Hier, la Tunisie s'est dotée officiellement de son Conseil supérieur de la magistrature. On attend maintenant l'élection du président et la désignation des quatre magistrats qui représenteront le Conseil à la Cour constitutionnelle Finalement et à l'issue de moult tergiversations et désaccords entre l'Association des magistrats tunisiens (AMT) et le Syndicat des magistrats tunisiens (SMT) (grèves soutenues par l'AMT et boudées par le SMT et accusations à l'encontre de Youssef Chahed, chef du gouvernement, lui reprochant de mettre sous sa coupe les magistrats), le Conseil supérieur de la magistrature (CSM) a tenu, hier après-midi, sa première réunion qui a démarré à 16h00, et qui se poursuivait encore au moment où nous mettions sous presse. Le quorum étant atteint à la suite de la désignation des membres manquants, le Conseil s'est réuni conformément à la loi régissant son action. «Et à partir d'aujourd'hui (hier), nous pouvons dire que la Tunisie s'est enfin dotée de son Conseil supérieur de la magistrature qui vient remplacer l'Instance provisoire de l'ordre judiciaire (Ipoj) devenue caduque depuis les élections tenues le 14 novembre dernier pour choisir les 45 membres du Conseil à raison de 15 pour la justice judiciaire, 15 pour la justice administrative et 15 pour la justice financière (c'est-à-dire la Cour des comptes)», confie à La Presse la magistrate Raoudha Laâbidi, ex-présidente du Syndicat des magistrats tunisiens (SMT). La question qui se pose maintenant est la suivante : qui va présider le Conseil supérieur de la magistrature ? «Pour le moment, on n'en est pas encore là puisqu'il faut commencer par élire les présidents des trois composantes du Conseil. Quant au président du CSM, il sera élu, dès que les postes vacants auront connu leurs titulaires», précise-t-elle. L'AMT, qui s'oppose à la tenue de la première réunion du Conseil, synonyme de l'annonce de son entrée en fonction, peut-elle attaquer en justice la réunion d'hier et faire annuler ses résultats? «L'Association pouvait le faire avant que le quorum ne soit atteint. Maintenant qu'il l'a été, le Conseil ne peut plus souffrir aucune contestation ou être l'objet d'un avis ou d'une décision juridique le déclarant caduc», répond Raoudha Laâbidi. Pourtant, les membres de l'AMT continuent leur mobilisation contre le Conseil dans sa composition actuelle. Pas plus tard qu'hier matin, les magistrats de Médenine reprochaient à Youssef Chahed «sa propension à mettre sous sa coupe le Conseil et à faire en sorte que le pouvoir judiciaire soit considéré comme dépendant du pouvoir exécutif, comme à l'époque révolue quand les magistrats étaient considérés comme des fonctionnaires qui ne faisaient qu'appliquer les ordres d'en haut». En tout état de cause, l'entrée en fonction du Conseil supérieur de la magistrature, même si Raoudha Karafi, présidente de l'AMT, et Ahmed Rahmouni, président de l'Observatoire tunisien de l'indépendance de la magistrature (Otim), continueront à mobiliser leurs troupes à son encontre ouvre la voie à la naissance officielle de la Cour constitutionnelle dans la mesure où le Conseil supérieur de la magistrature aura à désigner quatre parmi ses membres pour siéger à la Cour constitutionnelle aux côtés des 12 autres membres à choisir, à parts égales, par le président de la République, le président du gouvernement et le président du Parlement.