Aujourd'hui, mercredi 6 avril, les Tunisiens et les Tunisiennes commémorent le 16e anniversaire du décès du leader Habib Bourguiba, rappelé à Dieu le 6 avril 2000. Seize ans déjà que Bourguiba, le père de la nation, le leader du mouvement national et l'édificateur de l'Etat moderne, nous a quittés, et pourtant il demeure présent dans nos esprits, dans nos comportements de tous les jours et surtout dans notre volonté inébranlable de faire accéder notre pays à la modernité et d'en faire un partenaire incontournable dans la dynamique de production de la civilisation et de l'histoire humaines. Aujourd'hui, cinq ans après la révolution de la liberté et de la dignité, on redécouvre Bourguiba, le dirigeant du mouvement national, sous la bannière destourienne, l'homme d'Etat entouré à la fin des années 50 du siècle précédent des jeunes loups qu'il a formés lui-même et qu'il a lancés dans la bataille de l'édification de l'Etat moderne, le visionnaire qui savait profiter des opportunités que lui offrait l'histoire, le projet de société qu'il a choisi pour la Tunisie (le 13 août 1956, il instituait le Code du statut personnel à la faveur d'un décret beylical sans que la constituante du 6 avril 1956 ne s'en mêle) et le diplomate qui a su placer le jeune Etat tunisien au diapasons des grandes nations par son sens de la modération, son choix du dialogue et surtout sa conviction que si la Tunisie avait une chance de se faire entendre et apprécier c'est bien en se gardant de donner des leçons aux autres, tout en défendant les causes justes et en s'armant de courage et d'audace pour dire aux grands et aux petits que la pratique de la politique reste improductive tant qu'elle n'est pas fondée sur l'éthique, la morale et le respect de l'autre. Dans les moments de commémoration des symboles, on a pris l'habitude de rappeler leurs grands faits et les héritages qu'ils ont laissés à leurs peuples et aussi aux autres peuples pour que leur mémoire reste vivace. Bourguiba a légué aux Tunisiens trois grandes œuvres : l'école publique qui a fait que notre pays est aujourd'hui considéré comme un gisement de compétences et d'expertises que plusieurs pays d'Europe nous envient et le déclarent publiquement, la libération de la femme qui est maintenant l'égale de l'homme, voire la locomotive qui tire le pays vers le progrès et la modernité en affrontant courageusement les obscurantistes de tout acabit qui cherchent désespérément à la voiler et à l'exclure, et enfin la santé publique dont le succès le plus éclatant est la politique de planification familiale qui nous a évité les déboires que connaissent plusieurs pays arabes et musulmans. Et quand on récite aujourd'hui la Fatiha à la mémoire du Combattant suprême ou qu'on lance une réflexion générale pour se remémorer ses hauts faits, ses paroles et ses discours résonnant encore dans nos oreilles, on a le devoir d'exiger de ceux qui veulent confisquer son image ou son legs sous le faux prétexte qu'ils sont ses enfants légitimes de se taire et d'avoir le courage (qu'ils n'ont pas eu quand il avait besoin de leur soutien même verbal) de laisser les Tunisiens rendre l'hommage qu'il mérite à Bourguiba, le père de tous les Tunisiens et de toutes les Tunisiennes, qu'il appelait «Abnaii al fadhel, banati al fadhlayete». Notre appel s'adresse également à ceux qui l'ont diabolisé à outrance, au point de refuser publiquement de lui souhaiter la clémence de Dieu et qui prétendent aujourd'hui être ses enfants et ses disciples. Nous leur demandons : de grâce, ne gâchez pas notre fête et ayez le courage de vous taire.