La majorité de nos agriculteurs et de nos pêcheurs sont de petits exploitants avec moins de 10 hectares de terrain ou moins de cinq vaches laitières. Ce sont des populations vulnérables et extrêmement fragiles qu'il faut pouvoir intégrer dans des mutuelles ou des coopératives agricoles pour sauvegarder leur activité dans le cadre du collectivisme.
Il faut plus de moyens matériels et humains pour l'accès au marché. La politique prospectiviste de l'agriculture doit considérer les problèmes de ressources naturelles, l'appauvrissement de notre sol pour pouvoir développer notre agriculture. M.Daoud en appelle aux futurs députés et ministres tunisiens à assainir le secteur grâce à une bonne gouvernance.
Une activité peu rentable…
La dévaluation du dinar aggrave les coûts de production avec une augmentation pouvant atteindre 100% et plus à cause de l'importation des intrants et des matières premières agricoles. La marge diminue nécessairement dans cette filière qui doit être économiquement viable pour continuer de fonctionner normalement. Et assurer sa durabilité. Il se dit réservé avec un zeste d'optimisme à condition que les futurs élus font du secteur agricole une des priorités de leur programme.
M.Ikbal Souissi, président de l'agriculture biologique et du tourisme vert au Synagri, donne sa lecture de la situation de l'agriculture en exposant avec force détails les problèmes inhérents aux filières laitières et céréalières. « Les jeunes ne sont pas prêts à vivre le calvaire de leurs parents dans un secteur d'activité connu pour sa pénibilité. L'élevage bovin pour la production du lait tel qu'il est pratiqué aujourd'hui est inhumain pour la condition de l'éleveur. Alors qu'elle coûte en moyenne dix mille dinars, la vache laitière peut voir sa valeur chuter vertigineusement si elle est atteinte par une pathologie qui altère la qualité de son lait. Son prix peut alors descendre jusqu'à mille ou deux mille dinars, ce qui représente une lourde perte pour l'éleveur ».
Il stigmatise la qualité de la vie de l'agriculteur qui se réduit au fil des ans : « L'agriculteur n'a ni le droit d'être malade, ni de prendre congé ou de se divertir… ». Il invoque la nécessité de mettre en place toute une stratégie pour améliorer le quotidien des agriculteurs. Le système de coopératives permet de partager une exploitation avec des agriculteurs qui se relaient. La coopérative est un groupement d'agriculteurs qui bénéficie d'une institution bien encadrée avec un directeur qui gère les problèmes occasionnant des recettes garanties par la coopérative, l'agriculteur ne devient plus un commerçant. En Tunisie, il doit porter cinq casquettes pour subsister et produire à la fois (agriculteur, réparateur, ouvrier, commerçant, transporteur). « En Tunisie, il y a une absence totale de vision à long terme », ajoute le responsable syndical Daoud Karim. En effet, si le secteur agricole représente environ 10% du PIB national, l'Etat a préféré investir dans d'autres secteurs tels que l'industrie ou le tourisme. « Les différents gouvernements ont subventionné les secteurs de l'industrie et du tourisme, lesquels avaient des leviers de croissance plus importants. Le secteur agricole a été progressivement oublié », relève Karim Daoud. Il accuse par ailleurs le ministère de l'Agriculture de gérer les problèmes agricoles « au jour le jour », le qualifiant de ministère des « saisons agricoles ».
Selon Daoud, le principal problème réside dans l'augmentation des coûts de production, ce qui engendre une baisse de la productivité. Beaucoup d'agriculteurs ont été contraints d'abandonner leurs exploitations, faute de revenus. « Ce sont des augmentations allant de 40 à 150%. Ajoutons à cela la dévaluation du dinar. Tout cela a impacté le coût de production. Et malheureusement à cause d'une politique aveugle, il n'y a pas eu de calcul des coûts de production dans les différentes filières agricoles pour permettre à l'agriculteur de dégager des bénéfices », ajoute Karim Daoud.
Selon lui, l'Etat joue à « la politique facile de l'importation ». L'Aleca est, d'ailleurs, l'autre problème qui inquiète les agriculteurs. « Si l'Aleca peut amener à la Tunisie une mise à niveau du secteur en collaboration avec l'UE, c'est une bonne chose. Mais s'il est mal négocié, il peut complètement casser l'agriculture tunisienne », explique-t-il à ce sujet.
Quelles réformes attendues?
Sur un autre plan, la Tunisie rurale souffre de nombreuses inégalités sociales et d'un grave manque de services. Les campagnes et les régions montagneuses sont riches en ressources naturelles et offrent un grand potentiel d'investissement dans le domaine agricole et écologique, mais elles sont inexploitées. Il est temps que le prochain Congrès du peuple assume ses responsabilités historiques et entame des réformes urgentes, à court et à long terme, contribuant ainsi à améliorer les conditions de travail des ouvriers agricoles.
Parmi les revendications mises en avant par le syndicat Synagri, il y a notamment la mise en place d'un régime fiscal spécifique prenant en considération les particularités du secteur, la création d'une banque coopérative agricole et l'octroi de crédits avec des taux d'intérêts préférentiels.


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