Comme leurs aînées du musée de Sousse, ces soirées de la première session des Nuits du musée du Bardo, qui commencent ce soir et se poursuivent jusqu'au 24 de ce mois, veulent attirer un public plus vaste que les amateurs avertis, vers les méandres de la mémoire. Il s'agit de reproduire, en ce haut-lieu de la culture et de la mémoire, une expérience qui a été inaugurée voilà trois ans par l'Agence de mise en valeur du patrimoine et de promotion culturelle (Amvppc). Cela s'est passé dans l'enceinte du musée de Sousse, récemment réaménagé en sous-sol de l'ancienne citadelle de la ville, la Kasbah : l'organisation, durant la saison estivale, en nocturne, d'événements musicaux, destinés à participer à l'animation de la ville mais, surtout, à amener un public amateur de manifestations culturelles et artistiques, à entrer en contact avec ce «monde des merveilles» (dâr l'a3jâyb) duquel il se tient ordinairement éloigné. L'initiative est partie d'un constat fort simple. Alors qu'il est installé au cœur d'une agglomération (et d'une région) fort populeuse, le musée de Sousse n'attire guère plus d'une poignée de milliers de visiteurs, dans leur écrasante majorité, composés d'étrangers. Comment, donc, faire pour capter un potentiel nettement plus important, tant parmi les touristes que parmi les nationaux ? La fréquentation des musées n'est pas une préoccupation spécifiquement tunisienne. Même là où le public est réputé amateur des choses de l'esprit, les conservateurs de musées et de monuments ont dû recourir à des «artifices» pour drainer un public plus vaste que celui des amateurs avertis. Ils ont imaginé, à cette fin, des événements festifs, susceptibles d'«accrocher», qui ne montrent pas un intérêt particulier pour les musées ou ceux qui, littéralement, hésitent à en franchir le seuil. C'est cette formule qui a retenu l'attention de la direction de l'Amvppc. Et elle l'a mise en application avec l'organisation, trois étés en arrière, de soirées musicales dans le musée de Sousse. La première édition de cette manifestation a été gratuitement ouverte au public. Les sessions suivantes ont été payantes et le public est allé grossissant. Est-ce là la preuve que les organisateurs ont vu juste ? Ce n'est pas le succès commercial qui détermine ici la pertinence de l'approche. Ce sont ses retombées collatérales. En effet, à la faveur de ces événements, les organisateurs ont procédé à l'éclairage artistique de la Kasbah, dont l'esplanade accueille le podium et le public : tour, murs crénelés, escaliers et cellules ont été habillés d'une lumière magique qui les a fait ressortir sous un jour inédit, féérique. Surtout, le musée a émergé des profondeurs comme une révélation portée par des faisceaux lumineux qui ont fait surgir des dieux et des chimères, qui racontent les gloires passées, comme un appel du tréfonds du passé. C'est ainsi que les spectateurs, dans l'attente du début de la séance, se sont laissé aspirer par la magie du tableau et, à la suite de médiateurs avisés, ont déambulé dans les méandres de la mémoire. Le programme C'est à cette invite que la direction de l'Amvppc veut convier le public du grand-Tunis avec l'initiative des Nuits du musée du Bardo. Celles-ci se dérouleront donc, à partir de ce soir, dimanche 20 mars, et se poursuivront jusqu'au au 24 de ce mois, à partir de 19h30. Les spectacles durent deux heures de temps, environ. Ils auront pour cadre, le hall principal du musée, dont la capacité d'accueil ne dépasse pas à peu près les 300 places. L'entrée est gratuite et se limitera aux porteurs d'invitation et aux premiers venus. Le spectacle de Mounir Troudi intitulé «Fou7oul et mizèn» ouvrira le bal. Le lendemain, une troupe musicale égyptienne et une autre soudanaise prendront le relais, toujours à la même heure. Mardi, le pianiste polonais Wojciech Waleczek se produira en solo. Il sera suivi, mercredi, du spectacle de deux artistes japonais Yoshiko Matuda et Daï Sugimote. La clôture de la session se fera en compagnie des frères El Gharby. Comme ses aînées du musée de Sousse, ces soirées de la première session des Nuits du musée du Bardo seront gratuites d'accès. Des médiateurs seront à la disposition des spectateurs, pour leur faire effectuer une rapide visite guidée dans le circuit qui aura été balisé et éclairé à leur intention. Des exemplaires à tarif réduit de l'ouvrage «Un monument, un musée : Je suis Bardo», édité par l'Amvppc, à l'usage des visiteurs du musée ainsi que d'autres documents sur les divers espaces d'exposition et sites historiques et archéologiques gérés par l'agence seront mis à leur disposition, à l'accueil.