Le spectre de la grève du personnel hôtelier plane de nouveau. Cette évidence s'abat sur les frêles épaules des hôteliers dont l'importance des investissements mobilisés et l'ampleur de leurs charges d'exploitation les acculent à tirer le diable par la queue. Un débrayage de ce genre fera disparaître la destination Tunisie des écrans du radar des TO à court terme La veille du rendez-vous le plus important de la rentrée touristique, à savoir le salon IFM-Top Resa, qui se tiendra à Paris du 20 au 23 septembre 2016, les hôteliers tunisiens iront croiser le fer avec les destinations concurrentes avec un avis de grève des employés du secteur. En même temps, Jean-Marc Ayrault, ministre des Affaires étrangères français, annonce un «effort exceptionnel» sur le soutien au secteur du tourisme en France pour porter l'aide à 10 millions d'euros dès cette année. Visit California annonce, pour sa part, un événement par jour pour la Californie sur Top Resa, Aéroport de Paris (ADP) présentera ses nouveaux services pour soutenir le tourisme, soit chacun brandit ses armes de relance, sauf la Tunisie. Et pour cause, une crise sociale pointe à l'horizon. A cet effet, le président de la FTH, Radhouane Ben Salah, de retour d'une réunion avec les représentants de l'Ugtt, a annoncé, lors d'une conférence de presse tenue hier avec des trémolos dans la voix, l'échec des négociations avec la partie syndicale, où chacun a campé sur sa position. En effet, les syndicats revendiquent une majoration salariale au titre de l'année 2015, que les patrons des hôtels considèrent comme une année calamiteuse, voire désastreuse pour le secteur. M. Ben Salah, qui admet que la revendication sociale est légale et se justifie par l'érosion du pouvoir d'achat et de la dépréciation du cours du dinar, avoue des bouts des lèvres que les hôteliers frôlent la faillite et que c'est déjà un miracle s'ils arrivent à garder le personnel et à payer les salaires. Un secteur cliniquement mort Chiffres à l'appui, il signale que l'année 2015 a enregistré une baisse de 13 millions de nuitées, soit 16 millions de nuitées contre 29 millions de nuitées en 2014. Les revenus ont également chuté de façon vertigineuse avec des recettes de l'ordre de 2.350 millions de dinars contre 3.650 millions de dinars en 2014. Le taux d'occupation a été également touché de plein fouet avec une régression de 27% par rapport à la même période en 2014. Pour ainsi dire, tous les indicateurs sont au rouge et le résultat brut d'exploitation des unités hôtelières est au seuil le plus critique de l'histoire du tourisme tunisien. « Comment voulez-vous, dans un contexte aussi en berne, approuver une majoration salariale ?», s'interroge-t-il. Certes, des mesures de soutien ont été annoncées en 2015 au lendemain des attentats meurtriers qui ont plombé la saison, il n'empêche « 90% de ces mesures ne sont pas entrées en vigueur ou ont été dénaturées par des décrets d'application draconienne », a expliqué le président de la FTH. A cet effet, la situation devient intenable et la grève ne fera qu'achever un secteur déjà à genoux, ajoute Jalel Henchiri, vice-président de la FTH. De ce fait, un appel a été lancé aux structures syndicales pour permettre, en cas de grève, un service minimum. Car même la petite bouffée d'oxygène qu'apporte l'embellie sur le marché russe risque de faire voler en éclats les performances de l'arrière-saison, si les clients russes se trouvent dans cet imbroglio socioéconomique, avertit M. Ben Salah. Il est temps au chef du gouvernement d'intervenir pour venir en aide à un secteur qui agonise et dont les conséquences économiques sur les autres secteurs se sont déjà fait ressentir, en l'occurrence sur l'agro-alimentaire qui a accusé un déficit au niveau de la consommation due à la baisse de la fréquentation touristique, rappelle Habib Bouslama, président de la Fédération de l'hôtellerie au Cap Bon. La solution passerait d'abord par l'activation des mesures préconisées, par la résolution de l'épineuse question de l'endettement ainsi que par une stratégie claire et un plan de relance du tourisme tunisien, estime M. Ben Salah. Il a insisté sur la nécessité de renforcer les actions de promotion de la destination et de mettre l'accent sur les régions en situation de fragilité comme le sud où le recul des arrivées internationales est «plus marqué ».