«Belkhodja... Dix ans déjà», une exposition-hommage au peintre tunisien Néjib Belkhodja à l'occasion du dixième anniversaire de sa mort, a été inaugurée par le ministre des Affaires culturelles la semaine dernière, à la galerie des arts, Dar El Founoun, au Belvédère. Notre peintre «national», peintre de l'abstraction par excellence et dont la singularité de son art est facilement identifiable, ce «théoricien remarquable des espaces architectoniques», Néjib Belkhodja nous a quittés il y a dix ans ! Pour célébrer le dixième anniversaire de sa mort, la galerie des arts, Dar El Founoun du Belvédère, dirigée par l'artiste Sameh Habachi, organise, depuis vendredi dernier, une exposition regroupant une magnifique collection d'œuvres signées Néjib Belkhodja et dont le vernissage a eu lieu en présence de M. Mohamed Zine El Abidine, ministre des affaires culturelles. C'était l'occasion, donc, de replonger dans la précieuse, incontournable et particulière Médina de Néjib Belkhodja, de se promener dans ses chemins colorés finement agencés, ingénieusement équilibrés. «Tunisien, Belkhodja semble suivre de très près les recherches picturales modernes qui se font aux Etats-Unis et en Europe. Ses tableaux n'en demeurent pas moins profondément tunisiens et n'auraient pu être créés ailleurs. Les éléments de ses dessins sont très proches de l'écriture arabe stylisée. C'est comme cela que je comprends la réussite d'un peintre tunisien ; maintenir le caractère propre à l'Afrique du Nord, tout en utilisant un langage universel. Telle est la vocation de la peinture tunisienne. Belkhodja est un artiste national et justement parce qu'il est tunisien, il a une portée internationale. Il est beaucoup plus tunisien que ceux qui font des anecdotes ; du pittoresque, de la miniature agrandie», écrivait, à son propos, Bernard Teyssedre, professeur d'esthétique et des sciences de l'Art à la Sorbonne, dans L'Action du 25 juillet 1970. En effet, Belkhodja a excellé dans un style particulier à travers lequel il communiquait ses émotions immenses dans un silence absolu. Parmi ses célèbres œuvres exposées, on retrouve «Médina-Architecturale», huile sur toile (collection du ministère de la Culture, de la Jeunesse et des Loisirs), «Kairouanaise» (collection de l'artiste), «abstraction crépusculaire » (collection privée), «Ken» (collection Ken), «Enfilade» (collection privée)... ainsi qu'un nombre de sculptures et plusieurs compositions, monotypes et dessins qui sont autant d'évocations de lieux réels revisités à la manière de l'artiste et où la couleur et la matière jouent un rôle essentiel. Parfois, on retrouve dans certaines œuvres cette étrange sédimentation d'une mémoire antique, de signes particuliers, véhiculant des messages ou transmettant des idées, tout en évoluant vers de nouveaux horizons artistiques. Ses œuvres laissent voir des constructions colorées, des poésies géométriques, des structures vigilantes, des paysages symétriques où l'équilibre entre les masses crée une conversation subtile entre les couleurs. Parfois, il y a ces rainures blanches ou noires indiquant les espaces de séparation entre les structures contenues dans le même tableau. Sa tendance constructive, architecturale n'est jamais froide. Les couleurs éclosent sur ses toiles avec une grande élégance et une minutie artisanale magnifique. Son œuvre est toujours un mélange subtil d'élégance et de silence pour le grand plaisir du spectateur. Une exposition qui vaut certainement le détour, à découvrir jusqu'au 25 mai.