Par Jalel Mestiri L'avenir de la sélection aurait dû être charpenté autour d'une réflexion portée par de grandes idées, à la fois classiques et modernes, personnelles et publiques. Il n'y a justement rien de tel pour disserter et alterner périodes et stratégie. L'image du football tunisien dépend énormément du statut et du rang qu'occupe généralement la sélection. Celle-ci est souvent jugée aux résultats. Mais aussi au jeu qu'elle développe et à l'ambiance qui y règne. Si l'on doit parler des choses qui font la raison d'être de l'équipe nationale, l'on pense automatiquement au parcours qu'elle est susceptible d'accomplir dans l'épreuve de la coupe du monde. Tout ce qu'elle laisse entrevoir, que ce soit dans les éliminatoires ou dans les phases finales est de nature à conditionner son rendement et le comportement de ses joueurs pour la suite des matches. Le roman de la sélection en coupe du monde est une belle piste de réflexion. Des fois, elle en a poussé la démonstration jusqu'à la perfection. Le souvenir de l'Argentine 78 est toujours aussi vivant que si c'était hier. Les artisans, les héros de cette épopée ont réussi à accréditer l'idée selon laquelle la sélection est bel et bien le rassemblement des joueurs les plus costauds, avec notamment une expression à base de talents individuels et collectifs additionnés et qui ont une part capitale dans les performances de ces temps-là. En revanche, rares sont les fois où l'équipe de Tunisie a prouvé qu'elle a vraiment du savoir-faire dans ce domaine. Crise de gouvernance, crise d'identité, crise de jeu et d'accomplissement, pendant de longues années, on avait cumulé les ennuis. La dernière présence de la sélection en phase finale de la coupe du monde remonte à 2006. C'est-à-dire qu'elle avait raté deux éditions consécutives : 2010 et 2014. Cela dépasse largement le débat autour de la présence ou de l'absence de l'équipe dans l'épreuve la plus prestigieuse au monde. Aujourd'hui, la question essentielle est de savoir si la sélection actuelle est capable de renouer avec le Mondial. Si elle a vraiment les moyens et les arguments nécessaires pour se qualifier en Russie. A première vue, le chemin n'est pas aussi tortueux que celui de certaines équipes des autres groupes. Sur le papier, la sélection part favorite. Mais dans la réalité, beaucoup de choses sont à prendre en considération. En dépit de la qualification à la phase finale de la CAN 2017 au Gabon, beaucoup de choses sont encore à revoir. On pense bien entendu aux choix de Kasperczak et l'on se dit que certains joueurs n'ont plus leur place au sein de l'équipe et que d'autres méritent qu'on leur accorde la chance qu'il faut. On pense aussi à l'entourage de la sélection et l'on se dit que faute de projet et de stratégie, on se trompe, du côté du bureau fédéral, sur les priorités, les tenants et les aboutissants de la sélection. Plus que jamais, la fédération ne peut plus continuer à être gérée sur fond de polémiques, ou encore demeurer la cible de certaines personnes qui s'érigent en protecteurs au nom de l'intérêt supérieur du football tunisien. En continuant à s'égarer, ils ne se contentent pas de se tromper, ils deviennent les catalyseurs d'une inutile paranoïa inutile, le moteur d'une potentielle fébrilité et, au final, l'incarnation d'un manque de dimension. L'avenir de la sélection aurait dû être charpenté autour d'une réflexion portée par de grandes idées, à la fois classiques et modernes, personnelles et publiques. Il n'y a justement rien de tel pour disserter et alterner périodes et stratégie. L'équipe de Tunisie ne saurait entreprendre sa réhabilitation tant que les plaies du passé sont encore ouvertes. L'histoire nous a souvent offert de bien édifiants exemples d'hommes qui se sont engagés au service de la sélection. Chacun doit savoir aujourd'hui que la responsabilité sportive n'est pas un métier. Elle est d'abord don de soi pour le bien du club. Après le feu de broussaille, l'herbe repoussera. On veut l'espérer. Mais peut-on vraiment être persuadés que le terrain vert reprendra bientôt ses droits. L'on sait cependant que dans son expression collective et dans le message qu'elle s'efforce de délivrer, l'équipe de Tunisie donne aujourd'hui l'impression de pouvoir évoluer. Même si elle continue à souffrir de certains maux traditionnels, enfouis au plus profond d'elle-même, elle pourrait s'orienter vers de nouvelles tendances de nature à relooker son style, à étoffer son registre, en y ajoutant d'autres valeurs et d'autres atouts. Ce qu'elle laisse entrevoir et ce qu'elle accomplit sur le terrain n'entrent pas certes dans le jeu le plus dynamique qui nous soit offert, mais quelque part ça pourrait tenir...