Néji Baccouche prévoit une avalanche de recours pour non-constitutionnalité des lois dès la mise en place de la cour Plusieurs organisations internationales, dont Democracy Reporting International (DRI) avec la coopération de la présidence de la République, ont organisé hier à Tunis une conférence intitulée «La mise en place de la Cour constitutionnelle : défis et enjeux». En présence de plusieurs figures de la sphère juridique tunisienne, les intervenants sont revenus sur l'importance de l'instauration d'une telle cour, «même si, rappelle le professeur Amine Mahfoudh, le Parlement a dépassé les délais constitutionnels relatifs à la promulgation de la loi portant création de cette cour». Pour lui, l'important est d'y être arrivé. De son côté, le constitutionnaliste Néji Baccouche a critiqué certains choix faits par le législateur et s'est interrogé sur l'impartialité de la future Cour constitutionnelle, d'autant plus que contre l'avis de la commission de législation générale, la séance plénière de l'assemblée a décidé d'abandonner partiellement la condition de non-affiliation à un parti politique pour les membres de la cour. «Ce sont certainement d'énormes pressions qui ont fait que le Parlement abandonne l'idée de l'impartialité des candidats, a-t-il dit. Il est clair que certains ne veulent pas d'une indépendance politique de la Cour constitutionnelle et il est clair également que la désignation de certains membres de la cour par l'ARP et la présidence de la République, sera politique». Or, selon lui, Il faudra que la cour soit au-dessus de tout soupçon et qu'elle ait une grande crédibilité pour qu'elle puisse faire son travail. Hypocrisie politique Lors de son intervention, le professeur Amine Mahfoudh rétorque et appelle à «arrêter l'hypocrisie de l'impartialité». Amine Mahfoudh, rejoint par le président de la Commission de législation générale Abada Kéfi, soutient que tout est politique par essence, même la Constitution «fruit de constructions politiques». Le professeur de droit constitutionnel va plus loin en estimant que « même si les juges ne sont affiliés à aucun parti, certaines de leurs décisions sont politiques ». Pour lui, peu importe les horizons politiques des uns et des autres, les membres de la Cour constitutionnel auront à statuer uniquement sur la base du texte constitutionnel qui garantit les droits et les libertés de tout un chacun. D'un autre côté, le professeur Néji Baccouche a prédit une avalanche de recours pour non-constitutionnalité des lois dès que la cour sera véritablement mise en place. «Faute d'articles permettant de filtrer un peu les demandes qui pourront être présentées par chaque justiciable, il faut imaginer que certains avocats, lors des procès, useront et abuseront de ce droit de recours», a-t-il déclaré. Une avalanche de demandes qui contraindra la cour à ne pas respecter les délais de traitement énoncés dans la loi, surtout que celle-ci ne permet pas de rallonger les délais de traitement.