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La dernière bataille pour l'indépendance
Tribune
Publié dans La Presse de Tunisie le 15 - 10 - 2015


Par Habib Chaghal*
Dans un document relatif à l'environnement international, élaboré à la fin des années 90 par la direction générale des organisations et conférences internationales (Dgoci) du ministère des Affaires étrangères dans le cadre de la préparation du neuvième plan, on peut lire dans sa conclusion ce qui suit :
«... Relever ces défis doit être l'objectif de notre diplomatie, un objectif dont la réalisation passe inéluctablement par l'élaboration de nouveaux concepts dynamiques s'articulant autour des axes suivants : la défense de notre souveraineté nationale, de notre sécurité, de notre identité et de nos intérêts».
Les auteurs de ce document, tous issus de la première génération de l'indépendance, ne s'étaient pas trompés en affirmant que la défense de notre souveraineté doit être la priorité des priorités pour les autorités politiques. En effet, depuis l'édification du nouvel Etat par Bourguiba, ce principe fondateur du nouvel Etat a toujours été pris en considération par tous les responsables des institutions nationales quel que soit le domaine.
Il y a lieu de rappeler cependant que le principe de la souveraineté nationale n'est pas né avec les accords de l'indépendance du pays (20 mars 1956), puisqu'il a toujours été un souci majeur chez Bourguiba. On le découvre ainsi dans une lettre adressée par le leader tunisien au ministre italien des Affaires étrangères le 19 janvier 1943.
Sollicité de prendre une position en faveur des pays de l'Axe après sa libération du Fort St Nicolas et son transfert au pays de Mussolini le 9 janvier 1943, le leader tunisien adressa une lettre au ministre italien des Affaires étrangères dans laquelle il posa deux conditions qu'il savait inacceptables pour Hitler. La première de ces conditions concerne le rétablissement de la souveraineté tunisienne en raison de la caducité du protectorat du fait que la situation de la France occupée par les forces allemandes ne lui permettait plus d'assurer la protection de la Tunisie comme stipulé dans les conventions de 1881, la deuxième condition qui découle de la première, et c'est ce qui nous intéresse dans ces propos, concerne l'établissement d'un calendrier pour l'évacuation des forces armées de l'Axe de la Tunisie.
Voici comment Bourguiba argumentait cette condition dans sa lettre :
«Enfin en ce qui concerne l'occupation militaire (par les forces de l'Axe), il va de soi qu'un Etat n'est pas indépendant tant qu'il existe sur son territoire une force armée étrangère».
La suite, tout le monde la connaît : Hitler, par la voix du ministre italien, avait refusé la première condition en raison de sa promesse au maréchal Pétain de garder à la France ses colonies et Bourguiba était rentré en Tunisie quelques mois avant «la libération» de Tunis par les forces alliées.
La bataille de Bizerte
Depuis une vingtaine d'années, quelques journalistes et certains hommes politiques connus pour être des opposants à la politique de Bourguiba ont interprété insidieusement le recours de ce dernier à la mobilisation populaire pour obliger la France à évacuer la base de Bizerte. Tous s'accordent pour affirmer l'inutilité de cette bataille face à une grande puissance. Ainsi Bourguiba aurait déclenché cette bataille afin de «récupérer une popularité émoussée par l'exercice du pouvoir», puisque le général de Gaule avait promis l'évacuation de la base lors de la visite du président tunisien à Paris quelques mois avant le déclenchement des hostilités.
A ce grief s'ajoute celui de la mort de «plusieurs milliers de victimes civiles»
Au sujet de la première allégation, il n'y a aucun doute que les opposants à Bourguiba sur cette question ne prennent pas la peine de connaître l'homme qui avait dirigé la lutte pour l'indépendance nationale sinon ils auraient su que déjà depuis 1943 Bourguiba ne concevait pas l'indépendance du pays sans l'évacuation totale des troupes d'occupation étrangère comme précisé ci-haut.
Quant à de la promesse du général de Gaule je rapporterais le témoignage de Jean Planchais, journaliste français, rédacteur en chef adjoint au quotidien Le Monde durant quarante-deux ans, auteur de plusieurs livres dont «L'empire embrasé» édité en 1990 :
«Le leader tunisien est reçu le 27 février 1961 à Rambouillet par le général qui saluera dans ses mémoires un chef d'Etat dont l'envergure et l'ambition dépassent la dimension de son pays. Bourguiba pose la question de Bizerte.
De Gaulle parle d'un délai de «l'ordre d'une année»
Or, à travers les travaux d'élargissement des pistes d'atterrissage de la base entamés en juillet 1961 et la volonté des négociateurs français de maintenir des «homelands» pour les pieds noirs dans une Algérie indépendante lors des négociations franco-algériennes montraient que le gouvernement français n'avait nullement l'intention d'évacuer Bizerte dans les délais convenus entre Bourguiba et le général de Gaulle.
Et ce n'est que forcée par la mobilisation des jeunes destouriens et la résolution adoptée par «le machin*» que la France évacua la base de Bizerte le 15 octobre 1963, soit 15 mois après la proclamation de l'indépendance de l'Algérie, ce qui montre que les deux événements étaient intimement liés du point de vue français.
En juillet 1970, j'avais rencontré à Bizerte, lors d'un séminaire international de soutien à la cause palestinienne organisé par l'Uget, le militant destourien Taïeb Tekaya. Au fil de la discussion à propos du soutien de la Tunisie aux causes arabes, il me raconta que lors des discussions d'Evian entre les GprA et la France, cette dernière avait proposé aux négociateurs algériens de garder deux bases françaises dans une Algérie indépendante.
Devançant la réponse algérienne, Bourguiba avait chargé Taïeb Tekaya d'avertir immédiatement les dirigeants de l'armée de libération algérienne (ALN) basée à Jendouba les menaçant qu'en cas d'acceptation par les négociateurs algériens de la proposition française, Bourguiba s'adresserait par la radio au peuple algérien pour dénoncer la trahison des négociateurs algériens. On sait, depuis, que c'est l'intervention de Boumediène qui obligea la France à retirer sa proposition.
Et pour ceux qui l'ignorent, je rappelle que notre pays vote depuis toujours en faveur de l'évacuation de l'île cubaine de Guantanamo par les forces américaines.
Bourguiba a réussi là où Castro a échoué.
Le nombre des victimes tunisiennes de l'agression française continue aujourd'hui encore à alimenter des débats dans les médias, pourtant ce nombre est facile à déterminer puisque les familles des victimes font partie de la liste des familles des martyrs tombés durant la lutte de libération nationale, et à ce titre reçoivent des indemnités de l'Etat tunisien. Il existe un autre moyen de déterminer ce nombre qui consiste à s'informer auprès des autorités régionales puisque dans beaucoup de gouvernorats on a érigé un mausolée commémorant le martyre de ceux qui furent victimes de l'agression française.
Jean Planchais, que j'ai cité plus haut, résume la bataille de Bizerte en deux phrases : «Les parachutistes, les 19 et 20 juillet, dégagent la base. L'affaire fait 200 morts tunisiens». On est donc très loin des chiffres avancés par les détracteurs de Bourguiba dont le maire de l'époque, Dr Tarras, qui n'a pas hésité dans une émission de témoignage de la chaîne nationale d'agréer le chiffre de trois mille avancé par l'animatrice de l'émission à partir d'une «enquête» d'Omar Khélifi.
L'indépendance acquise par le verbe
La commémoration de l'évacuation de Bizerte ne devrait pas être uniquement une cérémonie de recueillement mais une occasion pour expliquer aux nouvelles générations le sacrifice de centaines de jeunes destouriens pour l'indépendance de notre pays. Ces derniers avaient répondu spontanément à l'appel de Bourguiba afin de forcer une grande puissance à admettre la pleine souveraineté nationale telle que reconnue cinq ans plus tôt par cette même puissance dans les accords du 20 mars 1956.
Il serait significatif de rapporter, à ce propos, l'intitulé du chapitre consacré par Jean Planchais dans son livre, cité ci-haut, «Tunisie : l'indépendance acquise par le verbe»
Le verbe faisait partie aussi du génie de Bourguiba
Dans le rapport du ministère des Affaires étrangères cité en introduction et dont le contenu est aujourd'hui, encore, d'actualité, il est souligné que le « projet du monde occidental essaie de construire un nouvel ordre qui protège sa sécurité, sert ses intérêts et diffuse son modèle de société»
Or ce modèle de société est loin d'obtenir l'adhésion des autres peuples appartenant à des cultures différentes et notamment parmi les peuples musulmans.
Aussi est-il proposé dans l'une des recommandations de ce rapport aux autorités politiques nationales «d'introduire notre approche des dangers que représente le terrorisme, en réaction au projet occidental, et nous mobiliser pour d'autres aspects** qui peuvent devenir, à moyen terme, le bouclier au danger du fanatisme, de l'intolérance et de l'intégrisme»
Si aujourd'hui la souveraineté nationale est loin d'être ce qu'elle fut du temps de Bourguiba, c'est que son successeur n'avait pas pris les dispositions nécessaires pour consolider l'invulnérabilité de la société tunisienne face à l'intégrisme et le fanatisme religieux autrement que par la répression policière.
(*) Ancien diplomate
*C'est le nom donné par de Gaulle aux Nations unies après le vote en faveur de la Tunisie
** On avait proposé « modèle démocratique » dans le document initial.


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