• La 28e édition du festival de la Médina a pris fin le 7 septembre dernier sur une réflexion approfondie, menée par un comité directeur conscient du mécanisme de cette belle aventure, de ses enjeux et de l'ensemble des éléments qui déterminent le succès de cette entreprise Le festival de la Médina a, beaucoup mieux que dans les éditions précédentes, fait l'unanimité cette année. Procédant d'une façon méthodique qui ne laisse pas de place à l'improvisation, l'immobilisme et qui ne fait pas dans le surplace, les membres du comité directeur du festival se sont investis dans une démarche intellectuelle et une manière de penser et de raisonner, loin de toute préoccupation matérielle, qui ont finalement abouti à créer le succès espéré; celui d'agir de façon à contenter et satisfaire le désir et assouvir un vrai besoin d'évasion. Prolifération des spectacles syriens Certains spectacles, par la richesse, la profondeur et la qualité de leurs ressources, ont été déterminants dans la réussite totale et entière du festival. L'engouement et l'enthousiasme du public étaient comme un écho produit dans le cœur et l'esprit par les résonances profondes des amplitudes vocales, instrumentales et esthétiques des artistes. Une combinaison parfaite de toutes les cartes. Et là, il faudra évoquer la déferlante syrienne. Il y eut le récital de guitare d'Ayman Jarjour. Il y eut également le spectacle des «Salatines du tarab» avec les envoûtants chants alépins, conduits par Ahmed Azraq et qui continuent de séduire tous les publics. Une mention spéciale pour la diva syrienne Lobana Alcantar, interprète classique des airs d'opéra qu'elle maîtrise avec une rare maestria, au point de les combiner et de les adapter au répertoire des Libanaises Ismahan et Faïrouz et de l'Egyptienne Leïla Mourad, dans un heureux arrangement par l'exécution de la voix et des instruments. Grandeur et majesté du ballet Inana Une révélation nous est venue du ballet «Inana». Que dire de plus de ce ballet de danse chorégraphique qui n'a pas encore été dit ici en Tunisie ou ailleurs dans les pays où l'ensemble s'est produit ? Art vivant et en perpétuelle évolution, les cent danseurs et danseuses, formés à rude école, maintiennent une tradition qui se perpétue. Celle de la substance de la danse hautement élaborée, synonyme de grâce et d'harmonie. Placé sous la direction artistique d'une transfuge du Bolchoï, la chorégraphe russe Elena Belova, le ballet Inana nous a présenté un spectacle narratif qui fait ressortir l'importance du patrimoine ancestral oriental. A travers des chorégraphies spectaculaires sublimant la richesse d'une civilisation millénaire, les danses d'Inana ont atteint un haut degré de perfection en alternant l'imaginaire et le réel. Ainsi, obéissant à des règles strictes et à une technique savante, les danses orientales sont le fruit d'une tradition codifiée très ancienne s'orientant actuellement vers un brassage et une refonte d'expériences diverses. En développant le ballet à thème qui cherche à faire réfléchir, Inana a ouvert la voie au ballet de danse ancienne en réalisant les œuvres marquantes et en essaimant dans le monde entier. Quid de la prochaine édition? Le triomphe de cette troupe nous laisse perplexes et nous plonge dans une longue réflexion sur l'absence chez nous d'un véritable ballet de l'importance d'Inana. Ne sommes-nous pas assez performants ou outillés pour affronter une pareille entreprise et relever le défi? A moins que nous soyons obnubilés par le mezoued et la hadhra. On aurait préféré voir toute cette vitalité davantage canalisée et mieux acheminée dans une autre direction. Dans un pays qui a fait de la culture son credo, il est inadmissible que nos décideurs culturels n'aient pas encore songé à constituer un ballet de danse à l'instar de ce qui se faisait il y a plus d'un demi- siècle en Egypte avec la troupe de danse de Rédha et Farida Fahmy ou au Liban avec le ballet Abdel Halim Caracalla et actuellement avec Inana dont la renommée a franchi les frontières. Le premier responsable du festival de la Médina, Zoubeïr Lasram, nous a confié qu'il envisage sérieusement de programmer, pour la 29e édition de Ramadan 2011, Inana qui se trouve actuellement sur la préparation d'un autre thème après celui de «La Reine Khatûm». Il est en ce moment en contact avec un célèbre groupe américain de musique gospel. Sachant que le negro spiritual est un genre extrêmement populaire qui, d'une année à une autre, gagne en adeptes, il est donc évident d'entretenir cette passion. L'ensemble russe «Medina» de musique spirituelle, qui a ébloui et enchanté, sera également présent avec un nouveau répertoire qu'il présentera avant le festival international de musique de l'art islamique «Rahmaton lel alamein» qui se déroule chaque année à Ispahan, en Iran. Il y aura aussi Chadi Garfi, une des plus belles découvertes de cette édition. Un pianiste de grand talent, intelligent, fin et racé, comme le souligne Zoubeïr Lasram. «Son jeu se développe au fur et à mesure qu'il prend de l'envergure. C'est un artiste qui n'a pas encore fini de nous surprendre et de nous ravir». Il y aura peut-être le Turc Denis Gül, l'Iranien Abbas Bakhtiari, le Jamaïcain Bobo Miyah et sans aucun doute le maître Lotfi Bouchnaq. D'ores et déjà, le festival de la Médina de Tunis s'est attelé à la tâche de la prochaine programmation qui sera certainement digne d'un f estival qui a su répondre à l'attente du public et qui, à travers des courants contradictoires, a su demeurer le point de mire de toute une ville qui l'a définitivement assimilé aux belles et longues soirées ramadanesques.