Une note analytique publiée dans le cadre du projet Nahkiw Iktissad (Parlons économie ), financé par l'Union européenne et mis en œuvre par Expertise France, révèle que 1,6 million de Tunisiens travaillent dans le secteur informel, représentant environ 44,8 % des actifs en 2019. Ce document met en lumière l'ampleur du phénomène et ses répercussions sociales et économiques, tout en proposant des pistes concrètes pour une transition vers une économie structurée. Des secteurs clés dominés par l'informel Selon l'étude, les activités informelles se concentrent principalement dans trois secteurs : l'agriculture, le bâtiment et le commerce. Ces domaines absorbent près des deux tiers des travailleurs non déclarés, souvent dans des conditions de précarité extrême. Le phénomène est particulièrement marqué dans les zones rurales, notamment dans l'ouest du pays, où l'importance de l'activité agricole et l'absence d'alternatives formelles accentuent la dépendance à ce type d'économie. D'après les dernières données recueillies par l'Institut national de la statistique (INS) et l'Observatoire national de l'emploi et des compétences, 87 % des petits employeurs et travailleurs indépendants opérant dans l'économie parallèle gagnent moins de 600 dinars par mois. Il s'agit majoritairement de vendeurs ambulants, d'artisans et de petits agriculteurs aux ressources limitées. Pour amorcer une sortie du secteur informel, la note recommande une stratégie graduelle, s'appuyant sur trois axes principaux à savoir : protéger les catégories vulnérables, soutenir les petits employeurs et faciliter l'intégration progressive des travailleurs dans le circuit économique formel. Le rôle clé de l'Etat et de la numérisation Le rapport souligne en outre l'importance du rôle des autorités publiques pour accompagner cette transition. Il insiste sur le besoin de renforcer les moyens des administrations, notamment dans les domaines de la fiscalité simplifiée, de la protection sociale et des inspections du travail. La digitalisation est également identifiée comme un levier essentiel pour mieux suivre les activités économiques et renforcer la transparence. Finalement et non moins important, la note appelle à intensifier les campagnes de sensibilisation à destination des travailleurs et employeurs pour les informer des avantages de l'économie formelle : retraite, couverture sociale, accès au crédit, etc. Le rapport met aussi l'accent sur la nécessité de restaurer un climat de confiance entre l'Etat et les citoyens. "Si les citoyens perçoivent que la loi n'est pas appliquée de manière équitable, ils refuseront de rejoindre un système perçu comme injuste, qui pénalise en premier lieu les plus vulnérables", a-t-il, souligné.