Le congrès national contre le terrorisme, déjà reporté à plusieurs reprises, tarde à venir. L'incapacité du gouvernement à le tenir dans les délais fixés a laissé entendre parler de manipulations dilatoires et d'un manège compromettant. Ce retard a donné raison à la déception et à la suspicion. L'Union populaire républicaine (Al Ittihad achâabi al joumhouri), en tant que parti politique d'opposition, a choisi de recentrer le débat et prendre l'initiative. Il a organisé, hier à Tunis, sa quatrième conférence de l'année, qu'il a consacrée à la question du terrorisme en Tunisie et son ampleur après la révolution. Selon Mme Leïla Kallel, coordinatrice générale du parti, cette conférence a été programmée pour jeudi prochain, mais le dernier attentat-suicide perpétré contre la garde présidentielle, en plein centre-ville, a forcé son organisation plus tôt que prévu initialement. Il aurait été possible, déplore-t-elle, de se ranger tous, à l'unisson, sous la même bannière nationale, comme un seul homme contre la nébuleuse terroriste, afin de répondre à l'appel de la nation. «Mais, comme ce congrès national très attendu tarde encore à venir, sur fond de tergiversations inexpliquées, notre conférence ne doit pas traîner davantage», martèle-t-elle. De son côté, le secrétaire général de l'UPR, Lotfi Mrayhi, a pointé du doigt l'indécision des gouvernements post-révolution et le manque de sérieux face aux menaces de mort qui viennent des frontières. Et même la guerre déclarée contre cet ennemi n'a pas été ressentie en tant que telle, n'ayant guère livré l'impression de vouloir aller jusqu'au bout. Car, poursuit-il, cela demande une volonté d'acier pour tout mettre en œuvre et mobiliser les moyens de lutte nécessaires. C'est de bonne guerre ! Pour lui, le terrorisme, c'est d'abord un combat économique. L'argent est le nerf de la guerre, dit-on. Mais, s'insurge-t-il, qui a fait de la Tunisie un terrain favorable au terrorisme ? A cette question plurielle, réponses multiples. Ainsi, les solutions en sont d'ordre sécuritaire, sociopolitique, économique, culturel et bien d'autres aspects pour un projet sociétal solide, prospère et équilibré. Bien que le phénomène d'intégrisme ne date pas d'hier, son retour en force demeure, selon lui, perceptible, au grand jour, après une révolution, jusque-là, inachevée. Il n'a pas fini de gagner du terrain de manière exponentielle, sans qu'un gouvernement n'ose prendre son courage à deux mains. Aujourd'hui, le terrorisme a pris un nouveau tournant, frappant jusque dans la cité. Le chercheur en histoire contemporaine, Khaled Abid, vient de poser la question suivante : le terrorisme en Tunisie est-il un phénomène ancré ou juste passager importé d'ailleurs ? Les deux à la fois, semble-t-il. Ses racines remontent bel et bien au passé lointain, à l'ère coloniale. Son premier coup fut ressenti au temps de la crise de l'Ugtt en janvier 1978. Le choc fut ainsi surprenant et l'image de voir, en ce jour macabre, l'armée nationale tirer sur son peuple est toujours vivante dans la conscience collective des Tunisiens. Ces dernières années, le terrorisme commence à monter en puissance, au point que la Tunisie est considérée comme premier exportateur de jihadistes dans la région. Plus de six mille jeunes Tunisiens sont actuellement au jihad en Syrie. Leur retour fera, certes, grincer les dents. D'où une approche multidimensionnelle à mettre en exécution. La réponse est tellement complexe que l'on doit s'y préparer au mieux. Et ce n'est pas par l'éradication de la pauvreté et la marginalisation des régions qu'on pourra venir à bout de ce danger, aussi universel soit-il, et non pas à travers une réforme économique non plus. La clé de voûte consiste à revoir tout, au sens pluriel du terme. L'hôte libyen, M. Ezzeddine Akil, n'a pas manqué, dans son intervention sur l'état des lieux dans son pays, de faire valoir les mesures préventives que la Tunisie avait, déjà, prises à ses frontières avec la Libye. Et de souligner dans ce contexte que la sécurité de son pays est tributaire du nôtre. «Toute procédure visant à nous aider pour notre transition déjà en difficulté serait la bienvenue, et ce, pour l'intérêt des deux peuples frères», conclut-il.