Par Abdelhamid Gmati On sait que durant ces 5 dernières années, la situation socioéconomique s'est détériorée. Mais ce que l'on sait moins, c'est que la mendicité s'est exacerbée. Sur 11 millions d'habitants, 10% sont des mendiants dont 600 mille enfants de moins de dix-huit ans. C'est un sociologue, Zouheir Azouzi, qui l'affirme, se référant à des études menées dans 9 gouvernorats par l'Université tunisienne, et les ministères des Affaires sociales et de la Femme, de la Famille et de l'Enfance. Il appert que la moitié de ces mendiants sont des professionnels bien organisés qui recrutent et forment des enfants et les transportent vers les centres des grandes villes. Au centre-ville de la capitale, on rencontre immanquablement ces mendiants, adultes ou enfants. Certaines mendiantes prient les passants de les aider à faire ausculter ou à acheter des médicaments pour le bébé malade qu'elles portent dans leur bras. A regarder certains de ces mendiants, on se dit qu'il leur est possible de trouver un emploi, dans les secteurs en mal de main-d'œuvre, comme pour la cueillette d'olives par exemple ou comme employée de maison pour les femmes. Mais lorsqu'on apprend que les mendiantes louent des bébés à 20 dinars la journée, on se rend compte que demander l'aumône est bien lucratif. Malgré la difficulté de la tâche et l'atteinte à la dignité. Ce qui est à retenir, c'est que ce phénomène ne semble pas intéresser la classe politique. On ne semble pas se soucier de ces 600.000 enfants de moins de 18 ans. N'est-ce pas là un vivier pour toutes sortes de délinquance et de terrorisme ? Que font donc les services concernés, dans plusieurs ministères, par l'encadrement des jeunes et des enfants ? Mais le citoyen tunisien n'est pas seulement sollicité pour faire l'aumône aux pauvres. Il doit aussi porter assistance aux chômeurs, qu'ils soient diplômés ou pas. Et il subit leurs revendications intempestives et leurs actions destructrices. A l'instar de ce qui se passe dans le sud, à la Compagnie des phosphates de Gafsa (CPG), où la production de phosphate commercial a baissé de 41%, durant ce dernier mois, et ce, en raison des rassemblements de protestation observés par les sans-emploi dans les lieux de production. Et c'est le citoyen qui doit supporter ces pertes et bien d'autres. Au lieu de demander l'aumône, ces chômeurs bougeaient, prenaient des initiatives, suivaient des formations pour les rendre compétents et performants, acceptaient les emplois existants (il en existe mais ils ne trouvent pas preneurs), leur sort serait meilleur. Du côté des députés, on semble aussi solliciter l'aumône. Une grande polémique a été déclenchée à propos de la prime de compensation de 900 dinars que se sont octroyé les députés le mois denier. Certes, plusieurs des élus l'ont refusée. Certes, Mongi Harbaoui, député de Nida Tounès et vice-président de l'ARP chargé de la communication, a précisé qu'il « ne s'agit pas d'une prime, mais que c'est plutôt un remboursement de frais. Ceci entre dans le cadre de la politique d'austérité de l'Assemblée, puisque, avant, les frais d'hébergement et de nourriture d'un député s'élevaient à 4.000 dinars par mois, à part son salaire. Maintenant, ce n'est plus le cas grâce à cette nouvelle politique». Pour un autres député, « le parlementaire tunisien devrait toucher un salaire minimum de 7.000 dinars pour pouvoir exercer son métier en toute transparence et en toute dignité ». Oui, et cette « revendication révolutionnaire » qui remonte à 2013 et a été votée le 27 novembre dernier serait passée inaperçue dans un pays qui se porte bien. Or ce n'est pas le cas. De plus la grande majorité des ministres et autres députés ne sont pas dans le besoin. Il y a des députés millionnaires, des chefs d'entreprise. Ont-ils réellement besoin de cette prime de 900 dinars ? Selon l'article 11 de la Constitution, « toute personne investie des fonctions de président de la République, de chef du gouvernement, de membre du gouvernement, de membre de l'Assemblée des représentants du peuple, de membre des instances constitutionnelles indépendantes, ou de toute haute fonction, est tenu de déclarer ses biens, conformément aux dispositions de la loi ». Or cette loi constitutionnelle est ignorée par la plupart des ministres et parlementaires. Sur les 217 députés de l'ARP, seuls 5 ont déclaré leurs biens. Un seul a déclaré, aussi, qu'il verse son salaire parlementaire à des associations humanitaires et sociales. Et les autres ? Faut-il rappeler à ce beau monde la fameuse phrase du président américain, John Kennedy, prononcée lors de son investiture : « Ne demandez pas à votre pays ce qu'il peut faire pour vous, mais plutôt ce que vous pouvez faire pour lui ». Alors, au lieu de demander l'aumône, faites l'aumône de votre temps, de votre talent, au profit de votre pays. N'est-ce pas pour servir que vous vous êtes porté candidat aux élections ?