Ses manifestations plastiques se font les souffles d'un mot, d'une lettre, les traces d'un passage, le devenir d'une contemplation, le son et la vibration d'un pigment. La galerie Selma Feriani abrite, depuis le 12 novembre et jusqu'au 8 janvier prochain, l'exposition «Portée» de l'artiste Yazid Oulab. Né en 1958 près de Constantine en Algérie, Yazid Oulab vit et travaille à Marseille depuis 1988. Diplômé de l'Ecole des Beaux-Arts d'Alger en 1985, puis de l'Ecole Nationale des Beaux-Arts de Marseille en 1992, il expose, depuis le début des années 80, des deux côtés de la Méditerranée, mais aussi au-delà. Fils d'un mécanicien et d'une professeur de français, il est également le neveu de l'écrivain Kateb Yacine. Adolescent, il est impressionné par les milieux intellectuel et artistique de son oncle, chez qui il se rendait souvent. A 22 ans, il décide, alors d'étudier l'art et intègre l'Ecole des Beaux-Arts d'Alger. Il y passera près de 6 ans avant de partir pour Marseille en 1988 pour poursuivre son cursus. Il travaille aussi dans les chantiers pour payer ses études, notamment en maçonnerie, où il va acquérir des gestes et des techniques précieux à sa pratique artistique. A l'image de sa propre expérience et des environnements dans lesquels il a évolué, sa pratique est diverse et polysémique. Une œuvre héritière de la tradition lettrée et poétique qu'il ne cesse de revendiquer et d'invoquer mais également qui transpose son quotidien. Cela fait qu'il explore différents médiums aussi divers que le dessin, la sculpture, la peinture, la vidéo ou l'installation. Il y décline une iconographie où se mêlent la sensation et la symbolique, le geste et le verbe. Son œuvre est, viscéralement, liée au sacré et ancrée dans la mystique soufie, dans une démarche de connaissance spirituelle. Dans ses œuvres «chaîne de la connaissance» ou ses séries de graphite sur papier» figurent cette délicatesse et cette profondeur propres à la mystique soufie. Il y explore, également, le thème du lien et de la transmission (d'un savoir, d'une connaissance, d'un rituel...). Il n'hésite pas à invoquer, aussi, le travail du bâtiment qu'il a pratiqué pour financer ses études, employant, ainsi, des outils d'ouvrier (échafaudage, clous, cordeau, etc). Dépouillées, ses œuvres semblent s'inscrire dans une démarche invocatrice, puisant dans la poétique "soufie"ou encore dans des expériences personnelles. «Il y a les artistes que décrit le langage et il y a ceux qui décrivent la langue. Yazid Oulab est certainement de la seconde catégorie. Regarder son œuvre, c'est, avant tout, tendre l'oreille aux bruissements du dessin, au vacarme muet de la peinture et à la surdité certaine des premières écritures. Dessin, peinture ou sculpture, tout a à voir avec la langue ou plus précisément avec le souffle des mots. C'est la quête première de l'artiste : réapprendre à parler, réapprendre à souffler pour réapprendre à écrire», écrit à son sujet le Abdelkader Damani (Actuel directeur du Fond régional d'art contemporain de la région Centre Val-de-Loire) Ses invocations et autres manifestations plastiques se font les souffles d'un mot, d'une lettre, les traces d'un passage, le devenir d'une contemplation, le son et la vibration d'un pigment («Impact» et ses autres huiles sur toile). Dans son œuvre «Impact», il utilise du fil à plomb imbibé de peinture, placés en lignes horizontales, en face de la toile, ces fils deviennent des cordes musicales sur lesquelles on tire, délicatement, pour révéler et écouter la peinture, cela donne ses portées musicales.