Par M'hamed JAIBI Il est un fait certain, c'est qu'en sa qualité de chef du gouvernement, Habib Essid a le droit de restructurer son équipe, voire le devoir de le faire chaque fois que la bonne gestion des affaires de l'Etat l'exige. A la seule condition que son gouvernement continue de bénéficier de la confiance de l'Assemblée des représentants du peuple. Il se trouve cependant que ce remaniement, dont personne n'arrive à définir la philosophie, accuse un terrible déficit de communication. Un fait plaide toutefois clairement en sa faveur, c'est la suppression de tous les secrétariats d'Etat, sachant que la création du ministère des Affaires locales vient enfin libérer les communes de l'omnipotence du ministère de l'Intérieur. Les observateurs politiques ont été pris au dépourvu face aux changements opérés en définitive, en concertation entre le chef du gouvernement et le président de la République, puisque des réputés «partants» ont été maintenus alors que des «piliers» apparents ont quitté. C'est ainsi que les échecs des titulaires de l'économie et des finances n'ont pas réussi à les déloger, alors que le social a vu, malgré les bonnes conclusions qu'ont connues les négociations, le départ de son titulaire. Est-ce la raison de l'excessive réaction de l'Ugtt qui comptait en Ahmed Ammar Youmbaï un «proche» de longue date, ou alors le maintien de Jalloul qui a su damer le pion à certains syndicalistes ? Taïeb Baccouche, «appelé à d'autres fonctions», a-t-il payé les frais de l'image de jeune loup qu'on lui avait collée, un temps, à Nida Tounès, ou est-il effectivement promis à un nouveau rôle de premier plan auprès du président de la République ou de son parti ? La discipline dont il a fait preuve aussi bien aux Affaires étrangères qu'au sein de la direction du parti mérite tous les éloges. Mahmoud Ben Romdhane est maintenu malgré son franc parler, mais il quitte un ministère trop technique pour un département à la portée de ses convictions sociales. Youssef Chahed a droit à une promotion pour le rôle qu'il a joué dans la normalisation au sein de Nida Tounès. A la tête du ministère des Affaires locales, il devra s'acquitter de la délicate tâche de parer les communes de leur futur statut civil et républicain, en préparation aux prochaines élections municipales. Quant à Gharsalli, à peine quelques jours après qu'il se soit débarrassé de Chelli, le voici à son tour délogé. Des facebookers accusent le nouveau titulaire de l'Intérieur d'être pro-Nahdha, tout comme ils avaient fait avec Gharsalli, mais ceux qui le connaissent parlent d'un moderniste bon vivant. Fait curieux, le groupe parlementaire de Nida Tounès dénonce la «mise à l'écart» de Gharsalli. A propos du remaniement, l'impression générale est qu'Ennahdha serait en meilleure position. Samir Taïeb va jusqu'à affirmer que ce parti détient la Justice, l'Intérieur et l'Energie. Mais Ennahdha nie ou minimise et d'autres observateurs insistent sur le nombre des ministères revenant à Nida. Alors que Noureddine Bhiri, jouant le consensus le plus large, «souhaitait» carrément l'entrée au gouvernement du Front populaire.