L'un des deux cerveaux de l'attentat court encore... avec sa boîte noire! L'on sait que Adel Ghandri a été, avec son camarade Meftah Manita, l'un des deux cerveaux de l'attentat de Ben Guerdane. L'on sait aussi que le premier a été abattu et que l'autre a pu s'échapper, avec le soutien de son lieutenant Moez Fezzani. Or, en dépit des aveux arrachés jusqu'ici aux 52 assaillants ayant pris part à ladite attaque, une bonne partie de l'énigme n'a pu être encore élucidée, non seulement parce que les présumés accusés n'ont pas tout dit, mais aussi parce que, dans les traditions de l'internationale intégriste, les caïds ont toujours appris à se garder de tout révéler à leurs hommes et cela afin de préserver ce qu'ils considèrent comme «la boîte noire», en cas d'échec d'une opération. Cavale synonyme de casse-tête Bien évidemment, les premiers aveux éventés par une enquête sont toujours bons à prendre, d'autant plus que, pour le cas de cette affaire, on a eu droit, jusqu'à présent, à de belles révélations (voir La Presse de vendredi dernier), qui ont conduit, entre autres, à l'arrestation de 52 terroristes, au démantèlement de pas moins de six cellules dormantes à Remada, Douz, Mahdia, Nabeul, El Jem et El Hamma de Gabès, ainsi qu'à la découverte de cinq dépôts de stockage d'armes. Certes aussi, ces aveux ont permis l'avortement d'autres attentats dits imminents et la neutralisation de plusieurs passages sahariens qu'empruntaient les terroristes dans leurs «navettes» clandestines entre la Tunisie et la Libye, d'un côté, et entre la Tunisie et l'Algérie de l'autre. Tout cela est beau, tout cela est louable. Mais là où la frustration est certaine, c'est lorsqu'un caïd se fait éliminer ou réussit à prendre la poudre d'escampette, sans laisser de trace. Et c'est malheureusement le cas pour Adel Ghandri dont on n'a, pour le moment, aucune nouvelle. Surgissent alors des questions qui ont tout d'un casse-tête : comment a-t-il pu prendre la fuite dans une ville (Ben Guerdane) pourtant hermétiquement quadrillée par les forces de sécurité et l'armée dès le début de l'attaque ? A-t-il, quelque part, bénéficié de complicités pour brûler la politesse à tout le monde ? Où se cache-t-il aujourd'hui ? Chez nous ou chez les voisins ? Jusqu'à quand durera sa cavale ? A-t-il réussi à rejoindre son fief de Sabrata ? Reviendra-t-il un jour à la charge ? Combien d'hommes l'ont-ils accompagné dans sa fuite ? Qu-a-til fait pour passer incognito ? A-t-il profité d'une quelconque faille dans le plan d'assaut exécuté par les forces de sécurité et l'armée? Nul ne sait... sauf lui, bien sûr. «Tant qu'on ne l'a pas arrêté, on n'a rien fait», avoue le chef d'une brigade de la Garde nationale lancé dans la traque du désormais terroriste le plus recherché, à l'heure actuelle, en Tunisie. Contrebandiers à la solde des terroristes La cavale de Adel Ghandri pourrait avoir été orchestrée avec le concours de passeurs clandestins qui pullulent sur nos frontières avec la Libye et l'Algérie. Cette hypothèse que nous soutenons n'est en tout cas pas écartée par les enquêteurs qui travaillent sur toutes les éventualités possibles. Il est vrai que, selon la plupart des aveux que donnent les terroristes arrêtés, des contrebandiers tunisiens, mais aussi libyens et algériens, jouent le rôle de passeurs au service des jihadistes en quête d'infiltration sûre, à travers les innombrables pistes sahariennes. Et cela, bien évidemment, contre espèces sonnantes et trébuchantes en dinars, en dollars et en euros. Ce trafic qui fait l'affaire des deux parties est, hélas, encore prospère à nos frontières, en dépit de toutes les mesures préventives prises par l'Etat. Sera-t-il endigué avec la mise en place qu'on dit imminente du système de surveillance électronique de nos frontières avec la Libye ?