A chaque fois qu'un monument est spectaculairement démoli à coups de kilos d'explosifs et de marteaux piqueurs, vandalisé, brûlé, que la propagande des groupes terroristes se charge de filmer, les médias du monde entier s'empressent de relayer le déchirant spectacle Le 27 mars dernier, les plus gros titres de la presse internationale annoncent la reconquête de la ville de Palmyre, l'antique capitale de la Reine Zénobie, appelée Tadmor. Malgré la dégradation subie par le site, vieux de plus de 2000 ans, vestige de l'époque gréco-romaine, les experts estiment sa préservation à hauteur de 80%. Ce qui est en soi une très bonne nouvelle. C'est loin d'être le cas d'autres monuments aussi prestigieux et totalement réduits en poussière. La Syrie, carrefour entre l'Irak, la Turquie et Israël, détentrice de trésors archéologiques classés au patrimoine mondial, subit des bombardements programmés par Daech et affidés, tout au long de cette guerre téléguidée qui perdure. Seulement, le nombre de morts estimés à plus de 5000 par mois en moyenne, depuis juillet 2012, annonce l'ONU, de blessés et de déplacés, plus d'un million, ont relégué au second plan, ce « nettoyage culturel » comme le qualifie l'Unesco, ciblant les sites patrimoniaux de la Syrie et de l'Irak. A chaque fois qu'un monument est spectaculairement démoli à coups de kilos d'explosifs et de marteaux piqueurs, vandalisé, brûlé, que la propagande de Daech se charge de filmer, les médias du monde entier s'empressent de relayer le déchirant spectacle. Le bilan final ne sera cependant établi qu'une fois la guerre finie. En attendant, des édifices classés par l'Unesco sont rasés, des musées sont pillés et leurs objets, statues et portraits négociés dans un trafic illicite se déployant à grande échelle. Des milliers de livres et manuscrits, datant de plus 7000 ans, sont partis en fumée, comme ceux de la bibliothèque centrale de Mossoul en Irak. Destruction planifiée ou pas ? Si l'Irak et la Syrie sont spoliés de leur patrimoine à travers des guerres civiles ou dirigées à distance, il est des pays qui démolissent volontairement le leur. Les rapports des experts internationaux, dont certains requièrent l'anonymat, parlent des vieilles mosquées, monuments, tombes et mausolées anéantis à 90% en Arabie Saoudite, pour construire en lieu et place des gratte-ciels. La doctrine wahhabite considérant la visite des monuments antiques et des mausolées comme de l'idolâtrie et donc de l'apostasie. A l'inverse, le Yémen, théâtre de guerres civiles larvées, de guerres tout court et d'attentats terroristes fréquents, malgré la modestie de ses ressources, a de tout temps affiché la volonté tenace de préserver son patrimoine. Les constructions préislamiques et les statues antiques sont estampillées sur la monnaie nationale, empreinte d'une période éteinte et glorieuse où ce pays maintenant meurtri, dominait la région de la péninsule arabique. Un patrimoine visible, donc, connu et recensé. Malgré la diligence des services de l'Unesco à remettre à la « Coalition », la liste des monuments à éviter, ceux-ci sont en train de subir des bombardements acharnés et ciblés, « intentionnels » avertissent les experts. L'échelle de réactivité des médias étrangers est également intéressante à relever. Si les saccages et destructions des sites archéologiques en Syrie et en Irak sont perpétrés par « des groupes barbares », justifiant alors les larges colonnes et reportages en prime réservés à cet affront fait à l'humanité entière. Au Yémen, au contraire, ce sont des interventions menées par les troupes dites progouvernementales avec à leur tête l'Arabie Saoudite, appuyées par un « consentement international ». Par conséquent et de préférence, il a fallu passer sous silence le traitement réservé au patrimoine culturel des yéménites ou en parler succinctement, sauf dans les magazines spécialisés. Voila un constat des faits sans émotion ni amertume. La question qui demeure, y a-t-il eu planification conçue ailleurs et exécutée par les groupes jihadistes armés pour effacer de la surface de la terre l'histoire appartenant aux peuples de cette région, berceau des religions et des civilisations antiques? Difficile d'y répondre. Quelle que soit la vérité, il est pratiquement avéré, les événements le montrent, que malgré l'acharnement des terroristes et des mercenaires convoyés, les édifices anciens, les musées, les bibliothèques et les médinas ne seront pas tous réduits en poudre, il en restera toujours quelque chose, à travers les traces éternelles apposées sur la mémoire de l'humanité, à travers les racines des peuples sédentaires enfouies dans les entrailles des terres, et resteront les femmes qui enfantent.