Affirmer que le football de possession est mort reviendrait à dire que des équipes comme le Barça et le Bayern ne gagneraient plus jamais de titres et se retrouveraient toujours en échec face à des adversaires comme l'Atletico Madrid ou la Juventus... A l'heure des bilans (fin des championnats, intersaison et transferts des joueurs, analyse des différentes échéances de haut niveau, à l'instar de la Ligue des champions européenne et de l'Euro, émergence de certaines équipes avec un nouveau modèle de jeu), l'interrogation est implacable : le football de possession serait-il mort ? L'avènement de Leicester, champion-surprise d'Angleterre, la confirmation de l'Atletico de Madrid, finaliste de la Ligue des champions, les coups d'arrêt accusés par l'Allemagne et l'Espagne lors de la dernière édition de l'Euro et l'émersion des équipes favorisant l'efficacité au spectacle suscitent une vague d'enthousiasme, de plus en plus mêlée à une remise en cause de l'utilité du jeu de possession. Au surlendemain de la consécration finale du Portugal dans cette épreuve, les consultants, les observateurs et même les experts engagés par l'Uefa et la Fifa pour analyser l'évolution du football se font dans leur majorité une idée de plus en plus répandue : le football de possession serait mort. Ou pire : vivant, mais inutile. Avec la domination de plus en plus marquante des équipes qui ne maîtrisent pas le ballon, les différentes compétitions marquent une rupture franche. Vainqueur de l'Allemagne avec seulement 36% de ballons, la France serait l'une des équipes qui revendiquent, bien sûr à leur manière, la tendance de l'efficacité. Comme quoi, l'avenir est au jeu direct. Peu de temps auparavant, mais toujours sur la même lancée et avec les mêmes considérations, l'Atletico Madrid avait successivement éliminé en Ligue des champions le Barça et le Bayern. Notamment grâce à un jeu très restrictif. Mettant ainsi en échec le jeu de possession des deux grands favoris de la compétition. Autant de résultats qui suscitent interrogation et débat. Et pour beaucoup de techniciens, d'observateurs et d'experts, la possession de la balle n'est plus gage de sûreté. A l'exception du Barça, et tout particulièrement celui de 2015, les formations maîtrisant le ballon à outrance sont plus que jamais contrecarrées. La possession de balle stérile avec des redoublements de passes aux abords de la surface, des joueurs installés dans le camp adverse et des récupérations hautes, façon Barcelone, Bayern, semblent s'essouffler au profit des équipes qui se projettent le plus rapidement possible vers l'avant. Seul le résultat compte et peu importe la manière. "Comandante" Simeone Voici le Che Guevara du football moderne. Diego Simeone catapulté à la tête du soulèvement contre le football de possession : «La révolte contre le tiki-taka». Et comme une révolution, Leicester était sacré champion d'Angleterre en présentant pourtant le 18e taux de possession de Premier League, (44,8%) loin derrière Arsenal, Tottenham ou les deux Manchester (tous au-dessus des 55%). Devant cette dictature d'une construction patiente et lente, l'alternative se réveille. Paradoxalement, elle commence à venir d'Espagne!... Le Real, avec son trident offensif basé sur la vitesse et la profondeur, mais surtout l'Atletico, construit autour d'un harcèlement tout-terrain ponctué de contre-attaques meurtrières... Mais affirmer que le football de possession est mort reviendrait à dire que des équipes, comme le Barça et le Bayern, ne gagneraient plus jamais de titres et se retrouveraient toujours en échec face à des équipes comme l'Atletico ou la Juventus. Ce qui ne peut pas franchement être le cas. Si les Bavarois ont échoué d'un rien, ils avaient passé avec succès l'obstacle turinois en huitième de finale avec 75% de possession de balle au match retour. Le Bayern en est l'exemple parfait de ces équipes qui ont survécu aux contraintes et aux restrictions tactiques. Vainqueurs de la Ligue des champions en 2013 contre Dortmund (2-1) avec Jupp Heynckes et un jeu tout en verticalité, les Allemands ont évolué et se sont même transformés avec l'arrivée de Guardiola. Le Catalan a changé le style de jeu, pourtant au sommet, du Bayern pour instaurer la possession de balle à outrance qui lui avait apporté tant de résultats avec le FC Barcelone entre 2009 et 2012. Sans être la panacée, la possession de la balle reste majoritairement indissociable des meilleures équipes. Alors non, le football de possession n'est pas mort et va continuer à gagner. Erigé en principe absolu, ce modèle a, et continuera certainement à dominer les tableaux noirs. Chez nous, des équipes comme le CSS ou encore le COT de 1988, l'Espérance d'Amarildo, le CA de 1992 ont révolutionné le football tunisien. Leur jeu de possession, dérivé extrême du traditionnel a fortement rabattu les cartes et ouvert la confiscation de la balle par une multiplication de passes courtes afin de déplacer le bloc adverse pour trouver la faille. Elles avaient atteint des sommets en la matière avec une plus grande possession que l'adversaire ! Aujourd'hui, les équipes qui ont survécu, et pratiquement toutes les autres, envisagent une nouvelle façon de gagner. Le jeu de possession semble connaître son chant du cygne dans la compétition tunisienne.