Les dettes contractées dans les hôpitaux publics s'élèvent à des dizaines de millions de dinars mais l'Etat promet de venir à la rescousse. Certes, les hôpitaux publics croulent sous le poids de ces créances mais ce n'est pas la seule raison qui en fait des établissements pointés du doigt à cause de leur vétusté, insalubrité et incommodité. Le séminaire sur « l'hôpital tunisien de demain », organisé mardi par l'Institut tunisien des études stratégiques (Ites), en collaboration avec la Fondation Konrad Adenauer Stifung et en présence des professionnels du secteur, aura permis de tracer les contours de ce que devrait être l'hôpital de demain en Tunisie. Compte rendu. « L'état des hôpitaux publics aujourd'hui ne peut être que qualifié de désolant. De plus, il est couplé à un grave problème de gouvernance, du fait d'un déficit financier aigu. Il est primordial donc de revoir les méthodes de gestion des hôpitaux publics, de conclure des partenariats entre le secteurs publics et privé, et de valoriser les nouvelles technologies dans ce domaine », a annoncé M. Hatem Ben Salem, directeur général de l'Institut tunisien des études stratégiques (Ites), à l'ouverture des travaux du séminaire. Etat des lieux Mme Nabiha Falfoul Borsali, directrice générale de la santé, a précisé que les dettes enregistrées dans les hôpitaux publics s'élèvent à des dizaines de millions de dinars. Il n'empêche, l'Etat a promis de fournir les fonds nécessaires pour couvrir le déficit financier dans les hôpitaux. « A ce titre, un plan d'action sera mis en place afin de remédier à ces problèmes, améliorer la bonne gouvernance et accélérer l'informatisation des hôpitaux de première ligne», a-t-elle indiqué. « Actuellement, nous disposons de plus de 2.180 dispensaires en Tunisie et nous œuvrons à appliquer un projet pilote sur plus de 30 dispensaires afin d'améliorer l'accueil, la qualité des services et le processus d'accréditation », explique la directrice. Quant à la réforme du secteur, elle note plusieurs indicateurs qui doivent être pris en considération, notamment le vieillissement de la population, la distance entre la population et la structure hospitalière trop élevée, surtout au sud et à l'ouest du pays. « A ce titre, les axes prioritaires du ministère actuellement sont d'améliorer la répartition de la démographie médicale et le service de la première ligne, et de la médecine de famille, promouvoir la prévention dans tous les secteurs : lutte contre le tabac et promouvoir le projet de partenariat privé, pour améliorer les deux secteurs qui aspirent à répondre aux attentes du citoyen afin d'assurer un environnement hospitalier confortable », ajoute-t-elle. Passer à l'action, aux réformes Pour sa part, le Professeur Noureddine Bouzouaya, président du comité de pilotage, a précisé dans son allocution que mettre en place un système centré sur les besoins du citoyen, gérer les économies pour éviter les faillites, figurent parmi les priorités du secteur à l'heure actuelle. « Aujourd'hui, lorsqu'on parle d'un hôpital public, on parle de mauvais accueil, de surnombre, de mauvaise gouvernance... alors que nous voulons un hôpital qui corresponde au modèle typiquement tunisien tout en s'inspirant de l'exemple allemand», a-t-il souligné. Et d'ajouter que « les hôpitaux ne constituent pas une catégorie homogène, car le monde de l'hôpital est complexe (architecture de l'espace, architecture technique, des systèmes d'information et ceux des ressources humaines) ». « Aujourd'hui, il faut changer, participer et mutualiser les efforts des professionnels de la santé, puisqu'il il est temps de passer de la vision à la décision et réformer le secteur», précise-t-il. L'hôpital tunisien, c'est toute une histoire Evoquant l'histoire des hôpitaux tunisiens, Mme Nabiha Falfoul Borsali, directrice générale de la santé, a expliqué que «la plupart de nos hôpitaux ont été construits depuis près d'un siècle, leur organisation n'est pas claire et la circulation y est difficile. Ce mode architectural qui a répondu à des besoins précis d'une époque donnée commence à devenir obsolète pour certains hôpitaux en plus de leur vétusté. Pour remédier à cela, des opérations ponctuelles sont réalisées pour contenter les désirs des professionnels, de la population ou des responsables, de manière parfois improvisée ne répondant malheureusement pas à une vision stratégique, ni à l'échelle locale ni nationale et ce, notamment, par manque d'outils adéquats de programmation de plan directeur, de projet médical qui constituent une pierre angulaire et devraient accompagner les profondes mutations que connaît un hôpital ». Elle s'est interrogée également sur la manière de faire évoluer et d'adapter les hôpitaux à leur époque. « Quelles réglementations régissent leur construction ? Sont-elles en harmonie avec les normes internationales pour répondre aux besoins de leurs usagers ? Que peuvent leur apporter les nouvelles technologies ? Quelles sont les alternatives à l'hospitalisation classique ? Quel PPP ? En un mot : quel sera l'hôpital tunisien de demain à partir des modèles encore en cours aujourd'hui ? ». Dans le même sillage, le Dr Mohamed Dhraief affirme qu'il faut « mettre en place une vision stratégique qui semble être absente actuellement dans les hôpitaux publics, promouvoir le plan quinquennal qui prévoit l'amélioration du secteur dans plusieurs volets, à l'instar de la bonne gouvernance, profiter de la valeur ajoutée des technologies et relever le défi des régions et préserver l'environnement ». Une dernière intervention intitulée « Les principes du système de santé en Allemagne », présentée par Bernhard Wedeking, aura permis aux participants de prendre connaissance du modèle de santé allemand. Repères — La capacité d'accueil des hôpitaux publics est estimée à 20 mille lits. — Le nombre des professionnels de santé est estimé à 29 mille personnes. — Le nombre de consultations médicales dans les hôpitaux universitaires est évalué à 2.854.000, et 1.500.000 dans les hôpitaux régionaux.