Pluies orageuses intenses sur le Nord-Est et vents forts attendus    L'ATB et Visa International célèbrent les grands gagnants du jeu-concours ATB & Visa à l'occasion de la CAN Maroc 2025    Salon de l'Entrepreneuriat RIYEDA : autonomiser pour entreprendre et inclure    Diaspora tunisienne : comment la Tunisie peut-elle séduire à nouveau ses talents expatriés?    QNB organise des ateliers financiers pour les élèves de l'école primaire «El Chedly Khaznadar» à Ezzahra    Fitch Ratings relève la notation nationale d'Enda Tamweel de BBB à A avec des perspectives stables    Grand concert du nouvel An à Tunis : l'Orchestre symphonique Tunisien au théâtre de l'opéra (Programme)    IQOS ILUMA i lancée en Tunisie par Philip Morris International : transition vers un avenir sans fumée    Festival international du Sahara 2025 à Douz : tourisme et artisanat au cœur de la 57e édition    Vendredi sportif : suivez le CAN, la Premier League en direct !    Météo en Tunisie : pluies orageuses sur le Nord et localement sur le Centre    Fin de la vignette : payez vos droits de circulation autrement dès 2026    CAN 2025 : programme des matchs de vendredi    Rhume et grippe : un geste simple pour raccourcir la maladie de 2 jours    De la harissa familiale aux étals du monde : l'incroyable épopée de Sam Lamiri    Quand et où suivre le match Egypte - Afrique du Sud à la CAN 2025 ?    De la harissa familiale aux étals du monde : l'incroyable épopée de Sam Lamiri    IACE - Premier rapport national sur l'Entreprise: Pour un nouveau pacte productif    De l'invisibilité à l'hyper-visibilité: le voile dans l'imaginaire onusien    Les couleurs du vivant: Quand la biologie et l'art se rencontrent    Tunisie-Japon : SAITO Jun prend ses fonctions et promet un nouvel élan aux relations bilatérales    Festival Saliha de la musique tunisienne à la ville du Kef : ateliers, concerts et spectacles (programme)    Météo en Tunisie : mer agitée, températures en légère hausse    Kaïs Saïed : seule l'action sur le terrain fera office de réponse    Séisme de 6,1 à Taïwan : sud-est secoué sans dégâts signalés    Crash près d'Ankara : le chef d'état-major libyen tué    CAN 2025 - Tunisie-Ouganda : Un avant-goût de conquête    Yadh Ben Achour reçoit le prix Boutros Boutros-Ghali pour la Diplomatie, la Paix et le développement (Vidéo)    Tunisie Telecom lance sa campagne institutionnelle nationale «Le Don des Supporters»    Match Tunisie vs Ouganda : où regarder le match de la CAN Maroc 2025 du 23 décembre?    Choc syndical : Noureddine Taboubi démissionne de l'UGTT    Riadh Zghal: Le besoin de sciences sociales pour la gestion des institutions    Tunisie à l'honneur : LILY, film 100% IA, brille sur la scène mondiale à Dubaï    Nabeul accueille le festival international Neapolis de théâtre pour enfants    Cérémonie de clôture de la 36ème session des journées cinématographiques de Carthage (Album Photos)    Décès de Somaya El Alfy, icône du cinéma et du théâtre égyptiens    Le carcadé: Une agréable boisson apaisante et bienfaisante    CAN Maroc 2025 : programme des matchs de la Tunisie, préparatifs et analyse des chances    France : nouvel examen civique obligatoire pour tous les étrangers dès 2026    Elyes Ghariani - Le Style Trump: Quand l'unilatéralisme redéfinit le monde    Slaheddine Belaïd: Requiem pour la défunte UMA    Comment se présente la stratégie américaine de sécurité nationale 2025    Match Tunisie vs Qatar : où regarder le match de Coupe Arabe Qatar 2025 du 07 décembre?    Des élections au Comité olympique tunisien    La Poste Tunisienne émet des timbres-poste dédiés aux plantes de Tunisie    Sonia Dahmani libre ! Le SNJT renouvèle sa demande de libération des journalistes Chadha Haj Mbarek, Mourad Zghidi et Bourhen Bssaies    Secousse tellurique en Tunisie enregistrée à Goubellat, gouvernorat de Béja    New York en alerte : décès de deux personnes suite à de fortes précipitations    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



La littérature tunisienne dans le vif de l'histoire
A Beyt al-Hikma
Publié dans La Presse de Tunisie le 17 - 02 - 2016

Assister au colloque «Le roman français et d'expression française contemporain : nouvelles formes, nouveaux rapports à l'histoire organisé par l'Académie tunisienne des sciences, des lettres» et des arts (Beyt Al-Hikma) les 11, 12 et 13 février est un observatoire passionnant. Le milieu est composé essentiellement d'écrivains, de critiques, d'universitaires et de lecteurs, mais l'existence et l'activité de la niche donnent des raisons de croire à une vitalité réconfortante, peut-être à des tremblements significatifs.
S'intéresser à la littérature
Dans l'actualité cacophonique où vit la Tunisie depuis 2011, la littérature conserve des adeptes, fait parler d'elle et réunit des pratiquants. La sphère littéraire flotte entre les mondes enseignant, médiatique et économique, eux-mêmes secoués mais l'obscur désir d'écrire reste vivace et même si le livre littéraire a une présence réduite, il maintient son existence. La rencontre réservée au roman de langue française a donné la parole à des écrivains, des critiques et des universitaires dans un équilibre et une circulation qui ont permis de réfléchir à la situation de la littérature en Tunisie et ailleurs. Entendre des amoureux des livres, des passionnés des mots et des auteurs échanger autour d'œuvres, de gestes d'écriture, d'univers romanesques, de personnages et de références littéraires a quelque chose d'apaisant en cette période où le désordre langagier s'ajoute à tous les autres. On sait que la production littéraire, en arabe comme en français, est en hausse, après 2011 même si auteurs, éditeurs et libraires continuent à se plaindre du manque de lecteurs. Le regret est ancien et appelle à bousculer les cloisons des niches où vit le livre littéraire. Comme pour le cinéma, les arts plastiques, la musique ou le théâtre, les choses commencent par le public. En filigrane des débats, on a esquissé les lieux à investir et à faire revivre pour que le roman occupe une place plus grande. Mais au-delà de cette controverse lancinante et en plus des fenêtres ouvertes sur auteurs et courants littéraires, j'ai été interpellée par la façon dont l'histoire était présente dans les communications. L'histoire de la langue française notamment peut aider à écrire et à comprendre la complexité de la culture tunisienne contemporaine.
Sortir de la binarité
La rencontre axée autour du roman français et d'expression française a montré que les frontières du microcosme littéraire francophone se sont étendues. Il ne se limite plus à la production hexagonale mais peut rejoindre des communautés comparables en Algérie, au Maroc, à Haïti, au Canada... Le face-à-face avec la France est aujourd'hui brisé par la dissémination de la littérature francophone dans plusieurs contrées. Depuis des décennies, de grands auteurs francophones sont consacrés partout et les communautés littéraires, fragmentées et minoritaires au Maghreb, en Europe, en Afrique, en Amérique comme partout, peuvent, notamment grâce à Internet, se lire et communiquer. Se rapprochent-elles pour autant ? La question vaut pour toutes sortes de moyens d'expression, les arts comme les sciences, les littératures comme les « humanités ». Si on se tient à l'histoire, suivre les fils tissés par la langue française qui s'est propagée dans le monde à travers la colonisation, puis s'est prolongée en francophonie, avec les décolonisations, est une entreprise en soi. L'histoire des modalités, des traces, des formes et des manifestations de la présence linguistique française en Tunisie reste en tous cas à faire, au-delà de l'obsession contre sa domination. Celle-ci est largement battue en brèche par l'anglais mondialisé et la conquête d'un espace conséquent par l'arabe classique, dans le monde du pouvoir, de la littérature et du savoir en Tunisie. Que le roman francophone continue à vivre est un signe d'aspiration à la liberté en ces temps où le mot « dignité » reprend du service. La langue française n'a pas disparu, elle a évolué et se loge dans des plis différents. Considérée comme monture de la modernité et/ou de l'émancipation jusque vers 1960, elle passe à un autre statut, joue un autre rôle et dit d'autres vécus, entre l'arabe classique du pouvoir et le dialectal, langue du ressenti —deux espaces en bouleversement— et à côté d'une littérature arabe en expansion.
La littérature comme histoire contemporaine ?
Nous vivons un temps où la binarité n'est plus significative. La binarité arabe/français longtemps explorée comme lieu de tension politique et idéologique ne suffit plus à comprendre la Tunisie tout comme le binôme français/anglais ne permet pas de régir ni de lire les orages du monde. Les divorces entre ces couples ont tramé les histoires individuelles et globales pendant des décennies : les choix d'écriture, les politiques pédagogiques ou les relations diplomatiques en portent la trace et les figures de passeurs (dont ceux des écrivains Alain Nadaud et Abdelwaheb Meddeb, auxquels le colloque a rendu hommage) éclairent à leur façon l'histoire des décennies précédentes. Aujourd'hui, nous traversons des désordres plus vastes, des perturbations d'équilibre plus profondes. Les passages sont plus escarpés et les proclamations de divorce entre arabe et français, ou les échecs annoncés devant l'hégémonie de l'anglais sont des réponses partielles, des interprétations tronquées.
Cela remet la littérature à sa place, diffuse et nécessaire, celle de faire entendre les multiples sens de ce qui habite le tréfonds des sociétés, étroitement lié à ce qui traverse l'intimité des êtres. La littérature en général et la tunisienne en particulier se trouvent devant une implication accrue, celle de décrypter la complexité foisonnante du monde où l'on vit, ses oublis comme ses masques, ses peurs comme ses espoirs, de faire entendre les voix recouvertes par le vacarme de la politique et le bruit des médias comme de faire accéder aux sons enfouis sous le silence de l'argent et des intérêts.
Merci aux organisateurs (Emna Belhaj Yahia, Rabaâ Abdelkéfi, Ridha Bouguerra, Béchir Garbouj, Samir Marzouki, Najet Tnani), aux auteurs présents (Renata Ada-Ruata, Ali Bécheur, Rafik Ben Salah, Lamia Berrada, Azza Filali, Alia Mabrouk, Saber Mansouri, Fawzi Mellah, Jean Rouaud, Mokhtar Sahnoun, Antoine Volodine), à Dominique Viard qui a introduit le colloque, aux enseignants et aux amateurs de littérature française d'avoir, au cours de ces trois jours, replacé la littérature tunisienne dans le vif de l'histoire en train de s'écrire et de donner envie de lire, encore et toujours.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.