L'observateur averti constate la déliquescence des structures de l'Etat. La municipalité en constitue une des pierres angulaires majeures. Et la tenue des élections municipales est d'autant plus urgente que, désormais, tout le territoire national est couvert par les municipalités, en vertu des stipulations constitutionnelles. Plus de 3,5 millions de Tunisiens ont ainsi été intégrés dans les périmètres communaux La date des prochaines élections municipales fait visiblement problème. L'Instance supérieure indépendante des élections (Isie) a proposé, du bout des lèvres il est vrai, une date provisoire, les 5 ou 12 novembre prochain. Une réunion avec le gouvernement et les partis politiques à cet effet a été reportée au début de la semaine dernière. Une autre réunion de travail a eu lieu entre le gouvernement et le président de l'Isie, M. Chafik Sarsar, avant-hier, sans aboutir à un résultat concret. En fait, tant les partis politiques que le gouvernement temporisent en la matière. Les partis politiques, sans exception, ne sont pas prêts. Ils voudraient bien reporter les municipales à mars 2018. Ce qui pose de nombreux problèmes. Les élections régionales devraient succéder aux élections municipales. Quant aux élections législatives et présidentielle, elles sont légalement prévues en 2019. D'où le risque d'un essoufflement, voire d'une désaffection en bonne et due forme, des électeurs. Le gouvernement, lui, doit composer avec les empêchements légaux en instance. En premier lieu, pour tenir les élections municipales, il lui faudra dissoudre les délégations spéciales partisanes qui tiennent lieu de conseils municipaux. Elles sont plus de cent délégations sur les 264 municipalités que compte actuellement le pays. Sans compter les 86 municipalités nouvellement créées, de sorte que les élections porteront sur 350 municipalités, couvrant la totalité du territoire de la République. Or, la dissolution des délégations spéciales traîne encore, étrangement. Et puis il y a d'autres écueils de taille. La délimitation des périmètres communaux qui couvrent désormais la totalité du territoire national n'a pas encore eu lieu. Quant au Conseil supérieur de la magistrature, il fait encore l'objet d'une âpre guerre fratricide entre les magistrats. Et sans le Conseil supérieur de la magistrature, point de recours pré et post-électoraux possibles. Le Conseil doit, entre autres, présider à la mise en place des tribunaux administratifs territoriaux en première instance, et des cours d'appel administratives. Ces tribunaux et cours sont appelés à valider les candidatures des différentes listes en cas de différends avec l'Isie ou à statuer en cas de recours concernant les résultats du scrutin. Les partis, les magistrats qui s'étripent, s'en soucient comme d'une guigne. Et pourtant... Baffoun, membre de l'Isie L'Isie avait réclamé à cor et à cri l'adoption et la promulgation du Code électoral. Elle disait alors qu'il lui faudrait tout au plus 73 jours pour mettre au point l'échéancier des élections municipales. Maintenant, elle a changé de ton. Elle tergiverse, elle aussi. Pourtant, c'est à elle qu'incombe la fixation de la date des élections municipales. Certains disent qu'elle est obligée de subir le diktat de l'administration et des partis, sa gestion de ses propres finances n'étant guère au-dessus de tout soupçon. M. Moez Bouraoui, président de l'Association tunisienne pour l'intégrité et la démocratie des élections (Atide), l'avait déclaré ouvertement sur le plateau de Nessma live la semaine dernière, en présence de M. Nabil. Dans tous les cas de figure, les élections municipales ne sauraient souffrir le report, même pour le mois de mars 2018. Parce qu'il y a urgence. La situation de nos périmètres communaux pourrit sur pied. Saletés, nids de poule, ordures qui s'entassent, chiens errants, constructions anarchiques, dégradation inouïe du mobilier urbain, diminution substantielle des recettes municipales, y compris fiscales. Autant de plaies qui nous font vivre un calvaire au quotidien. L'observateur averti constate la déliquescence des structures de l'Etat. La municipalité en constitue une des pierres angulaires majeures. Et la tenue des élections municipales est d'autant plus urgente que, désormais, tout le territoire national est couvert par les municipalités, en vertu des stipulations constitutionnelles. Plus de 3,5 millions de Tunisiens ont ainsi été intégrés dans les périmètres communaux. Il ne faut guère que les calculs de boutiquier et l'esprit de clocher triomphent de l'intérêt public. M. Youssef Chahed, chef du gouvernement, devrait aider plutôt qu'entraver l'Isie à organiser les élections municipales au plus pressant et en toute souveraineté. Par-delà les calculs étroits et les corporatismes de pacotille.