La menace de deux projets de loi contre les droits des femmes mobilise l'Association Tunisienne des Femmes Démocrates (ATFD). Face à ces initiatives législatives controversées, l'ATFD monte au créneau et appelle à la résistance, dans un communiqué rendu public le 10 mai 2025. L'Association Tunisienne des Femmes Démocrates (ATFD) s'oppose fermement à deux projets de loi qu'elle juge "dangereux" et "rétrogrades" pour les droits des femmes tunisiennes. Ces initiatives législatives visent à autoriser le divorce hors tribunal et à accorder une amnistie générale aux maris qui refusent de payer les pensions alimentaires. Présentées respectivement par 101 députés pour le premier texte et un groupe parlementaire pour le second, ces propositions de loi suscitent l'inquiétude des défenseurs des droits des femmes qui y voient une "attaque directe" contre les acquis historiques inscrits dans le Code du statut personnel tunisien. Un statut juridique pionnier menacé Le premier projet contesté prévoit la modification de l'article 32 du Code du statut personnel pour permettre aux couples de divorcer devant des notaires, sans passer par un tribunal. Selon les initiateurs du projet de loi, cette mesure viserait à "alléger la charge des tribunaux" et à "simplifier les procédures de divorce". Le second projet propose une amnistie générale pour les maris et pères condamnés pour non-paiement de pension alimentaire, sous prétexte de "désengorger les prisons" et de "préserver l'unité familiale". "Ces initiatives reflètent une vision conservatrice et traditionnelle qui encourage les maris à se soustraire à leurs responsabilités familiales et porte atteinte aux droits humains des femmes", dénonce l'ATFD dans son communiqué. L'association, qui s'appuie sur son expérience de terrain auprès des victimes de violences, alerte sur les dangers que représenteraient ces modifications législatives. "Sans l'intervention judiciaire dans les cas de divorce, on ouvre la porte à la violence institutionnelle et à la violation des droits des femmes et des enfants", avertit l'ATFD. L'organisation souligne que de nombreuses femmes acceptent déjà des divorces par consentement mutuel sous la pression ou par méconnaissance de leurs droits. "L'absence du juge affaiblirait considérablement la position des femmes dans une relation déjà déséquilibrée sur les plans juridique, social et économique", précise le communiqué. Un appel à la mobilisation Face à ces menaces, l'ATFD appelle au retrait immédiat du projet de divorce par-devant notaire et rejette "toutes les initiatives qui compromettent le rôle judiciaire et celui des tribunaux dans les affaires familiales". L'association préconise plutôt un renforcement de la justice familiale et du juge conciliateur, ainsi qu'une réforme du Fonds de garantie de la pension alimentaire pour assurer une meilleure protection sociale aux femmes divorcées et à leurs enfants. "Nous appelons les associations féminines et féministes, les Tunisiennes et toutes les composantes de la société civile à se mobiliser pour défendre les acquis des femmes et les développer, non les détruire", lance l'ATFD qui promet de "résister à ces lois discriminatoires qui ne visent qu'à bâtir une société inégalitaire". L'organisation réaffirme son attachement au Code du statut personnel comme "cadre juridique important qui nécessite une évolution, non une régression", et plaide pour l'élimination de ses dispositions discriminatoires conformément aux conventions internationales ratifiées par la Tunisie, notamment la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes.