« Il est urgent de multiplier les espaces culturels et éducatifs pour lutter contre le phénomène de la violence », a souligné, hier, Amara Ben Romdhane, directeur du Centre du développement social et de l'autonomisation (Sdec). Dans une déclaration à l'agence TAP en marge de l'atelier régional «L'école en tant que vecteur essentiel pour prévenir la violence et promouvoir les valeurs de l'égalité femmes-hommes», organisé à l'Institut français de Tunisie (IFT) à Tunis dans le cadre du projet « Former des citoyens responsables «, Amara Ben Romdhane a mis l'accent sur l'importance d'alléger les programmes éducatifs actuels et de créer des clubs culturels dans tous les établissements scolaires pour permettre aux jeunes de s'exprimer à travers la culture et devenir de bons citoyens responsables. L'intervenant a expliqué que le projet « Former des citoyens responsables «, lancé depuis mai 2014 et qui s'étale sur une période de 36 mois, s'inscrit dans ce cadre et vise à renforcer le rôle de l'école comme principal vecteur de transmission des valeurs de développement durable et inclusif, de la liberté etde l'égalité des sexes et à promouvoir ces valeurs à travers l'élaboration d'un programme d'éducation à la citoyenneté rénové en Tunisie et au Maroc. Revoir l'éducation civique Ben Romdhane a fait savoir que dans le cadre de ce même programme, 8 ou 9 enseignants du secondaire des différentes spécialités travaillant dans les régions de Nabeul, Siliana et le Kef seront formés aux nouvelles méthodes permettant d'inculquer aux élèves les valeurs universelles des droits de l'Homme, de l'égalité et de la responsabilité. Dans ce contexte, Essaid Motassim, expert international du projet, a estimé que les enseignants d'éducation civique dans les établissements scolaires ne sont souvent pas formés à ces valeurs des droits de l'homme et du respect de l'autre. « L'éducation civique ne doit pas être une simple matière à enseigner et qui sera sanctionnée par un examen. Il s'agit plutôt d'inculquer aux élèves les bons comportements afin qu'ils soient de meilleurs citoyens », a-t-il dit. L'intervenant a regretté que malgré les efforts fournis par les gouvernements, le phénomène de la violence ne cesse de prendre de l'ampleur, notamment en milieu scolaire, et est en train de prendre différentes formes. « ça commence par l'agression verbale et orale et ça évolue vers le vandalisme, l'alcoolisme et même le terrorisme », a-t-il signalé. L'école en crise L'expert a expliqué que l'activité principale du projet «Former des citoyens responsables» est l'analyse conjointe des manuels existants dans les établissements secondaires tunisiens et marocains en matière d'éducation à la citoyenneté et d'égalité entre les hommes et les femmes et la production d'une version rénovée du cursus national actuel, complétée par une formation des enseignants en matière d'éducation à la citoyenneté et leur mise en réseau au niveau national et régional. Il se décline en trois étapes principales consécutives, à savoir l'étude diagnostic en premier lieu, la réalisation de guides sur la citoyenneté responsable, la culture de la non-violence et l'approche genre pour les enseignants et de manuels d'éducation à la citoyenneté pour les élèves en second lieu, la formation des enseignants et la mise en œuvre du projet en troisième lieu. « Actuellement, le projet, promu par l'Union pour la Méditerranée et mis en œuvre par l'organisation espagnole Ideaborn avec le soutien financier du Royaume de Norvège et de la Principauté de Monaco, est à la fin de la deuxième phase dans les deux pays «, a-t-il précisé. Intervenant à cette occasion, Delphine Borione, secrétaire générale adjointe principale, chargée des affaires civiles et sociales à l'Union pour la Méditerranée(UPM), a souligné que l'école a toujours joué un rôle central en tant que formateur d'individus et de citoyens responsables et capables de faire des choix éclairés dans l'intérêt de la communauté, fondés sur des valeurs citoyennes. « Elle prend ainsi une grande part dans la prévention de la violence et la promotion des principes de l'égalité », a-t-elle soutenu. Elle a toutefois reconnu que l'école est aujourd'hui en crise au regard de cette fonction centrale. « Au niveau de la région euroméditerranéenne par exemple, la complexité des crises politiques, sociales et économiques a contribué à générer un certain nombre de problèmes sociaux tels que l'exclusion sociale, la marginalisation et une hausse visible dans toutes les sociétés de la région, de la fréquence de diverses manifestations de violence, principalement chez les jeunes », a-t-elle ajouté. Elle a, en outre, signalé que « la dégradation des valeurs, notamment chez les jeunes, est aujourd'hui une réalité qui exige une réponse urgente où le système éducatif et l'école auront un grand rôle à jouer ».