Inscrit à la compétition officielle de la première œuvre pendant les JCC, le film de Alaeddine Slim «Akher Wahed Fina» est une fable philosophique captivante. Le film est d'une facture peu ordinaire, du moins pour le cinéma tunisien. Une facture visuelle, narrative et sonore bourrée par l'idée du réalisateur Alaeddine Slim qui signe son premier long métrage. À aucun moment ces trois axes ne sont dissociés l'un de l'autre pour s'éloigner de l'idée centrale et obsessionnelle du film. Ce n'est pas seulement la narration qui est au volant avec l'image en tant que convoyeur et le son en tant que système technique et mécanique... Tous les trois sont au volant en même temps et le film démarre ainsi et nous prend comme un passager sur la route. Et même si ce passager hésite à voir un film de 95 minutes sans dialogues, il se trouve déjà embarqué dès les premières minutes. Le synopsis décrit l'histoire d'une tentative de traversée maritime illégale de «N», jeune subsaharien, qui échoue en pleine mer. Cette traversée s'avérera un nouveau chemin pour un territoire inconnu pour le personnage principal «N». Ce dernier serait amené à faire des rencontres singulières tout au long de son parcours et à rencontrer une image altérée de lui-même. Le film commence dans un no man's land avec deux inconnus qui traversent une terre nue et sans vie. Ensuite on découvre que le personnage principal du film, interprété par Jawhar Soudani, tente d'entamer un périple pour fuir quelque chose ou pour découvrir un autre monde. Un périple qui va le conduire à travers des espaces très différents : du paysage lunaire à la forêt en passant par la ville et la mer. Cette écriture avec l'espace est l'un des défis de ce film qui tente d'alterner les paysages afin de définir non seulement le personnage face à des décors différents mais de dire en quelque sorte que quel que soit le décor, la solitude et l'angoisse de l'être humain sont les mêmes. C'est comme si ce personnage venu de nulle part et allant nulle part était confronté à la dure réalité de l'espèce humaine. Philosophique ? Oui. Car à notre sens, le film est une fable philosophique construite sur le périple d'un personnage qui effectue une traversée pour quitter le pays. Cette traversée devient alors un voyage initiatique à l'intérieur de l'âme humaine dans tout ce qu'elle a de primitif et d'existentiel. Mais que le grand public ne s'effraie pas ! C'est un film d'auteur qu'il peut très bien aller voir dans les salles parce que le personnage et la structure narrative accrochent. Bien plus! On découvre à quel point l'image et la bande sonore (sans les dialogues) sont capables d'accomplir des exploits... Rappelons que c'est Amine Messadi et Moncef Taleb qui ont respectivement assuré ce rôle. Le jeu de Jawhar Soudani est aussi d'une grande justesse. Celui de Fethi Akkari également. Une grande expérience théâtrale qu'on trouve résumée dans des séquences fortes et sans la moindre parole. Durant la semaine de la critique au Venice Festival Film, la Biennale di Venezia, le film «The Last of Us» a reçu le Prix de la première œuvre ainsi que le prix de la meilleure contribution technique. Conçu et monté dans une indépendance totale, «The Last of Us» représente un nouveau modèle de fabrication des films en Tunisie. Quatre sociétés de production s'y sont associées : Exit productions, Inside productions, Madbox et SVP.