Atef Attia brode autour d'un tube du groupe Metallica qui chante la solitude de l'adolescence d'Issour dans ses premiers épanchements et sa quête de soi-même mais qui finit par un dénouement dramatique à cause d'autres adolescents qui ont leur propre manière de s'affirmer : cruelle et stupide. Sur le toit de la vieille bicoque familiale délabrée, c'était le seul endroit qu'Issour, 15 ans, pouvait appeler sien. Quelque chose le tracassait, il n'arrivait pas à trouver la sérénité, un nuage le replongeait dans sa mélancolie. Ce nuage avait un nom : Héléna Dearborne. Il a découvert qu'il l'aimait après quelques rencontres à discuter à bâtons rompus, comme seuls les adolescents savent si bien le faire. "Ouvre ton cœur Je bats ici Ouvre ton esprit Je suis ici, maintenant Ooh, quel gentil garçon tu es", chante Metallica dans Invisible Kid. Car c'est ici le premier acte dans la suite des événements qui vont chambouler la vie d'Issour et qui sont très largement inspirés d'un titre du groupe Metallica ; le groupe américain de Heavy Metal qui a une grosse réputation chez les fans de musique Underground, et dont les thèmes lyriques explorent la rage, la folie, les monstres, les drogues... Mais ce premier acte finit par une grande déception : Héléna Dearborne en aime un autre... et Issour retourne à sa solitude. Ses camarades apprennent son «infirmité» "Enfant invisible A un endroit à lui seul Enfermé dans son cerveau Je me cache à l'intérieur Ooh, quel garçon silencieux tu es Il a l'air si calme flottant autour et autour en lui-même'', chante encore Metallica dans Invisible Kid. Car Issour a d'autres problèmes. Au collège, l'éducation physique était pour lui un calvaire à tel point que son prof s'en inquiète et envoie un message à son père. Le médecin découvre qu'il a un souffle au cœur (techniquement un trou dans le cœur). Il n'a plus droit à l'effort, il ne peut plus se permettre le luxe d'attraper la grippe, il est dispensé de sport. C'est là que se situe le début du drame alors que ses camarades de classe apprennent son «infirmité» et commencent à le harceler. Sa nature introvertie ne fait qu'empirer les choses. Et puis il rencontre Skip, son anti-thèse. Extraverti, souriant, populaire, bon élève, coqueluche des filles... Il propose son amitié à Issour qui a la maladresse de la refuser. Encore un grand pas vers le drame car Skip avait deux acolytes ; Baxter et Duke, dit Dukenstein, la terreur du collège. La malédiction de la lucidité ! Le trio lui tendit un piège cruel et Issour se retrouve dans le vieux puits du parc au voisinage du collège. Sa famille reste sans nouvelles de lui pendant deux jours et quand on le trouvera il était très mal en point. Physiquement, bien sûr, à cause de ses ennuis de cœur, mais aussi psychologiquement. Le traumatisme semblait irréversible, beaucoup plus profond qu'il ne semblait à première vue. "Je me cache à l'intérieur, mais je vous montrerais De la honte et de la haine", chante encore Metallica dans Invisible Kid. Issour est devenu autre ! Bizarrement, son cerveau n'a jamais été aussi clair, ses réflexes et ses sens étaient devenus singulièrement acérés. Peut-être même plus car il percevait à présent tout son environnement avec une acuité proprement hallucinante. Le voici donc sous l'emprise de la malédiction la plus terrible qui puisse s'abattre sur un être humain, et a fortiori sur un adolescent : la lucidité ! Une lucidité qui mesure les choses à l'aune des seuls faits, sans ressentir le moindre sentiment, le moindre remords. Issour se mit à se concentrer sur les plans auxquels il pensa durant toute sa convalescence. Puis c'est le passage à l'acte. Une batte de base-ball, une nouvelle aptitude à la furtivité et voici que se révèle le nouvel Issour, terrible, ne reculant devant rien pour rendre la monnaie de leur pièce à Skip, Baxter et Duke. L'ouvrage Invisible Kid, 224p., mouture française Par Atef Attia Editions Pop Libris, 2015 Disponible à la Librairie Al Kitab, Tunis