Des indicateurs mitigés sur la performance des petites et moyennes entreprises (PME) tunisiennes ont été présentés, hier, à l'occasion de la présentation de l'enquête réalisée par la Confédération nationale des entreprises citoyennes de Tunisie (Conect), en collaboration avec le bureau d'études "One to One". Cette enquête, réalisée entre le 27 janvier et le 17 février 2017, a institué un baromètre ou "Miqyes", avec l'objectif de mesurer les incidences des mutations nationales et régionales sur la capacité des PME tunisiennes à créer de la richesse et de l'emploi et leur contribution efficiente dans le processus de développement économique et social. "Ce Miqyes permettra de disposer d'un diagnostic fiable et actualisé de la situation des entreprises, de l'évolution de leur état et surtout des tendances futures", indique Tarak Cherif, président de la Conect. Manque de compétitivité Pas moins de 540 PME tunisiennes ont été ciblées par cette enquête dans les 24 gouvernorats du pays, opérant dans divers secteurs économiques, notamment l'industrie, les services, le commerce et l'agriculture. Selon Youssef Meddeb, directeur exécutif du cabinet d'études chargé de l'enquête, les PME visées sont des entreprises employant entre 6 et 250 personnes. "Nous avons choisi cette catégorie d'entreprises ayant une moyenne d'âge de 16 ans. Elles sont des entreprises bien établies et ont de l'expérience sur les marchés local et étranger", affirme-t-il. Les révélations de l'enquête ont reflété les défis auxquels ces entreprises font face, dans ce contexte de morosité économique. Rappelons que 29,7% des PME ne sont pas arrivées à réaliser des bénéfices en 2015; de même pour 27% en 2016. Selon la répartition régionale, il s'avère que la région du sud est celle qui enregistre le plus grand nombre d'entreprises déficitaires avec 37,9%, de même pour le centre-ouest. Une réalité qui reflète le poids de l'économie informelle dans cette région. Sfax est le gouvernorat où il y a moins d'entreprises déficitaires avec 19,7%. En revanche, 39,3% des entreprises ont perdu en 2016 un ou plusieurs clients importants, principalement pour manque de compétitivité. Parmi les entraves, on cite les difficultés financières du client, la baisse de la demande, les problèmes logistiques, la situation générale du pays et la sécurité, etc. Entraves Les arrêts fréquents et brusques de la production sont également une des difficultés enregistrées, soit 30,2% des répondants, avec pour principales causes, le manque d'outil de travail et de matières premières, l'absence de demandes des clients, les perturbations externes, la tension sociale et les grèves. Du côté du financement, on note que 38,5% des PME interrogées recourent aux crédits de gestion, en tête les entreprises commerciales (43%), et 33,9% ont déposé des demandes de crédit (investissement et gestion) en 2016. D'ailleurs, à ces demandes, le taux d'acceptation pour les crédits d'investissement est seulement de 45% contre 68% pour les crédits de gestion. Par secteur, paradoxalement, les entreprises industrielles sont celles qui enregistrent le nombre le plus élevé de rejet des demandes de crédit, soit 65,7%. Le taux d'acceptation est de seulement 33% pour ces entreprises, alors qu'il s'élève à 33% pour les services et 88% pour le commerce. En ce qui concerne la performance de l'entreprise sur le marché, le constat est amer, 81,7% des entreprises répondantes ont affirmé qu'elles n'ont pas mis en place une méthode pour connaître leur part de marché. Pour les 17% ayant adopté cette méthode, elles sont satisfaites à hauteur de 72,8%. D'ailleurs, en étudiant de près les motivations des entreprises dans la conclusion des contrats, il s'avère que 44,4% ont refusé un contrat ou un marché en 2016 pour manque de rentabilité, alors que 28,1% l'ont refusé pour manque de capacité. Environnement contraignant L'enquête a également traité du capital humain dans l'entreprise. Elle révèle que le dirigeant reste le principal commercial de la PME, bien que 47,2% des PME interviewées indiquent qu'elles ont un responsable commercial à temps plein. De même pour la gestion des ressources humaines, avec une part de 37,4% pour le premier responsable et 34,6% pour le responsable RH. Pour les finances, 47,8% des PME indiquent que cette charge est octroyée à la direction administrative et financière et 29,9% pour le premier responsable. D'ailleurs, un indicateur culminant de cette charge est que 26,6% des chefs d'entreprise passent plus d'une heure par semaine avec le banquier. Concernant l'environnement économique et l'impact du marché informel, 68% des entreprises reconnaissent qu'elles sont menacées par la concurrence informelle, avec un taux qui s'élève à 80% pour les PME commerciales et à 76,9% pour les PME installées à Sfax. Les blocages administratifs sont également des indicateurs très importants, avec 23,2% des entreprises pointant du doigt l'administration fiscale, 17,8% la douane, 11,4% la Cnss et 9,6% les autorisations. La corruption est un fléau très présent puisque 50 des PME interviewées estiment qu'elles ne peuvent pas travailler convenablement sans être obligées de donner des pots-de-vin. Mais malgré ce bilan mitigé et contraignant, les entreprises sont plutôt optimistes (67,4%) contre 29,4% qui sont plutôt pessimistes. Elles sont 63,9% à avoir lancé un nouveau produit en 2016 et 58,5% qui comptent le lancer en 2017. De même, 59,4% affirment qu'elles ont eu de nouveaux clients en 2016, contre 40,2% qui n'en ont décroché aucun.